dimanche 30 juillet 2017

La blonde de Galice


La blonde de Galice a des yeux de velours
La blonde de Galice vous invite à  l'amour
Tous les toros sont là
Oubliant corrida
Mais malgré son sourire et son air engageant
La blonde de Galice n'a jamais eu d'amant !
« Ben c’est normal, car je suis un bœuf… »
Chi-ca ! Chi-ca ! Chic ! Ay ! Ay ! Ay ! 
Tous les toros se sentent veufs…

Ben, malgré tout, la blonde de Galice est passée à la casserole, ou plutôt à la poêle sous forme d'entrecôte (bête abattue à 48 mois, maturation de la viande 45 jours).
Avec pas loin d'elle des Miss Blush, qui, je l'espère, ont rabaissé le caquet à celle qui se prétend la plus belle viande du monde.

Une récolte plus importante que celle obtenue dans l'arrachage improvisé précédant avait permis un tri séparant la grenaille du moyen calibre.
Ces Miss ont sans contestation possible bonne mine avec leurs joues roses et leur œil coquin :

Miss Blush, pommes de terres
Gros plan sur mes Miss

Je me contente de les laver et de les faire cuire doucement dans du beurre demi-sel une vingtaine de minutes.


Miss Blush, pommes sautées, grenaille
Elles se dorent...





J'ai sorti ma blonde de sa fraîche prison. Elle se sent ragaillardie.

blonde de Galice, entrecôte
 Blonde de Galice ragaillardie
Ma foi, je ne puis nier qu'elle aussi elle soit belle.
Quand mes Miss sont prêtes, je la parsème de sel fin et lui fait subir un aller-retour dans une poêle en acier bien chaude sur une larme d'huile et une noisette de beurre.
Elle s'en va reposer quelques instants sur une planche assaisonnée d'un tour de moulin de poivre noir.

blonde de Galice, entrecôte, pommes sautées, Miss Blush
Ma blonde se détend...
Je la découpe, hum, plutôt sympathique..

blonde de Galice, boeuf, entrecôte
La vengeance d'une blonde

À la dégustation, je découvre la meilleure des viandes d'origine étrangère testée dernièrement. Tendreté, goût, mâche...
Mais de là à dire que c'est la meilleure viande du monde...

Oui, mais...
C'est du chic, chic, chic... Aïe, aïe, aïe !


Le tian des secrets

Pléthore de courgettes dans le jardin.
Bien que peu enthousiaste devant les cucurbitacées, je m'applique cependant à leur offrir un destin culinaire.
Cette fois ci, ce fut un tian. Tian des secrets, car j'ai mis fin prématurément à la croissance d'une courgette et d'un potiron - c'est toujours ça de gagné...- en en cueillant les fleurs. et ces inflorescences farcies m'ont fourni deux petits coffrets que j'ai inséré au milieu du plat, tels les petites meringues au sein des mystères.

Pour constituer la farce, je hache échalote et persil, puis râpe un fromage de chèvre de Sainte-Maure, si sec qu'il me faut extraire la paille par une opération à cœur ouvert.

sainte-maure, échalote, persil
Sainte-Maure sénile ayant craché sa paille

Je mélange avec de la mie de pain et de la crème fraîche afin d'obtenir une pâte malléable que je façonne afin de l'introduire dans les fleurs débarrassées de leurs pistils.

Il s'agit maintenant de disposer les légumes du tian, tous du jardin : deux aubergines, une courgette vert foncé et une autre vert tendre, que je tranche à la mandoline et une grosse tomate, que je sabre au couteau. Pas le plus facile, c'est fou comme l'huile d'olive fournit un terrain glissant, je n'aurais peut-être pas dû en barbouiller le fond du plat, mais je craignais que ça n'attache, mais, bon, tant bien que mal, j'y arrive à l'aide de cales provisoires... Pour finir, les fleurs farcies repoussent vigoureusement les tranches diverses vers les côtés.
Je glisse quelques éclats d'ail nouveau, une feuille de laurier partagée en deux. J'effeuille au dessus du tian une branche de thym. Je sale, arrose d'un bon trait d'huile d'olive, et j'enfourne à 160°C.

J'arrose du jus huileux et de l'huile juteuse de temps à autre. Pour ma première sortie du four, je regarde ce que donne ma farce...

tian, fleur de courgette, fromage de Sainte-Maure
À l'ombre des courgettes en fleur
Apparemment, ma mixture ne s'écroule pas lamentablement !



Je poursuis la cuisson une quarantaine de minute. Les cinq dernières minutes, mais oui, bien sûr, je hausse à 180°C.

Le tian est prêt à servir.

Le tian des secrets


Ce plat aura beaucoup œuvré pour la réhabilitation des courgettes à mes yeux. Il y est presque parvenu.
Il est vrai que la courgette du jardin, même si l'on peut déplorer qu'elle soit un peu trop envahissante, offre quand même plus de saveur que sa malheureuse sœur des supermarchés ou même des marchands de primeurs...

vendredi 28 juillet 2017

Simmental m'était conté...

Si tout un chacun a entendu parler de l’homme de Neandertal, il n’en va pas de même en ce qui concerne l’homme de Simmental.
Pourtant cette branche du genre homo n’est pas dépourvue d’intérêt. Cette peuplade vivant jadis sur le territoire de la Suisse actuelle offre l’originalité d’être entièrement carnivore, contrairement aux hominidés  néandertaliens qui se livraient autant à la cueillette qu’à la chasse.
L’homme de Simmental vouait un véritable culte à la vache, qui était encore urus en ce temps-là. En témoigne l’abondance des dessins simmentaliens de cet animal, dont malheureusement il ne reste rien, car ils étaient simplement tracés dans la neige à l’aide d’un bâton.  En revanche des préhistoriens, alertés par un touriste fouineur intrigué par des silex taillés, ont mis à jour dans la vallée de la Simme un site où la présence de deux bifaces particulièrement tranchants  à côté d’un T-bone d’urus (dépourvu de chair, bien sûr !) ne manqua pas de les intriguer. Ce fut le chef du chalet-restaurant où ils avaient établi leur camp de base qui leur fournit une piste : l’homme de Simmental avait sans doute été le premier à préparer le steak tartare suivant la technique du hachage aux deux couteaux. Néanmoins cette hypothèse est contestée par certains chercheurs qui font la remarque qu’il est courant de se partager une côte de bœuf à deux.
Mais à peine quelques millénaires plus tard l’homme de Simmental dut quitter sa vallée sous la pression de l’homme de Neandertal, qui n’était pas un tendre. Un peu plus tard, l’homo sapiens vint le venger par une nouvelle expulsion.
L’homme  de Simmental se replia en Bavière. Il en reste d’ailleurs quelques traces culturelles : la culotte en peau de bête et le petit bout de queue de vache arboré fièrement sur le chapeau.

L’homme de science quant à lui regrettera qu’aucun test n’ait été effectué afin de déterminer la proportion de chromosomes hérités de l'homme de Simmental parmi l’ADN des Bavarois…
En revanche, les vaches amenées de la vallée de la Simme sont bien là !

Je me remémorais ces ères lointaines en sortant de mon frigo afin de les mettre à température ambiante quatre tranches de bavettes d’aloyau de Simmental tout droit venues de Bavière.

bavette, Simmeental, aloyau
4 x 6 mental

On remarquera que, enfin, après mes escapades américaine et japonaise, j'aurai de la veine en mangeant cette viande européenne !

Je me contente de passer rapidement ces pièces à la poêle en les arrosant de beurre demi-sel.

simmental, bavette d'aloyau
On poêle...

Cette viande favorite de beaucoup de restaurateurs n'est pas mauvaise, mais là encore je regrette nos parthenaises ou autre aubracs... La tendreté n'est pas tout !

Finalement, c'est avec les légumes que je me régalerai. Il faut dire qu'ils sont arrivés du jardin quelques minutes avant d'être cuisinés. Une petite inquiétude pour les temps de cuisson,  car ils sont bien loin d'être calibrés. mais c'est le prix à payer pour une récolte-minute !
Mais bien heureusement pas de sur-cuisson notable pour les petits ni de sur-cuisson pour les gros. Ma tactique a été de procéder à une cuisson longue à faible température finissant avec une hausse de flamme afin de caraméliser la surface.
Il s'agissait de pommes de terre Miss Blush et de carottes Pariser Markt. Accompagnées d'un petit oignon Paille des Vertus  partitionné en quatre...

paille des vertus, miss blush, carotte parisienne, pomme de terre
Marché parisien  avec une miss sur la paille 
Succulent !

mardi 25 juillet 2017

wagyu venere

Après son voyage depuis le Japon, on pourrait comprendre que ce tendre wagyu soit vénère.
Mais il n'en n'est rien. La mince entrecôte est maintenant bien reposée.



wagyu, Japon
Un wagyu tout juste arrivé du Japon

Non, venere, c'est le riz, plus précisément le Riso Integrale Nero Venere  produit à  la




qui côtoiera la viande posée seulement quelques secondes sur chaque face au fond d'une poêle en acier très chaude sans ajout de graisse.


Ce riz cuit pendant une demi-heure dans de l'eau bouillante salée (départ à froid).
Pendant ce temps, j'émonde deux tomates, taille la chair en petits cubes que je verse dans une petite casserole sur un trait d'huile d'olive. À feu moyen,  j'ajoute une petite cuillerée de sauce soja Marukin Shiboritate Nama, une pincée de piment d'Espelette et une gousse d'ail que je retirerai après cuisson.
Quand il ne reste pratiquement plus de liquide, j'arrose de quelques gouttes de balsamique blanc et commence un début de caramélisation. Je réserve.
La cuisson du riz est terminée. Je l'égoutte et le brasse délicatement avec une grosse noix de beurre.

Je ne suis pas trop dressage géométrique, mais pour une fois je m'empare de deux cercles. Il est vrai que le noir est un incitateur au graphisme... Le plus petit limitera ma compotée de tomate, que je réchauffe rapidement tout en la vivifiant par le jus d'un quart de citron. Le plus grand, légèrement décentré, contiendra le riz.
Ajouter l'entrecôte tranchée en bandes sur la planche après son aller-retour à la poêle ne prend que quelques secondes. Pas le temps que la garniture refroidisse, d'autant plus que j'avais mis les assiettes à chauffer au four. J'arrose le wagyu de sa propre graisse qui a fondu au fond de la poêle.

Un tour de moulin de poivre noir, un peu de persil ciselé, et les assiettes peuvent être posées sur la table.



wagyu, riz venere, compotée de tomate
Wagyu et riz noir venere




Résultat des courses (bovines) : comme toujours, le riz venere se révèle très savoureux ; la sauce est agréable avec sa touche un peu relevée ; la viande est fondante, goûteuse, mais pas avec le côté sanguin qui réjouit le carnivore que je suis quand j'attaque une entrecôte bien de chez nous. Le gras doit avoir un contrepoint...

Du sang, du sang, palsambleu ! 



Die schöne Müllerin

Sur mon piano j'ai joué la belle meunière à ma façon...

Sol la do re si fa si la do re, te voici bien enfarinée. Je t'allonge dans ton bain - un trait d'huile d'olive, ensuite un océan de beurre mousseux.
Tu reposes maintenant entourée de feuilles d'amarante cueillies au jardin rien que pour toi.
Certaines avec l'éclat de leur fraîcheur, mais le plus grand nombre sacrifiées en tombant au fond d'une poêle afin de te fournir une digne compagnie, elles se sont même laissées caraméliser avec quelques gouttes de balsamique blanc...



sole meunière, amarante
Soles meunières, tombée de feuilles d'amarante

La partition était bonne, et pas de fausses notes à la dégustation.

lundi 24 juillet 2017

La vie de Gédé

Gédéon était un vilain petit canard.
Depuis sa plus tendre enfance, il n’avait qu’une vocation : faire l’andouille…
Il voulut en faire son métier.  Il se produisit sous le pseudo de Gédé dans des bouges infâmes, on riait, non pas grâce à lui, mais simplement de lui, objet de lazzi en attendant le clou du spectacle, l’effeuillage d’une belle romaine qui se faisait appeler Martine Scarole.

Mais un jour il fut remarqué par un producteur - un peu rapace, mais au moins lui avait-il donné sa chance… Il put monter sur scène, et il faut bien dire que quelques-uns de ses one duck shaws remportèrent un franc succès, comme Magret s’amuse, Canard laquais, Poêlons nous bien au chaud ou encore l’inoubliable Pardon, j'en suis confit.
Hélas, la notoriété lui monta à la tête, et il eut l’ambition de produire son propre film. Ce fut l’aventure de l’écriture et de la mise en scène d’un scénario où il tenait le premier rôle : Citizen Cane. Lui qui rêvait de palmes, ce furent des sifflets qui accueillirent son œuvre au cours de la projection au festival de Canes.
Profondément blessé et déconfit, Gédé disparut de la scène après un bref passage à la télé où il s’insurgea contre tous ces grenouillages qui étaient la plaie du show bizz.

On vient de le retrouver dans les bras sa compagne qui n’était qu’une petite andouillette de rien du tout, bien loin de l’Andouille Sublime qu’il avait rêvé d’être. Ils gisaient morts, parmi les girolles de Sologne.
Triste fin ! On les recouvrit d’un dérisoire linceul de crème réduite sur une échalote hachée et des feuilles d’oseille. Une pincée de cinq-épices ajoutait un parfum légèrement anisé et de la couleur verte.
Oseille dont il avait cruellement manqué toutes sa vie, et vert d’une espérance cruellement déçue…


andouillette au canard, oseille, girolles
Requiescat in patella !

Moralité : à trop faire l‘andouille, on te vire.

vendredi 21 juillet 2017

Sans bretelles et culottée

Les ribeye steaks correspondent à l'appellation anglo-saxonne d'une découpe du bœuf qui correspond à nos entrecôtes privées de leurs bretelles. Il est donc normal que quand j'ai vu entrer chez moi deux de ces sans-bretelles taillés aux USA dans du Black-Angus...



black angus, ribeye
Black is black ?

...je les ais mis en présence de ma grande poêle bien culottée et bien française quant à elle (pensez-donc, une quinzaine d'années à voir passer viandes de toutes sortes les fesses bien au chaud... bien que sa grande sœur plus petite de taille puisse revendiquer plus de trente années de bons et loyaux services et soit donc encore plus culottée, mais deux steaks de bonne surface, ça dépassait sa capacité...).

Sans bretelles, mais avec un beau ceinturon de gras et plus que persillées. À tel point que l'on peut voir la marque de mon doigt incrédule ayant enfoncé le cœur de graisse en se demandant si je n'allais pas tomber sur un os...

Rassuré, j'ai posé mes ribeye steaks sur  une noix de beurre demi-sel mousseux, les ai bien saisis sur  une face, puis je les ai retournés, ajoutant une grosse noix du même beurre. J'ai continué quelques instants la cuisson, nourrissant constamment la viande. Quelques minutes plus tard, les deux pièces reposaient sur une planche, relevées par des tours de moulin de poivre.


ribeye, black angus
Yankees beurrés



Dévoué envers mon(mes ?) lecteur(s), j'ai sacrifié l'arrivée triomphale de mon ribeye steak à moi sur la table en le pré-découpant afin de montrer l'apparence de la coupe. Quel dévouement !

steaks, black angus
Il n'y a pas loin de la coupe aux lèvres


Cette viande était extrêmement tendre, avec une saveur marquée. Il n'empêche qu'à ce Black Angus je préfère la Parthenaise en raison d'une présence fibreuse qui rend la mâche plus agréable à mon goût.
Et aussi en raison du manque de sang. Mais là, c'est peut-être dû au conditionnement pour le voyage transatlantique...

Qu'on ne croit pas cependant que ces yankees se feront remonter les bretelles par moi ! C'était quand même un repas d'exception. 



Viande accompagnée de pommes de terre Amandines blanchies  une dizaine de minutes dans l'eau salée puis passées à la poêle à feu doux dans moult beurre doux fermier une vingtaine de minute, avec finition sur feu fort  la dernière minute. Le résultat : une quasi purée enfermée dans une coque croustillante...


pommes de terre amandines
Chère Amandine...



mercredi 19 juillet 2017

Chez les Grecs

Toujours à la recherche du consensus intergénérationnel, nous avons décidé, mon épouse et moi, de réaliser des légumes farcis à la grecque. Et comme la décision fut prise en duumvirat, c'est à quatre main que nous nous lançons la veille du passage des petites infantes dans l'exécution de la recette.
Bientôt à trois mains et demi...
En effet le début de la préparation consiste en un passage sur les gros trous d'une râpe à quatre faces de quelques grosses tomates, d'un bel oignon, de deux gousses d'ail. Ma moitié n'a pas manqué d'adjoindre un doigt à cette liste, devenant ainsi ma 1/2,001. Que n'ai-je alors entendu sur les intégristes crétins de l'orthodoxie culinaire qui se privent de l'usage des mixeurs et autres broyeurs mécanisés et mettent ainsi en danger l'intégrité de leurs proches... Une réflexion de ma part sur l'adéquation de l'orthodoxie avec l'hellénitude n'a rien arrangé.
Heureusement, ma commise pansée ayant rendu son tablier et étant partie grommeler vers d'autres horizons, je puis continuer sereinement dans la préparation de la farce. Ayant vérifié que le mélange légumier dans la bassine n'est pas souillé d'hémoglobine, j'y incorpore persil et coriandre ciselés, effeuille une branche de thym et une sommité d'origan. Je verse 400g de viande de bœuf hachée et je mélange bien en ajoutant trois cuillerées d'huile d'olive. Je sale et poivre légèrement, saupoudre d'une pincée de cannelle. Je fais cuire le tout à feu doux dans une poêle en compagnie d'une feuille de laurier. Dans l'eau de végétation vont gonfler un petit verre de riz et une poignée de raisins secs. Une poignée de pignons suivra en fin de cuisson.
Quand il ne reste presque plus de liquide, après une vingtaine de minutes,  je réserve et laisse refroidir.

Il ne reste plus qu'à farcir les légumes - tomates, courgettes du jardin, poivrons verts et poivron blanc  - et enfourner pour environ une heure à 160 °C ce petit monde badigeonné d'huile d'olive. Je n'oublie pas d'arroser régulièrement avec le jus du fond du plat, ou plutôt des plats.
Je sors ces légumes farcis à la grecque. L'odeur est alléchante, mais pas touche, c'est pour demain !

Grèce, légumes farcis, tomates, poivrons, courgettes
Farcis à la grecque





Aujourd'hui, c'est le lendemain qui chante !

Je mets à réchauffer les légumes farcis dans le four. Puis, au moment de servir, je les parsème de coriandre ciselée.

légumes farcis à la grecque, coriandre
Sous la coriandre

En mon for intérieur, je m'attends à des réflexions de celle qui naguère avait rejeté avec l'air pincé d'une princesse offensée les quelques feuilles de persil décorant son assiette.
Mais non, l'offensive se déclenche sur un autre front.
"Qu'est-ce que c'est ?" dit-elle en éloignant dans un coin les quelques pignons qu'elle a découvert.
Je tente la méthode décrite par Georges Duhamel dans Les Plaisirs et les Jeux :

Zazou vient de contracter l’étrange maladie qui consiste à dire, de chaque plat qu’on lui présente : « J’aime pas ça ». Il reçoit donc quelques bouchées de veau et s’écrie : « J’aime pas ça ! » — Mange donc, c’est du veau. — J’aime pas le veau. — Mais c’est du bon veau. — J’aime pas le bon veau. » ... Maman intervient, prend l’assiette, ajoute un peu de jus, coupe les trop gros morceaux, émiette du pain et replace le tout sur la petite table. « J’aime pas le veau. — Ce n’est pas du veau, c’est du chien. — Ah ! bon. » Et il mange. Il a bon appétit... Il est en train de manger du chien et c’est rudement bon !

J'affirme que ce sont des asticots, mais force m'est de constater que cette tactique ne fonctionne pas avec les enfants d'aujourd'hui....
Mon épouse se lance dans une description bucolique des pins généreux qui font don aux écureuils et aux cuisiniers de leurs cônes, coffrets de précieuses graines.
"Ah oui, on écarte les bouts de bois et ça tombe..!"
Visiblement, elle connaît. Mais les pignons ne resteront pas moins dans leur zone de relégation.


Mais à part cette pignophobie, tout le monde semble se régaler, et l'intéressée exige contre toute attente que l'on lui mette les restes dans un doggy girly bag...


Puis arrive le dessert réalisé par ma 1/2,0001 (elle est en voie de cicatrisation).
Des abricots pochés dans un sirop mis ensuite à réduire avec une feuille de menthe.
Les fruits arrosés de cette réduction et mis au frais sont parsemés au moment de servir d'amandes émincées que j'avais torréfiées dans le four allumé pour les légumes...

abricots pochés, amandes torréfiées
Sous les amandes, les abricots

Eh bien, la encore, ces malheureuses amandes déplaisent tout autant que les pignons...
Le diagnostic s'aggrave : il ne s'agit plus seulement de pignophobie, mais bel et bien de granophobie !



lundi 17 juillet 2017

Des homards dans la toile

Jadis, on pêchait les homards au casier.
Pour ma part, j'ai utilisé une technique plus moderne : la toile.

Je surfais quand je  me suis retrouvé sur le vaste fleuve Amazon, fleuve en fête ce jour là... Et c'est ainsi que j'ai aperçu au loin quatre homards qui me faisaient de l'œil.


3 ou 4 Homards Bleus Bretons vivants - poids total 2 kilos
Etat : Neuf

"49 €, et on vient frétiller chez vous !"
Bon, ce n'était pas cher, et je me suis laissé tenter. Pensez bien, si ils n'étaient pas d'occasion !

La veille du rendez-vous, je recevais un message m'annonçant leur arrivée.
Effectivement, le lendemain ils sont là, tous les quatre, allongés sagement côte à côte, bien au frais et emmitouflés sous une épaisse couverture imbibée d'eau de mer -personnellement je n'aimerais pas trop, surtout si on me serrait aussi les pinces avec l'énergie d'un Trump et encore plus longuement qu'il n'y parvient...
Je les découvre et je les découvre.

homards bretons, Amazon
Homards passés à la caisse

Au début, ils régissent mollement, encore tout courbatus par le voyage de nuit. Mais ils ne tardent pas à commencer à s'agiter, et je m'empresse de les remettre temporairement au frais sous leur couverture.



Trois heures plus tard, je me lance dans la cuisson à la nage de deux d'entre eux. J'ai préparé un bouillon parfumé : feuilles de laurier, étoile de badiane, thym, oignon, échalote piquée, poivres, piment  végétarien. J 'y verse deux grosses poignées de sel, et quand l'ébullition est atteinte, je plonge dans cet océan phantasmé mes homards la tête la première. Bon, ils n'aiment pas trop, mais leur réaction est brève.

homard, bouillon
Le grand plongeon

Je les laisse une première fois durant 12 minutes à petit bouillon, les sort, détache les pinces que je replonge 4 minutes pour en parachever la cuisson. En ce qui concerne le corps, je l'immerge au contraire dans l'eau glacée...

Une fois passé le bac


homards bretons
Ils sont cuits....

ils entrent dans un sac pour être embarqué par un individu qui n'aura même pas la reconnaissance du ventre. Il se permettra de critiquer le repli de la queue. Il est vrai que j'avais songé à les faire se cambrer par la technique du ficelage.



Mais ma maladresse, ajoutée à leur volonté musclée et sans faille de faire obstacle à ce projet, m'a dissuadé de poursuivre  sur cette voie. Après tout, il s'agit de repas de famille, pas de service gastro !
Mais allez faire comprendre ça à un individu qui se targue d'avoir tordu le cou à un homard en suivant un cours à l'Académie de Cuisine Alain Ducasse !
L'individu en question reconnaîtra néanmoins plus tard la bonne cuisson du produit.



Le soir, je passe à la cuisson des deux homards restants.
Réfrénant toute sensiblerie, je les fends en deux et les pose côté chair sur la plancha barbouillée d'un peu d'huile d'olive. Au bout de deux minutes se joint à la réaction de Maillard une réaction de l'alarme anti-incendie.
Une minute plus tard, sourd à ce vacarme je retourne imperturbable mes mi-homards.
Je surveille la cuisson à l'œil et au toucher, arrosant d'un peu d'huile d'olive pour empêcher la chair de se dessécher.

homard, plancha
Viva la plancha !

Quand le degré voulu me semble atteint, je retire mes bestiaux pourfendus de la plancha, détache les pinces, que je casse et dont je poursuis la cuisson pendant cinq minutes
Je dresse dans deux assiettes et la simplicité, avec une salade de pourpiers.

homard, pourpier
Un homard, un ! -Oui chef, ça marche !

Ces homards de ligne (de commerce) sont fameux



Ah, on n'arrête pas le progrès... Il y a quelques années, la toile me fournissait  "Le silence de la mer", désormais elle me fait pratiquer la pêche au homard !


dimanche 16 juillet 2017

Des bulots peinards, des calamars qui perdent la tête

En quête d'air marin aux halles, rencontre avec des bulots de belle mine et des petits encornets resplendissants de fraîcheur. Que choisir ?
-Les deux, mon amiral !
Le problème, c'est qu'il ne faut pas gâcher ces produits en les laissant traîner au réfrigérateur, ne serait-ce qu'une journée et que nos panses ne sont pas extensibles. Alors je décide de cuire les bulots qui seront mis aux frais jusqu'au lendemain.


Bientôt ces coquillages se prélassent dans l'eau salée. En voici une vue du ciel prise par mon mano-drone.

bulot
Bulots se prélassant


On voit le plaisir qu'ils prennent dans ce bain.
Sournois, je leur dis : "J'ai une plus grande  piscine. Et en plus elle est chauffée... Est-ce que ça vous dit ?"
Un chœur unanime éclate ; "Oui, oui !"

Et ils plongent en se bousculant dans la casserole que j'ai préparée à leur intention.
"Et même que le bain est parfumé : oignon, piment végétarien, frais cueilli, j'vous dis pas les fragrances, du thym qui a de la branche, plein de lauriers sur lesquels vous pourrez vous reposer, des graines d'anis vert et des poivres d'un peu partout. J'oubliais, il y a du sel à profusion, tout droit venu de votre océan natal..."


bulot, bouillon
On aimerait être à leur place  ...encore que !


Les bulots s'interpellent . "Vas-y, vas-y...!"
L'eau devient de plus en plus chaude, les vas-y s'tassent. ***
C'est le silence. Un petit remord, j'aurais dû dire que ces bulots étaient en CDD...
L'eau bout, je laisse 22 minutes, car si ce sont des bulots peinards, ce ne sont pas des petits bulots, loin de là. J'attends que le bouillon refroidisse avant de les sortir et les réserver.
Le lendemain, je les sortirai, préparerai une mayonnaise maison, constatant qu'avec un œuf sortant du frigo et une huile à 25°C, ça monte très bien contrairement à ce que l'on raconte.

Je pourrai dresser deux assiettes que je trouverai fort à mon goût, à l'œil, mais aussi au palais.


bulots, mayonnaise
Un bulots-mayo, un !




Mais pour l'instant c'est au plat du jour que je dois me consacrer.
Pas mal de travail pour déplumer et déboucher-désyeuter ces petits calamars (que l'on pourrait bien appeler supions ou chipirons si l'on préfère...). Ils confirment leur parfaite fraîcheur, et je trouve même un petit poisson à l'œil brillant perdu égaré en leur sein.
Bien rincés dans l'eau citronnée, je les égoutte et les sèche dans une serviette.
Je leur fais faire un aller-retour dans l'huile d'olive d'une poêle bien chaude.
Je les sors et les réserve pour deux ou trois minutes dans un bac.

Cette huile d'olive, elle a un vécu : elle vient de me permettre de confire cinq gousses d'échalotes déterrées la veille dans le jardin. Cuisson d'une heure en essayant d'osciller avec mon pifo-thermostat autour de 60°C... Elle va parfumer les calamars.
J'avais aussi fait cuire des pâtes alsaciennes conservées al dente.

Je verse les pâtes dans la poêle, le feu étant au minimum., les écarte vers le bord afin de former une sorte de nid dans lequel je niche mes chipirons. Je pose les gousses d'échalote, y ajoutant le même nombre de gousses d'ail noir d'Aomori.

Je me dépêche de faire pleuvoir dans une géographie plutôt aléatoire du piment d'Espelette bien rouge et de fins flocons d'algue Ao Nori bien verts. Quelques peluches de persil et de fenouil, et la poêle est prête à aller sur la table. Ah, non, il me reste encore à arroser du reste d'huile de confisage des échalotes que j'ai remise à chauffer et de quelques gouttes de jus de citron afin de conférer une plaisante pointe d'acidité...


calamar, echalote confite, ail noir, Aomori, algue Ao Nori, pâtes, Espelette
Petits calamars à ma façon


La plat tient ses promesse, mêlant les parfums légèrement sucrés des bulbes et les notes iodées de l'algue au odeurs de piment et de céphalopode, alliant douceur et vigueur contenue.



Je l'ai trouvé, mon air marin !



*** pardon, il fait très chaud....




mercredi 12 juillet 2017

Arrivé à bon porc

J'ai toujours la crainte quand je cuis une grillade de porc de ne pas réussir la cuisson et de me retrouver avec une tranche tout aussi sèche et archisèche que les chaussettes de l'archiduchesse...
Une bonne marinade s'impose donc.


Comme j'ai eu la chance que mon pied de piment végétarien ait résisté à la canicule et à l'absence de son arroseur quotidien (ce qui n'est pas le cas, hélas, pour les piments thaï et habaneros), j'en ai fait l'ingrédient principal de celle destinée à parfumer le beau morceau coupé sur l'étal de mon éleveur de porcs normand.
J'y ai adjoint du gingembre frais, de l'ail nouveau, du persil, de la coriandre, du thym, ainsi que du poivre Timiz, du poivre blanc de Panja, du poivre noir de Kâmpôt et un clou de girofle pilés au mortier sur une pincée de gros sel. Comme sur le pied défunt était resté accroché un piment habanero un peu ratatiné, je l'ai récolté et haché, il était encore capable de donner de la vigueur. J'ai arrosé du jus d'un demi-citron jaune, en profitant pour prélever du zeste que j'ai incorporé au mélange.

Afin que la marinade pénètre un minimum dans la chair, j'ai placé le morceau de grillade barbouillé de cette mixture dans un récipient pour mise sous vide. J'ai versé trois cuillerées d'huile d'olive et un bon trait de Sauce soja Marukin Shiboritate Nama.


marinade, grillade, porc
Marinade là...


J'ai refermé le couvercle.
Et la machine pompa, pompa, jusqu'à ce qu'avec un soupir d'aise elle déclara ; "Eh ben ça-y-est, le vide est fait !".


Trois heures plus tard, pschitt, j'ouvrais...

Je posais la pièce de porc sur le gril en fonte bien chaud, à côté de l'accompagnement prévu : de fines tranches de courgettes du jardin en train de compoter doucement avec quelques tomates et herbes aromatiques.


gril, porc, grillade, courgettes, marinade
Cochon sur le gril


Le résultat, ouf, fut moelleux à souhait...
Quant aux parfums !

lundi 10 juillet 2017

Le prefoli

Il n'y a guère, le préfou était une savoureuse gourmandise salée que j'aimais découvrir au hasard des balades dans quelques petites boulangeries de village vendéennes. Accompagné d'un petit verre de vin blanc local pris à la terrasse du bistrot voisin, il permettait une petite pause bien agréable. Je me souviens, non loin de la forêt de Mervent...
Désormais le préfou a envahi les supermarchés, de Vendée et d'ailleurs.  Il s'y décline dans la médiocrité, voire l'imbécilité comme ces préfous au chorizo, au roquefort ou à la rillette de sardine qui côtoient le probablement trop bouseux produit traditionnel au beurre d'ail. Et les artisans-boulangers du centre-ouest ayant découvert ce créneau sans doute rémunérateur ne font guère mieux dans la qualité.
Alors, étonnamment, c'est par le biais d'une boulangerie de ma ville francilienne que j'ai repris goût au préfou : le sien offre un bon goût de beurre parfumé -avec une modération de bon aloi- par un fin hachis d'ail, une croûte craquante enfermant une mie moelleuse bien imbibée. Et, last but not least, les deux faces du produit restent bien solidaires à la dégustation, ne laissant pas dégouliner un trop plein de graisse sur son t-shirt, sa chemise, son corsage, sa cravate (rayer les mentions inutiles).
Un régal..
Le seul problème, c'est qu'il ne s'agit pas d'un préfou vendéen  pur et dur. Le pain garni est vraisemblablement pressé dans une machine à panini.
Mais bon, je ne me montrerai pas plus royaliste que le chouan, au moins le produit est-il goûteux et non dénaturé. Comme on dit à la télé, c'est une bonne revisite.



préfou, panini
Prefoli


Aussi le baptiserai-je du nom de prefoli...


Et j'obtiens ainsi un prétexte pour narrer la vraie histoire de la création du panini, qui est bien différente des idées reçues en la matière...


Tout commence vers les années 1900 dans le quartier de la Bastille.
Nini est une habituée du Bal à Jo. Elle y vole d'une étreinte à une autre jusqu'au jour où elle aperçoit dans un coin de la salle un beau costaud qui lui donne des frissons rien qu'à le regarder. Elle se rencarde, c'est Bibi la crème, surnommé ainsi parce qu'il travaille chez un boulanger-pâtissier, et que son rôle principal est d'y manier la poche à douille.

"Sûr, je l'ai dans la peau !" se dit Nini. "Même que je pourrais devenir sa bourgeoise..."
Mais voilà, Bibi est timide, il arrive tout juste à bredouiller qu'elle est si bonne, si gentille.
"C'est tout ce que tu penses de moi ?"
"Bah, je t'aime bien..." répond le benêt.
Nini désespère de retrouver un jour entre ses bras autrement qu'au son de la valse-musette.
"Jamais il ne se déclarera." gémit la pauvre Nini auprès de ses copines, qui ne la reconnaissent plus derrière ses larmes.
Mais l'une d'elle la secoue.
"Rien ne sert de geindre, la solution est pourtant évidente. Fais le premier pas !
-Tu crois ? Mais que va-t-il penser de moi !
-Tss tss, dans ces circonstances un homme ne pense pas."
Nini médite la leçon. Elle n'a pas tort, Juju, il faut passer à l'action.

Le lendemain à l'aube, Bibi caresse tendrement Nini.
"Tu as la peau douce aux taches de son..
-Ah, toi, alors ! On voit bien que tu travailles dans une boulangerie !"

Quelques semaines plus tard, ils se marient. Nini avait mis de l'argent de côté : ils peuvent racheter un petit fond de boulangerie au bord de la faillite. Elle a le sens du commerce, elle a l'idée de demander à Bibi de façonner des petits pains  qu'elle fend en deux pour les garnir de viandes ou de légumes obtenus à bas prix au remballage du marché Richard-Lenoir voisin.
C'est une bonne idée : ça se vend ...comme des petits pains, si j'ose dire. 
Puis l'hiver arrive, les ventes chutent. On leur fait comprendre que l'on eut préféré manger chaud.
Nini a une autre idée. Elle avait été repasseuse quand elle avait douze ans. Elle pose à la demande le pain avec sa farce sur la plaque en fonte coiffant le poêle myrrhus qui chauffe la boutique, l'écrase avec le fer à repasser de sa jeunesse tenu au chaud sur un petit brasero. Pour qu'il ne refroidisse pas trop vite elle l'emmaillote de bouillons de l'Intransigeant ou de l'Aurore

Encore un succès !
Il faut trouver un nom à ce produit...
Nini songe à son passé, s'émerveille de constater jusqu'où elle a réussi à parvenir avec Bibi la crème...
Heureusement qu'elle a écouté le conseil de Juju, faire le premier pas.
Puis il y a eu un deuxième pas, la création du petit pain garni. Enfin un troisième, l'invention du petit pain chaud bien croustillant

Le visage de notre boulangère s'éclaire. Elle a fait le premier pas, Nini...  Le nom s'impose à elle comme une évidence
Alors elle prend un pinceau, le trempe dans le blanc d'Espagne et sur la vitrine écrit de sa plus belle écriture en tirant la langue :

DEMANDEZ LE PREMIER PAS NINI

Bientôt le petit peuple de la Bastoche, dont le génie est aussi celui de la langue française, abrège l'appellation de son en-cas favori : ce sera le pas-nini, rapidement transformé en panini.


Pourquoi les Français cèdent-ils toujours au penchant d'attribuer à des étrangers des inventions pourtant nées dans notre Hexagone ?  😒


Quand je lis ce récit de la naissance du panini, je ne peux que penser que plutôt que d'accompagner le prefoli de pourpier, fusse-t-il frais cueilli du jardin, il aurait été plus raccord de servir une salade de petite roquette...


pourpier, oignon rouge
Salade de pourpier et oignon rouge



dimanche 9 juillet 2017

Gaudryole

Je revenais du marché, bien aise de retrouver un peu de fraîcheur dans ma bulle climatisée à roulettes.
Radio Gâtine diffusait son Petit bal du dimanche, émission ruralo-nostalgique, dont les airs d'accordéon me semblaient propres à déstresser les légumes arrachés à leur terre natale blottis dans un panier sur le siège arrière.
Le pianoteur du pauvre finissait d'égrener les derniers arpèges de "Prenez mon cœur et mes roses", à moins que ce soit "Le tango des fauvettes", je ne sais plus, quand, voyant que la montre de bord affichait 11h05, je m'exclamais : "Mais c'est l'heure de Gaudry !".
Tant pis pour les légumes, de toute façon ils seraient bientôt cuits.
France Inter diffusait le dominical On va déguster, émission parisiano-tendance, dont les bavardages culinaires me semblaient propres à déstresser un citadin angoissé par la lente agonie des bourgades moribondes.
Le thème retenu par François-Régis Gaudry cette semaine là était la cuisine de Grèce.
Et parmi les recettes, l'une d'elle m'a paru particulièrement adaptée pour une de ces périodes où la température ambiante fait hésiter à allumer son fourneau... Il s'agit de la préparation du

TZADZIKI :



Quelques jours plus tard, revenu en ville, je passe à l'action.

Je râpe un concombre, épluché très partiellement, sur les gros trous d'une râpe à quatre faces.
J'ajoute une cuillerée de gros sel, mélange dans une passoire que je pose à cheval sur une bassine.
Je laisse dégorger au frais durant une demi-heure.
J'ai acheté un vrai yaourt grec -et non à la grecque !-, celui conseillé dans l'émission, à juste titre
comme je le constaterai à la dégustation.






Je verse le contenu de la boîte dans un bac, je transfère le concombre râpé dans un torchon.
Je tords et retords ce linge le plus fort possible, encore beaucoup d'eau de végétation est exprimée.

J'incorpore la pulpe quasi sèche ainsi obtenue au yaourt, ainsi que deux gousses d'ail -râpées quant à elles sur les trous les plus fins. J'arrose avec trois cuillerées d'huile d'olive, libanaise -nobody is perfect-, mais c'est un moindre mal, qu'aurait dit un hellène si elle fût turque😡...

Je brasse avec une fourchette. C'est bien mélangé, parfait, il ne reste plus qu'à présenter cette entrée dans un plat.


tzadziki, yaourt grec
Tzadziki au vrai yaourt grec


Pour suivre, juste une petite salade de poisson.
Je fais subir un bref aller-retour à deux petits filets de cabillaud dans de l'huile d'olive sur une poêle chaude, je les étends ensuite sur un plat et les fractionne tout en délicatesse, on n'est pas des sauvages quand même...
J'arrose d'huile d'olive et d'un trait de balsamique blanc. Je parsème d'un peu de menthe du jardin ciselée, place çà et là quelques petites tomates partagées en deux. Je poivre, je sale.
Au moment de servir, j'ajoute quatre demi-tranches de citron, agrume dont je presse un des bouts restants sur le poisson afin d'ajouter la pointe d'acidité bienvenue...


cabillaud, salade, menthe
Cabillaud, la menthe en soupçon



J'obtiens ainsi un plat apte à succéder avec le même caractère de fraîcheur à cette onctueuse et savoureuse entrée qui m'incite à retirer (tout au moins provisoirement..) le concombre de ma liste noire des produits sans intérêt gustatif...

Merci, Monsieur Gaudry !





vendredi 7 juillet 2017

Une glace à la gomme.

J'avais toutes les raisons de réaliser la glace libanaise concoctée par Andrée Maalouf devant les caméras de FR3.
La chaleur ambiante invite à la consommation de desserts glacés, mais les glaces du commerce sont devenues de plus en plus abominables, émulsions hyper sucrées dans lesquelles on injecte des pépites de n'importe quoi pour faire croire qu'il y a une présence dans ces déserts gustatifs.
En revanche, les restaurants libanais continuent de me régaler par leur glaces à la texture si particulière.
Andrée Maalouf passe pour faire autorité en matière de cuisine libanaise.
Enfin la réalisation de cette recette ne nécessite pas de fournaise inopportune dans la cuisine ni de travail de force.

Je me suis donc lancé sans crainte dans la confection de cette Glace au sahlab.


Pour débuter, je place quelques larmes de mastic avec un peu de sucre en poudre au fond  de mon mortier en granit.


mastic, mortier,glace
Du sucre et des larmes



Et je pile...
Je pile...
Je pile...


mastic, mortier
Le zèle et le pilon


Je réserve et ajoute la poudre de gomme arabique (20g) au sucre (200g).


gomme arabique
Toute l'absence de parfum de l'Arabie




J'ajoute 75cl de lait et 25cl de crème, je mélange bien et je verse dans une casserole que je pose sur le feu.


glace libanaise, appareil
La crème de la crème




Et je touille...
Je touille...
Je touille...

La bonne consistance est atteinte, je retire du feu, ajoute deux cuillerées d'eau de fleur d'oranger.
En l'honneur de Monsieur et Madame Maalouf, elle sera libanaise.





J'incorpore aussi le mastic réduit en poudre.
Je laisse tiédir et mets au frigo...

Un peu plus d'une heure plus tard, je verse dans le bol de la turbine. Une remarque à ce propos, il est dit dans le commentaire de l'émission qu'Andrée Maalouf ajoute son grain de sel, alors qu'elle applique tout simplement l'ancien mode d'emploi fourni avec la machine, qui consiste à introduire une dosette d'eau saturée en sel afin de faire la liaison du bol avec la source de froid sans se solidifier -et non pas pour abaisser la température comme il est affirmé ; à noter que désormais il est préconisé d'utiliser un alcool, moins corrosif pour le joint, que j'ai d'ailleurs dû pour cette raison faire remplacer sur ma turbine au bout de quatre ou cinq ans d'un usage pourtant modéré.


Mais assez médit sur cette brave vieille qui en dépit de son âge certain se consacre gaillardement à sa tâche..


glace libanaise, sahlab
Silence, on tourne !



Au bout d'une quarantaine de minutes, la glace est prise, et il ne reste plus qu'à l'extraire pour la  conserver dans des bacs de plastique de récupération conservés au congélateur.



glace libanaise
Le fantôme baissera les bras !



Elle a beau se draper dans sa dignité, il faudra bien qu'elle sorte !




Tout devrait se passer au mieux quand nous sortons notre glace sous les yeux gourmands des enfants et petites infantes.
Mais voilà... Non, ce n'est pas mauvais, bien qu'un peu trop sucré à notre goût. Mais rien à voir avec la texture de la délicieuse glace à la crème de lait dont nous nous sommes plus d'une fois régalés dans des restaurants libanais. Nous ne retrouvons pas cette légère élasticité pas caoutchouteuse le moins du monde propre à ces glaces sans œufs.
Je crois savoir pourquoi, le sahlab libanais utilisé pour les glaces n'est pas de la poudre de gomme arabique, mais du sahlep, poudre obtenue à partir d'une racine d'orchidée.

Jadis, j'avais utilisé ce dernier produit pour confectionner une bûche glacée à la libanaise, et la réussite était là, tant dans le goût que dans la texture.



glace libanaise, sahlep
Bûche du temps jadis




Alors j'ai du mal à comprendre.
Je n'ai bien entendu pas la prétention d'être plus savant qu'Andrée Maalouf en cuisine libanaise.
D'autre part, quand je vois l'aspect de sa glace, j'ai bien l'impression que c'est du sahlep qu'elle a utilisé.
Mauvaise appellation par une traduction approximative ? Mais si l'on ne peut plus se fier en matière de vocabulaire culinaire à la femme d'un académicien dont j'ose espérer qu'il s'intéresse un minimum aux préparations de son épouse et communique avec elle, alors à qui faire confiance ?
Difficulté de se procurer un produit exotique qui entraîne une volonté de rendre l'exécution plus accessible par un changement d'ingrédient? Mais alors on dénature complètement la recette !

Bref encore une fois la télévision nous offre de l'approximatif... Et pas d'explications...
Quel gâchis que cette recette à la gomme !






lundi 3 juillet 2017

Les recettes du CHEF triplement luné (mal) CHAUD-ROND

Ayant constaté une baisse de fréquentation de ce blog, j'ai fait appel au consultant BlingBlog qui vient de me transmettre les résultats de son étude. Pour faire bref, les lecteurs se sentiraient frustrés de ne pas être confrontés à "de vraies recettes" pour reprendre la formulation d'un des membres du panel consulté.
Aussi, afin de pallier cette situation, j'ai obtenu du triplement luné
Chef Chaud-Rond
l'autorisation de publier en avant-première de bonnes feuilles de son ouvrage
La cuisine est un jeu de c...
à paraître dans les prochains jours aux éditions Grosse-Prise.




Escargots au beurre persillé dans leurs coquilles

Ingrédients :

12 souris vertes
1 vieux champ d’ail
1 tête de veau entière
1 sachet de cacahuètes
1 journal

Ustensiles :

1 friteuse
1 bassine d’eau
1 quatre-quatre
1 billot
1 hache
2 pierres

Processus :

Prendre les souris, les tremper dans l’huile, puis dans l’eau. On obtiendra une douzaine d’escargots tous chauds.
Effectuer des manœuvres au volant du quatre-quatre sur la totalité de la superficie du champ d’ail. On obtiendra sans problème l’ail écrasé que nécessite la recette.
Extraire le persil des narines de la tête de veau -le reste, par souci d’économie, pourra être réservé pour une autre préparation. Le placer sur le billot et assener de violents coups de hache jusqu’à parvenir à la finesse adéquate.
Ecraser grossièrement  les cacahuètes  entre deux pierres. On confectionnera ainsi un beurre de cacahuète incrusté d’éclats de ce fruit. 
Parcourir avec attention les pages du journal afin de vérifier que l’on y trouve bien la douzaine de coquilles indispensable pour la réalisation de la recette. Si ce n’est pas le cas, choisir un journal plus bas de gamme et renouveler l’opération.
Il ne restera plus qu’à finaliser le plat.
Pour ce faire, mélanger escargots, ail, persil, beurre, puis saler, enfin emballer le tout dans le journal.
Enfourner ensuite au micro-onde durant 30 secondes (ne pas oublier que les escargots sont déjà chauds…).
On servira comme une papillote
N.B. : Certains ajoutent un trait de pastis. Pour ma part, je préfère le boire.


Merci, Chef Chaud-Rond pour cette recette bien dans l’air du temps qui confronte moelleux et croustillant.


 

Œufs à la coque déstructurés

Ingrédients :

2 œufs
1 gressin
20g de beurre

Ustensiles :

1 marteau
1 planche
1 assiette
1 cuit-vapeur
1 cuillère

Processus :

Placer les œufs sur la planche, les frapper d’un coup de marteau. Il faut que la coquille soit bien en miettes.
Faire glisser sur une assiette. La mettre dans un cuit-vapeur, laisser 1 minute et 30 secondes. Sortir et assaisonner.
Pour réaliser la mouillette, poser le gressin sur la planche et le réduire en poudre, toujours à l’aide du marteau, en laissant cependant quelques éclats. Agglomérer avec le beurre. Façonner une quenelle. L'allonger sur le creux de la cuillère.
Pour le service, on déposera l’assiette sur la table avec la cuillère à son côté.
N.B. : Certains ne passent pas par l’étape de la planche et écrasent directement les oeufs sur l’assiette. Pour ma part, je ne vois pas l’intérêt d’une porcelaine déstructurée.


Merci, Chef Chaud-Rond, pour cette revisite toute en simplicité qui ne peut que ravir à la fois la ménagère et le gastronome.

 

Les vraies pâtes à la carbonara

Ingrédients :

500 g de spaghetti
750 g de gros sel
2 blancs d’œufs
5 cl de vodka.

Ustensiles :

1 plat en inox
1 batteur

1 toile siliconée
1 rouleau à pâtisserie.
1 boîte d’allumettes
1 emporte-pièce de 1 cm de diamètre
1 hâtelet

Processus :

Casser les spaghetti en tronçons de 2 à 4 cm.
Les entasser sous forme de meule au centre du plat en inox.
Dans la cuve du batteur, monter les blancs en une neige peu compacte. Remplacer le fouet par la feuille, et incorporer à petite vitesse le gros sel afin d’obtenir une pâte de consistance molle, mais avec cependant de la tenue. Former une boule que l’on aplatira sous forme de disque au rouleau sur la toile. Ce disque devra être capable de recouvrir entièrement la meule de spaghetti.
Arroser cette meule de vodka. Enflammer et recouvrir rapidement du disque de pâte de sel. Percer une cheminée au sommet à l’aide de l’emporte-pièce. Avec le hâtelet, percer des trous sur le côté et vers la base. Une combustion lente devrait se poursuivre, dont un subtil dégagement de fumée sera le témoin. En cas d’emballement luter quelques trous avec le reste de pâte non utilisé.
La parfaite cuisson sera acquise quand, en agitant légèrement le plat, on pourra entendre un discret son cristallin. On bouchera alors tous les trous d’aération et observera un délai de refroidissement de 30 minutes environ.
N.B. : Certains conservent à portée de main un verre de vodka sous le prétexte de pouvoir ranimer la flamme en cas de besoin, mais je sais où en général  finit cet alcool, Aussi, pour ma part, je déconseillerai cette procédure.


Merci, Chef Chaud-Rond, pour cette mise au point bien éloignée des querelles franco-françaises sur la présence de crème : ce retour aux sources authentiques des pâtes façon charbonnier nous enchante par ses parfums de sous-bois cisalpins.


 

Les makis à l’alsacienne

Ingrédients :

2 saucisses de Strasbourg
1 baguette de pain bien ronde
1 pot de sauce wasabi

1 salade (laitue de préférence)

Ustensiles :

1 aiguille à brider
1 poche à douille
1 casserole d’eau bouillante salée
1 planche
1 couteau-scie

Processus :

Couper une extrémité de la baguette.
En s’aidant de l’aiguille à brider, enlever assez de mie pour que les saucisses puissent y trouver leur place.
Injecter avec la poche à douille la sauce wasabi.
(Remarque : la sauce wasabi peut être remplacée -mais non avantageusement…- par de la sauce raifort, la sauce raifort par de la moutarde d’Alsace, la moutarde d’Alsace par de la moutarde de Dijon, la moutarde de Dijon par de la mayonnaise, la mayonnaise par du ketchup, le ketchup par de l’échalote hachée, et si vous n’avez rien de tout ça, je ne peux plus rien pour vous.)
Blanchir un nombre suffisant de feuilles de salade par une immersion de quelques secondes dans l’eau bouillante salée afin de les assouplir tout en conservant la couleur verte (fixation de la chlorophylle, etc, etc…)
Cuire les saucisses selon les instructions du charcutier, les insérer dans la baguette. Etendre la baguette enrobée des feuilles de salade sur la planche. Tronçonner en utilisant le couteau scie.
Placer verticalement les makis ainsi obtenus sur l’assiette.
N.B. : Certains remplacent les feuilles de salade  par des feuilles d’algue nori. Pour ma part, je considère que c’est de la triche.


Merci, Chef Chaud-Rond, pour avoir bien voulu nous communiquer cette recette qui transforme ce qui pourrait n'être qu’un ringard hot-dog en un plat bien actuel. Je ne regretterai que l’absence d’une graine (sésame, pavot ?) pour donner un peu de croquant.