mercredi 31 janvier 2018

Une bonne tomelette

ll me restait un morceau de tome fraiche  (enfin plus tellement…) de l’Aubrac ayant échappé à la réalisation de mon aligot une dizaine de jours auparavant.
Comment l’utiliser ? Une truffade, oui, bien sûr, mais j’avais envie de sortir du registre de la bougnatitude

Alors j’ai improvisé un plat que j’ai baptisé tomelette

Je commence par faire sauter dans du beurre cinq  pommes de terre samba du jardin découpées en cubes d’environ 1 cm de côté.  Quand elles commencent à colorer, j’y ajoute deux tranches de ventrèche au poivre du Sud-Ouest tranchées en lardons. Puis quand  elles sont bien dorées, je réserve.
Je m’empare d’une poêle de 30 cm, y verse un trait d’huile d’olive, la pose sur le feu et y fait  fondre une noix de beurre. Je la berce afin que le fond, mais aussi le bord soient bien enduits de ce gras, j’éteins la flamme et je laisse refroidir.
Je me livre à une fission de la tome en petits parallélépipèdes d’environ 2 x 3x 0,5 cm.
J’allume le four et le règle à 160°C.
Quand il est à température, je bats 6 œufs avec une bonne pincée de fleur de sel et force poivre noir sorti du moulin. Quand ils commencent tout juste de devenir mousseux, je les verse dans la poêle froide, verse le mélange de pommes de terre sautées et de lardons en les répartissant sur toute la surface. Je dispose enfin les morceaux de tome que je viens d’assaisonner çà et là, et j’enfourne.

Une dizaine de minutes plus tard, je regarde le résultat. La surface me semble restée un peu trop liquide, cependant je ne voudrais pas dessécher l’ensemble et surcuire le fond . Aussi je remets au four pour deux minutes, mais en allumant le grill.
Bon, ça me semble désormais convenable comme cuisson… Je  donne un tour de moulin de poivre,  badigeonne d’une noix de beurre piquée dans une fourchette et parsème d’un peu de ciboulette hachée.

tome, Aubrac, oeufs, ventrèche
Tomelette

Le scepticisme de mon épouse vis-à-vis de ma procédure a réussi à m’influencer, aussi je préfère photographier dans la poêle pour garder une trace de mon œuvre avant qu’elle ne se désagrège dans une tentative de décoffrage désespérée.
Ce serait dommage… Mais au moins le goût pourrait-il sans doute être quand même présent.
Des effluves le laisse présumer. Rapprochons notre nez pour renifler !

tome fraîcche, omelette, pomme de terre, lardons
Appétissant, à vue de nez !

Hum, ça sent rudement bon !
Maintenant, il faut que je me lance. Je penche la poêle au-dessus d’un plat et donne un petit coup sec  Rien ne bouge. Un peu plus fort..
Et voilà  que la tomelette part comme un bolide, manque de peu de s’étaler en dehors du plat qui n’est pas assez large pour elle. Je parviens à la replier par une bonne claque au  cours de la descente et miraculeusement elle s’adapte à la surface du plat en me permettant d’apercevoir simultanément le dessous cuit juste à point et le dessus gourmand. Une onctueuse et  prometteuse tome fondue s’échappe. J’en ai l’eau à la bouche…

tomelette, tomme de l'Aubrac
Sur le plat....

À la dégustation, l’œuf se comporte en omelette mousseuse et pas sèche le moins du monde. Passer des pommes sautées à la ventrèche est un bonheur simple. Simple comme un coup de fil (de fromage fondu).

lundi 29 janvier 2018

Cuisine bourgeoise ...gentilhomme


Afin d’obtenir le titre de Grand Papamouchi, je me suis livré à une Turquerie.


Pour commencer, Shish kofte.
Une recette rencontrée sur l’intéressant blog publié par le canadien Frédéric Bisson :
Recette de base
https://recettedebase.com/2014/04/05/kofte/

Avant de me consacrer à la réalisation de ce plat, je fais cuire le boulgour qui va l’accompagner.  Je réserve dans un petit saladier en verre.


Et zou, opération shish kofte !!!

Je commence par préparer deux sauces, l’une à la tomate, l’autre au yaourt.
Pour la première, j’ajoute un bon trait d’huile d’olive (une huile d’olive portugaise familiale au haut goût) à du coulis de tomate extrait d’une brique et assaisonne de fleur de sel et de quelques tours de moulin de poivre rouge.
Pour la seconde, je brasse un vrai yaourt grec Total avec deux gousses d'ail écrasées avec l'ustensile adequat et ajoute une pincée de sel.
Je réserve ces deux sauces versées dans des ramequins en terre.

sauce yaourt
Les deux sauces
Puis je pile dans mon mortier en granit sur un lit de gros sel : ail, graines de cumin, thym, persil, poivre noir de Kampot, piment d’Espelette.

Dans une bassine je mélange 500g de veau haché, 500g de bœuf haché, un oignon râpé, de la mie extraite d’un reste de pain sec trempée puis essorée, un œuf, le contenu du mortier.
Une fois bien pétri à la main, je façonne des boulettes d‘environ 5cm de diamètre que j’enfile sur des piques en bois.  Je les allonge et les aplatis en tapant de la paume de la main afin de bien les compacter pour éviter tout accident au cours des manipulations de cuisson.

brochettes sish kofte
Comme à la parade
Je  commence alors la chauffe de la plaque striée sur laquelle elles vont cuire.
Pendant ce temps je fais fondre une grosse noix de beurre  parfumée d’une pointe de piment de Cayenne et je réserve.

Ça y est,  la plaque est bien chaude,  je peux  y poser mes brochettes après l’avoir badigeonnée d’huile d’olive à l’aide d’un pinceau en silicone.

shish kofte
Ah, les belles brochettes !
Je profite de ces instants où mes morceaux de viande dorent sur une face, puis l’autre, pour passer la sauce tomate au micro-onde durant une minute, ainsi que le boulgour pendant trois minutes.
Tout est prêt : j’apporte sur la table les brochettes posées sur un plat et arrosées de beurre fondu, le saladier de boulgour et les deux sauces.
Il ne me faut pas oublier les pains pitas que j'ai  réchauffés  par un passage de deux minutes au micro-onde.

pitas
La pita vient en mangeant
Chacun se confectionne son assiette en puisant dans les ressources proposées.
Quant à moi, je dresse mon assiette témoin…

shish kofte, boulgour, sauce yaourt
Assiette témoin




Pour suivre, le dessert, des cornes de gazelles réalisées la veille .
Les proportions des constituants de la pâte et de la farce sont celles données par Bernard Laurance dans son blog :
La Cuisine de Bernard
http://www.lacuisinedebernard.com/2011/07/les-cornes-de-gazelles.html
J’ai choisi cette source, car les recettes données par ce bien connu blogueur sont en général très fiables.

Ce fut bien le cas.
La pâte d’enrobage, une sorte de pâte brisée sous-beurrée (200 g de beurre pour 500 g de farine) et hydratée avec de l’eau de fleur d’oranger s’est révélée  à la fois très maniable et très résistante. La farce constituée de 750g de poudre d'amandes, 200g de sucre, 2 cuillerées à café de vanille liquide, 2 cuillerées à café de cannelle en poudre, le tout pétri avec de l’eau de fleur d'oranger, n’était pas trop sucrée. Une petite valeur ajoutée maison fut le caractère légèrement feuilleté apporté par un tour donné à la pâte avant qu’elle ne soit étalée une seconde fois.

Ces deux éléments confectionnés, il y eut un façonnage peaufiné par une découpe à la roulette.

cornes de gazelles
Hou, les cornes !

Puis se déroula  la cuisson des cinquante pièces obtenues sur deux étages au four à 185°C une vingtaine de minutes, suivie par le saupoudrage de sucre glace puis de cannelle.

cornes de gazelles
De la poudre aux yeux

De quoi abondamment garnir un plat que je fais trôner au milieu de la table.

cornes de gazelles
De quoi en faire tout un plat..

Ces cornes sont vraiment savoureuses….

corne de gazelle
Encore une assiette témoin


Autant dire que mon élévation au titre de Grand Papamouchi ne rencontre aucune opposition, et surtout pas chez les petites Fifimouchettes

dimanche 28 janvier 2018

Dénouons l'aiguillette !

La mélancolie enlève l'appétit, le goût, noue les aiguillettes. -Jean Giono -Le hussard sur le toit

Entre les nœuds savamment élaborés par le boucher, une aiguillette.
Sanguinolente aiguillette de bœuf, toute emmitouflée dans sa barde, que je m’apprête à rôtir...
Je l’enfourne à 200°C pour environ un quart d’heure. Elle est assaisonnée et voisine avec une feuille de laurier, une branche de thym et deux petites échalotes tranchées barbotant dans une noix de beurre et un trait d’huile d’olive.
Au même moment des champignons de Paris découpés en quartiers finissent de dorer,  j’allonge sur le bord de leur poêle un petit oignon blanc muni de son feuillage tranché en deux dans le sens de la longueur. Trois minutes plus tard, je peux arrêter la cuisson et réserver. Dans une seconde poêle des carottes du jardin, passées à la mandoline, se font glacer avec un panais issu du même lieu coupé en deux. Ces racines accompagnées d’une bonne noix de beurre ont été recouvertes d’eau à effleurement et saupoudrées d’une pincée de sel et d'une cuillerée à café de sucre.
Il ne reste presque plus de liquide quand le timer sonne. J’enlève la poêle du feu et sors le rôti. Je me transforme aussitôt en agile dénoueur d’aiguillette doublé d’un débardeur… Puis je laisse reposer la viande le temps d’achever le glaçage des légumes et remettre les champignons à température.
Quand une couche luisante habille carottes et panais j’éteins la flamme. Je me saisis de mon couteau et partage l’aiguillette en tranches d’environ un centimètre d’épaisseur.
Je les répartis sur les assiettes, dépose à leur côté les rondelles de carotte sur lesquelles je fais se dresser un arrogant panais, ajoute les champignons. L’échalote caramélisée vient se blottir sur le rôti, et l’oignon sinue nonchalamment entre carottes et champignons pour rejoindre l’aiguillette.

aiguillette, boeuf, carotte, panais, champignon de Paris, oignon blanc
Aiguillette dénouée

Et c’est ainsi que j’ai dénoué l’aiguillette.

vendredi 26 janvier 2018

Grenadins façon Chaminadour

Nana, au pouvoir mésestimé, puisque capable de transformer une mégère avec un gredin en une ménagère avec un grenadin
Telle était ma réflexion en déballant deux soyeuses tranches de veau timidement rosées.
Associant ainsi viande et époux terribles, je n’ai pu que penser à Marcel Jouhandeau.


Ce qui m’a conduit vers cette fascinante vidéo à la fin de laquelle s’exprime ce fils de boucher :





Mais ces digressions n’ont pas empêché mes grenadins de passer à la casserole - ou plutôt à la poêle.

Il m’a fallu en premier lieu mettre à tremper des morilles séchées ardéchoises dans un peu d’eau tiède.
Une heure plus tard, j’assaisonne les grenadins et les saisie rapidement sur les deux faces  - avec seulement quelques gouttes d’huile et une petite noisette de beurre - dans une poêle en cuivre doublé d’inox choisie afin d’accrocher suffisamment pour pouvoir créer un jus et n’être pas vulnérable au déglaçage acide comme un ustensile culotté. Puis je les sors et les réserve.
Je rajoute une nouvelle noisette de beurre dans laquelle je fais suer à feu doux une échalote finement hachée. Je hausse la flamme et déglace avec un demi-verre de vin blanc ( en l’occurrence un gros-plant du  Pays Nantais ) et l’eau de trempage des morilles. Une fois le liquide presque entièrement évaporé, je verse dans la poêle une vingtaine de centilitres de crème fraîche épaisse d’Isigny et poursuis la réduction à feu moyen. Quand la crème a commencé à prendre encore plis de consistance j’y plonge les grenadins afin qu’ils y terminent leur cuisson, ainsi que les morilles. Trois ou quatre minutes plus tard, la sauce est de venue bien nappante et la viande devrait être à point, encore légèrement rosée à cœur. Je n’oublie pas de relever d’un bon tour de moulin de poivre noir et d’un soupçon de noix de muscade râpée.
Parallèlement j’avais fait cuire des spätzle  dans une grande casserole d’eau salée en ébullition durant le quart d’heure préconisé par le producteur alsacien. Elles attendaient égouttées, je les remets à température au sein d’une grosse noix de beurre fondue.

Le dressage est on ne peut plus simple : les pâtes parsemées de persil ciselé, flanquées du grenadin arrosé de sa sauce onctueuse et jonché de quelques morilles.

grenadin, veau, crème, morilles spaetzle
Grenadin pas gredin


Bien qu’a priori je regrettais de ne pas avoir eu une bouteille de riesling sous la main, il me faut reconnaître que le gros-plant a apporté une petite touche d’acidité bienvenue à la sauce parfumée par les sucs de la viande et les champignons.
Quant au grenadin, d’une tendreté bienveillante, il fond dans la bouche.

Il y a quand même des unions qui fonctionnent bien...

mercredi 24 janvier 2018

Cocktail pour ton thon

Il me restait une demi-tranche de thon grillé froide.
Aussi je me demandais : « Mais que vas-tu faire de ton thon ? » ( il m’arrive de me tutoyer dans l’intimité… ). La réponse me sauta soudain à l’esprit comme une évidence : j’allai le servir enrobé d’une sauce cocktail.

Je monte donc une mayonnaise dans un bol avec un jaune d’œuf, une cuillerée de moutarde, deux tiers d’huile d’arachide et un tiers d’huile d’olive. Une fois celle-ci bien ferme, j’ajoute trois bonnes cuillerées de ketchup, un trait de sauce Worcestershire, un trait (ou plutôt deux traits...) de whisky, une douzaine de gouttes de tabasco, une bonne pincée de paprika, un tour de moulin de poivre rouge et le jus d’un quart de citron.
La sauce cocktail est prête, je n’ai plus qu’à la verser sur le thon débarrassé de sa peau et découpé en  petits rectangles, puis de parsemer le plat de ciboulette ciselée. J’accompagne simplement d’une salade de concombre parfumée de menthe hachée.

thon, sauce cocktail
Beau thon en tenue de cocktail

Un repas plaisant n’ayant pas demandé beaucoup de travail…

lundi 22 janvier 2018

L'amour des trois agrumes

Comme les trois mousquetaires étaient quatre, les trois agrumes étaient cinq : deux Bigarade, deux Bergamote et le petit Lime.

bergamote, bigarade, lime, agrumes, canard
Réunion préparatoire d'agrumes pressés

Ils croisèrent en chemin trois vilains canards qui leur dirent :
« Tirez nos bobinettes, et nos aiguillettes cherront ! »
Sitôt dit, sitôt fait. Les cinq agrumes voulurent se marier avec les aiguillettes, sauf qu’elles étaient six.
La laissée-pour-compte pleura et gémit : « Je préférerais être pas née »
Un vieux sorcier un peu sourd qui passait par là voulut exaucer son vœu.
Sitôt dit, sitôt fait. L’aiguillette était panée.
Tous les agrumes s’exclamèrent : « Que tu es belle ! »
Les autres aiguillettes, jalouses, interpelèrent le sorcier : « Mais nous aussi nous voulons être vêtues d’or ! »
Sitôt dit, sitôt fait. Le problème du cinq à six n’était pas pour autant résolu…
Jusqu’à ce que Lime le Petit, tel un Alexandre le Grand tranchant le nœud gordien, décréta vertement : « Tous pour une, une pour tous ! »
Sitôt dit, sitôt fait. Le mariage fut conclu avec comme témoins une Endive qui pour une fois ne s’était pas fait porter pâle et un Céleri complétement rond.
Le sorcier était à la noce. Il y perdit sa baguette…



Même pas vrai ! Il y en a qui écrivent n’importe quoi sur ce blog !
On veut une recette.
Une recette, une recette, une recette… !!!

CROUSTILLANT D'AIGUILLETTES DE CANARD AUX TROIS AGRUMES


canard, aiguillettes, agrumes, bergamote, bigarade, lime, celeri, endive, penko
C'est lui!



Ingrédients pour 2 personnes :

6 aiguillettes de canard fermier des Landes, Label Rouge
2 bigarades bio
3 bergamotes bio
1 citron lime bio

1 petit céleri-rave du jardin
1 endive du marchand de primeurs
3 c. à s. de farine
2 blancs d’œufs
50 g de panko
3 c. à s. de graisse d’oie
1 noix de beurre demi-sel
2 noisettes de beurre doux

1 c. à c. de fond de veau
1 pincée de piment d’Espelette
1 pincée de paprika
1 pincée de curry
1 feuille de laurier
1 branche de thym

1 tranche de citron jaune
2 brins de ciboulette
2 c. à c. de cassonade
4cl de whisky Jura Diurachs’ Own
poivre rouge du moulin
sel


Les agrumes
Prélever le zeste des agrumes à l’aide d’une Microplane. Réserver.
Découper deux fines tranches dans une bergamote, en ôter les pépins, puis enfourner à 80°C durant 45 minutes entre deux feuilles de papier siliconé avec une plaque pesant sur ce sandwich.
Extraire les suprêmes d’une des bergamotes. Réserver
Presser les bigarades et les bergamotes ainsi qu’une moitié du lime afin d’en obtenir le jus. Réserver.

L’endive
Après l’avoir dépouillée de ses moins belles feuilles extérieures, la fendre en deux et la poser au fond d’une petite casserole avec une noisette de beurre doux, une cuillerée à café de cassonade et une pincée de sel. Ajouter de l’eau sur ½ cm et quelques gouttes de jus de citron. Laisser évaporer à feu doux en retournant de temps à autre jusqu’à début de caramélisation. Réserver.

Le céleri
Il s’agit d’une boule de céleri de petite taille. L’éplucher sur toute sa surface, la frotter de la tranche de citron jaune, l’emballer entière en compagnie d’une feuille de laurier et d’une branche de thym dans une papillote réalisée avec une feuille de papier d’aluminium siliconé, et enfourner pour une demi-heure à 160°C.
La sortir de la papillote et la faire rouler dans une casserole afin de l’enrober de la noix de beurre demi-sel fondue parfumée d’une pincée de curry. Réserver.

La sauce
Verser le jus des agrumes dans une petite casserole. Y ajouter les zestes, une cuillerée à café de cassonade, une pincée de piment d’Espelette pour relever et une pincée de paprika pour colorer. Faire réduire du tiers à feu doux, puis transférer en passant au chinois dans une autre petite casserole.  Compléter d’une cuillerée à café de fond de veau. Dissoudre une demi-cuillérée à café de fécule dans le fond d’un verre d’eau. Ajouter. Arroser de 4 cl de whisky. Poursuivre la réduction jusqu’à obtention d’un liquide sirupeux. Réserver.

Les aiguillettes de canard.
Assaisonner les aiguillettes.
Garnir trois plaques à débarrasser, la première avec la farine, la deuxième avec les blancs d’œufs battus jusqu’à ce qu’ils deviennent mousseux, la troisième avec le panko. Passer chaque aiguillette successivement dans ces récipients afin de la paner. Déposer les aiguillettes bien enrobées sur une poêle dans de la graisse d’oie  très chaude afin de colorer la panure sur toutes les faces sans trop cuire le cœur de la viande. Après un bref aller-retour, sortir et déposer sur du papier absorbant afin de laisser reposer le temps du dressage.

Dressage
Remettre l’endive et le céleri à température, ainsi que la sauce dont on a rectifié l’assaisonnement et que l’on vanne ensuite hors du feu avec une noisette de beurre doux afin de lui donner du brillant.
Trancher la boule de céleri en deux, placer une de ces hémisphères sur chaque assiette à côté de la demi-endive. Disposer les aiguillettes en les faisant se chevaucher, verser la sauce. Passer les deux tranches de bergamote quarante secondes au micro-onde pour achever de les dessécher avant d’en appuyer une au centre de chaque dressage sur les aiguillettes. Répartir les suprêmes de bergamote. Terminer par la touche de verdure géométrique apportée par la ciboulette. 

samedi 20 janvier 2018

Avec le thon...

Une large  tranche de thon rouge a débarqué à la maison.

Pour bien l’accueillir, j’ai peaufiné une recette de riz épicé à la crème de coco.

J’ai commencé par introduire au creux de mon mortier en granit :

4 c. à c. de zestes de yuzu séchés
2 c. à c. de poivre de Voatsiperifery
2 c. à c. de poivre blanc de Penja
2 c. à c. de graines de coriandre
1 c. à c. de graines de cumin
1 c. à c. de curcuma en poudre
5  grains de piment de la Jamaïque
1 clou de girofle
1 pincée de gros sel


J’ai bien  écrasé ce mélange avec le pilon, puis je suis allé cueillir
un piment végétarien rouge et un autre encore vert.
Je les ai ajouté ainsi qu’un trait d’huile d’olive, et en écrasant bien au pilon j’ai obtenu une purée très parfumée que j’ai réservée.
J’ai barbouillé le fond d’une casserole d’un trait d’huile d’olive, et j’y ai fait suer les rondelles d’un oignon paille du jardin. Pendant ce temps, non loin, infusait un sachet de bouillon de crustacés dans deux verres d’eau que j’avais portés à ébullition.
J’ai fait nacrer un verre de riz long grain traditionnel, j’ai ajouté ma pommade épicée, brassé et arrosé du bouillon. J’ai étendu un disque découpé dans du papier siliconé, coiffé la casserole de son couvercle et enfourné pour 18 minutes à 160°C.

J’ai sorti la casserole du four. Quand j’ai enlevé le couvercle et retiré la feuille de papier, tout le liquide était absorbé et j’ai découvert un riz aux grains bien séparés et légèrement al dente. J’ai versé sur lui le contenu d’une brique de 20 cl de crème de coco. Après mélange, la couleur m’a paru un peu tristounette, alors j’ai ravivé par une grosse pincée de curcuma. J’ai remis pour cinq minutes  à feu doux après avoir  replacé le couvercle.

Ce temps me suffisait pour cuire sur le gril la tranche de thon que j’avais parée en la débarrassant de ses arêtes, obtenant quatre morceaux bien nets que j’ai simplement assaisonnés et badigeonnés d’huile d’olive.

Il ne me restait plus qu’à dresser les deux assiettes.
En ce qui concerne le thon, la tranche était si large que j’ai réservé les deux petits morceaux  pour un usage future (peut-être à froid en salade ?). Donc, pour chaque assiette, j’ai partagé un des gros morceaux en deux secteurs que j’ai posés l’un chevauchant l’autre. Je me suis ensuite saisi d’un rectangle qui m’a servi à déposer un parallélépipède de riz aux épices et à la crème de coco. Il embaumait à tel point que j’ai observé le passage d’un avion renifleur d’une épouse renifleuse attirée par les effluves. Transformée illico en conjointe baveuse s’inquiétant du moment où l’on allait passer à table...
« Dans une minute, il ne me reste plus qu’à poser les gousses d’ail noir de Corée, balancer un petit parterre de poudre de piment d’Espelette clairsemé et faire pleuvoir quelques gouttes d’huile d’olive herbacée sur le champ sur le thon, et voilà, c’est fini ! »

thon rouge, riz, épice, crème de coco
...enfin pas tout à fait, et de photographier 

« Ça va encore être froid ! »

jeudi 18 janvier 2018

Pas de Concarneau

Je venais juste de déposer les deux œufs dans la poêle quand on sonna à la porte.  C’était Arnaud.
Je m’excusais.
« Attends une seconde. Je m’occupe d’œufs.
- De qui ?
- Mais non, une paire d’œufs…
- J’sais bien qu’une paire ça fait deux.
- Ils se sont cassés…
- Où ça ? Remarque, c’est normal, tu n’es pas très aimable.
- Possible, je cuisine dans l’improvisation. Ils ont été accidentés au retour du marché…
- Et toi tu n’as rien eu ?
- Si, un pied écrasé par le caddie d’une grosse mémère emperlousée. Et toi, pousse-toi une seconde que j‘ouvre la boîte de corail d’oursin. Tu veux goûter ? C’est de la langue espagnole.
- Si c’est écrit en espagnol, comment sais-tu que c’est bien de l’oursin ? Je préfère ne pas essayer. »

Pendant que nous discutions, je dépose les œufs sur une assiette, ajoute le corail, saupoudre de piment d’Espelette et d’algue nori en flocons.

corail d'oursin, algue lori
Pontes de poules et d'oursins

Arnaud est intrigué. 
« Qu’est-ce-que c’est que cette poudre verte ?
- C’est de l’algue rouge.
- Farceur ! »
Je déguste mon plat. Son parfum d’embruns me fait me pâmer. Je hume et pousse un soupir.
« La mer dans mon assiette !
- C’était prévu ! J’ai bien fait de refuser. Pouah, de l’amer… Je déteste ça.
- Mais non, la mer, tu sais, la mer avec des oursins, des algues...
- Bestioles ou pas bestioles, de toute façon je n’aime pas l’amer ! »

Pendant que je mange, Arnaud s’arrête devant une photo de mon plat de la veille qu’un aimant retient sur la façade du frigo.

coquilles saint-jacques, safran
La ronde des noix (et encore du corail...)

« Ah, il est beau ce vitrail de Saint-Jacques de Compostelle… Magnifique rosace !
- Mais non, saint-jacques et pas Saint-Jacques !
- Saint-Jacques, c’est bien ce que je dis… Tu as fait le pèlerinage ?
- Ben là, juste un rapide aller-retour. Avec du safran et du beurre.
- Ils ont du bon safran en Espagne. Tu as bien fait d’en rapporter. Mais pour le beurre, je ne comprends pas…»
Je renonce a priori à lui expliquer. Puisqu’il veut du pèlerinage, donnons en lui ! Surtout qu’il ajoute : « J’aimerais bien faire comme toi. Raconte moi des souvenirs de ce voyage…. »
J’obtempère.
« Eh bien, un de mes meilleurs, c’est quand j’ai fait étape à Conques, Arnaud…
- Concarneau ! Tu n’as pas pris l’itinéraire le plus court !
- Mais non, le village où un trésor est gardé par l’abbé de Conques, Arnaud !
- La baie de Concarneau, c’est bien ce que je disais. Je suppose que tu t’es gavé de sardines et de crêpes...
- Hum, ce n’est pas vraiment la spécialité locale dans le Massif...
- Armoricain. Tu vois que je connais ma géographie !
- Oui, je vois. Mais c’est d’aligot dont je me suis régalé.

saucisse, aligot, Laguiole
Opération de musculation
Avec une saucisse, délicieuse charcuterie d’un bon porc local..
- Celui de Concarneau, je parie.
- Mais non. Le porc du Rouergue.
- Connais pas ce port ! »

Je préfère ne pas relever. Mes souvenirs gastronomiques remontent à la surface.
« Ah, ces saucisses cuites dans un verre de vin blanc avec des champignons de Paris et de l’échalote ciselée,  puis parsemées d’une gousse d’ail hachée finement qui offraient une touche d’acidité s’alliant avec bonheur avec l’aligot filant…
- Filant vers Compostelle ? Ah, ah… Ils n'avaient pas tort, car tu avais encore pas mal de chemin à faire ! Remarque, à ta place, finalement je me serais arrêté là,  j’aime beaucoup ce port breton où j’ai jadis passé des vacances. Et puis la Bretagne, ce n’est pas aussi pluvieux qu’on le dit. Je me souviens : il n’y a pas plu, Concarneau ! »

Il ne croit pas si bien dire, Arnaud…

lundi 15 janvier 2018

À la queue leu leu

Accompagné du Sieur Ysengrin, je regardais les agneaux paissant dans un pré et se désaltérant dans le courant d'une onde pure. Les croquer était une bonne affaire.
Je susurrais au méchant leu :
« Frère, il faut aujourd'hui que tu fasses un coup de maître, tire moi un agneau. Si Dieu m'avait fait naître propre à tirer agneau du pré, certes agneaux verraient beau jeu. »
Aussitôt fait que dit : Ysengrin exécute le process qu’on lui a enseigné durant un stage des leus à Clairefontaine.
« Qui te rend si hardi de troubler mon breuvage ? Tu seras châtié de ta témérité ! »
« Mais… Mais… » ne sut que répondre l’innocent, à qui Ysengrin répliqua :
« Sache que je suis le saigneur des agneaux, et, tout comme le seigneur de jadis avait droit de cuissage sur ses manants, j’ai doit de gigotage et d’épaulage sur toi et tes frères ! »
Sur ce, Ysengrin s’empara du pauvre agnelet, le saigna et le découpa promptement.
À ce moment je me mis à crier au loup.
« Au loup, au loup ! »
Humant le traquenard, le leu ne demanda pas son reste, il déguerpit derechef, abandonnant sa proie. Je m’éloignai lentement, une épaule dodue sous le bras.
Certes la raison du plus fort est toujours la meilleure,  mais Ysengrin n'était pas content, ce dit-on, d’avoir appris à ses dépens que ruse fait plus que force ni rage.


Et c’est ainsi qu’une épaule d’agneau entre dans ma cuisine.

Elle va se faire dorer dans le sautoir avec herbes, carotte, piment végétarien, oignon, ail et un os .

épaule, agneau
L'épaule dore
Puis, saupoudrée de sel fin, elle est enfournée une vingtaine de minutes  à 180°, toujours dans la cocotte non coiffée de son couvercle. Je la retourne à mi-cuisson.
Une fois sortie, elle va reposer drapée d’un papier d’aluminium sur la planche de découpe en bois  pendant que je déglace le sautoir de deux verres d’eau et le jus d’un demi-citron.
Le jus obtenu et réduit se voit versé dans une petite casserole à travers un chinois. J’ajoute un bon trait de sauce Worcestershire. Je finis hors du feu en vannant avec une noix de beurre et en apportant plusieurs tours de moulin de poivre rouge. Je vivifie par quelques gouttes de jus de citron, et je transvase dans une saucière chaude qui voisinera les tranches découpées de l’épaule d’agneau.

épaule, agneau, jus
Sauce


Mais quid du légume accompagnateur ?
Eh bien j’ai prévu une flamiche aux poireaux qui a été enfournée avant que ce soit le tour de la viande. Un appareil constitué d’un bon verre de crème liquide, de deux cuillerées à soupe de crème épaisse, de six œufs entiers, d'une bonne cuillerée de farine de maïs et assaisonné de sel, poivre noir et noix de muscade avait été mélangé avec la découpe dans leur partie tendre de quatre poireaux de taille moyenne. J’ai versé dans un moule à tarte sur une pâte brisée (250g de farine, 125g de beurre) et mis à cuire pour environ 36 minutes. Cette flamiche avait été réservée, elle revient dans le four éteint mais encore chaud pendant la réalisation de la sauce de l’épaule afin d’être remise à température.

flamiche
La flamiche
À la dégustation, le poireau s’est révélé découpé un peu trop finement. Tout ça à cause d’un couteau japonais que l’on venait de m’offrir : un pousse au crime tellement il est jouissif de sentir la lame s’insérer sans effort !

flamiche
La tranche


Mais encore auparavant j’ai effectué ma BA ! J’ai assisté une désespérée  dans le sauvetage d’un gâteau en piteux état par ma faute. En effet j’avais fait transparaître mon impatience de récupérer mon espace culinaire, ce qui avait entraîné un démoulage prématuré : les bords s’étaient désolidarisés d’une pâte pas encore assez raffermie.
Ni une ni deux, je suis arrivé avec mon cercle, ai découpé suivant son contour, et ainsi nous nous sommes trouvés avec un produit certes de taille plus réduite, mais présentable.

amandin
Délicieux Amandin

Il s’agissait d’un amandin, réalisé d’après une recette extraite du Petit Larousse des desserts.
Ma foi, le résultat était plutôt plaisant car finalement moins sucré que l’on pouvait le craindre.


dimanche 14 janvier 2018

L'onglet tel qu'on le pare

Mais non, soyez plus attentifs !
Il ne s’agit pas de cette pièce :

https://www.youtube.com/watch?v=8HzY-OKVTpM



mais de cette pièce :

onglet, crosnes
Crosnes à l'onglaise

Comme on le voit, je l’ai accompagnée de crosnes.
Je pourrais appeler ce plat : Onglet flanqué de la surprise du chef.

En effet mon réfrigérateur mériterait d'être baptisé Palais de la Découverte.
Je ne me souvenais plus que j’avais des crosnes au logis. Ces derniers, achetés avant Noël, étaient restés cachés plus de trois semaines au fond du bac à légumes. Aussi je m’attendais à les trouver horriblement mous, voire en décomposition. Mais non, ils étaient encore bien fermes, d’une blancheur immaculée. Alors je les ai laissé  tremper une heure dans une eau salée et citronnée, histoire de les revigorer. Après un  passage de cinq minutes dans l’eau bouillante additionnée d’une poignée de gros sel, je les ai fait revenir au sein du beurre de la poêle où j’avais fait cuire l’onglet.

Ainsi la crosnostratigraphie m’a permis de dater ces sains crosnes avec précision sans même avoir recours au Carbone 14.  Néanmoins il conviendrait peut-être de se livrer à quelques analyses chimiques afin de faire basculer du miracle à la Science cette conservation inespérée.

Je suis toujours vivant…

vendredi 12 janvier 2018

Racine et épigramme

Hier comparaissaient à huis clos des membres du gang Hell’s Racines pour ratissage en (plate) bande organisée.

racines, papillote
Mesdames et messieurs, la Cour !


Tous agissaient sous la coupe de leur égérie : Boule d’Or. On pouvait remarquer un fier Panais, droit dans des bottes, un Carotte rubicond, mais aussi un émigré italien, un Chioggia haut en couleur. Dans cette association hétéroclite se rencontraient aussi quelques marteaux qui se prétendaient sans maître ni dieu, un rouge fanatique, sans oublier un nain baptisé Celeri qui essayait de se cacher derrière ses complices. Sous la houlette du président Chaud-Rond le débat fut de qualité en dépit d’une ambiance très chaude (160°C). La défense fut assurée par maître Persil, dont on se rappellera la péroraison virulente « Le frisé me défrise ! », maître Poivre de Timiz, qui démontra qu’il pouvait y avoir de la fumée sans feu, maître Kororima, dont beaucoup de confrères devraient prendre de la graine, maître Laurier certes un peu dur de la feuille mais qui sut divertir son auditoire par une digression sur le Neveu de Rameau, et enfin maître Brin de Thym qui balaya toutes les objections de la partie civile. Partie civile qui était représentée par maître Piment dont l’agressivité fut plutôt modérée.
Une cinquantaine de minutes plus tard, les prévenus ressortaient libres…

Pour la session suivante, c’était le sieur Epigramme d’Agneau qui se trouvait sur le banc des accusés pour diffamation. Là encore le débat fut rondement mené sous l’autorité bienveillante du président Chaud-Rond. Les avocats – à nouveau maître Brin de Thym assisté de maître Gousse d’Ail et maître Espelette- invoquèrent l’erreur manifeste : la diffamation ne saurait provenir que d’une Epigramme, or là il s’agissait d’un Epigramme.
Après être passé seulement quelques minutes sur le grill de la Justice, le prévenu ressortait libre.

Tous se retrouvèrent pout fêter ce résultat autour d’un verre au café du Tribunal.


epigramme, agneau, racines, papillote
La réjouissance


mardi 9 janvier 2018

Destinée

Il ne me reste plus qu’à inventer un destin pour ce reste….

Eh bien ça y-est, le destin a frappé à ma porte et m’a susurré à l’oreille : « La poitrine demi-sel, la saucisse de Morteau sont excellents froids avec quelques frites...».
Une autre voix m’a bien ajouté cette réflexion : « Es-tu bien certain que cet accord respecte les canons de la diététique ? »
Mais je serai inflexible.

Destinée
Inutile de fuir ou de lutter
C'est écrit dans notre destinée
Tu ne pourras pas y échapper
C'est gravé


Ma seule concession sera de ne pas accompagner de mayonnaise, mais de poser un pot de Savora sur la table à côté des charcutailles et des frites.
Condiment qui me rappelle chaque fois que je le porte à ma bouche ce wagon-bar lambrissé aux cuivres bien astiqués dans lequel je grimpais jadis en gare d’Austerlitz au dernier moment, quand le sifflet annonçait le départ du train, pour me percher sur un tabouret et profiter  de la compagnie d’une copieuse assiette anglaise et d’une bière le temps d’arriver en Poitou. C’était à une époque où la SNCF n’avait pas besoin de seriner un dérisoire "À nous de vous faire préférer le train"…

Bref, je m’attaque à la cuisson des pommes de terre frites, des rajas du jardin car les bintjes du commerce achetées à cette fin n’avaient pas fait merveille lors d'une cuisson précédente.
Je change de registre, passant du slow à un  entraînant :

Ah ! Savora, Savora, Savora,
Tous les rajas à la friture,
Ah ! Savora, Savora, Savora,
Tous les rajas on les cuira !


Bientôt nous pouvons passer à table.

frites, poitrinne demi-sel, lard, Morteau, Savora
Restes

Mais nous ne sommes pas deux ogres -même pas moi !- et à nouveau nous ne pouvons finir le lard et la saucisse de Morteau.
Il ne me reste plus qu’à inventer un destin pour ce reste...

dimanche 7 janvier 2018

Ils sont cassés

Le prince n’avait presque pas fermé l'œil de la nuit. Il s’écria :
«  Dieu sait ce qu'il y avait dans ce lit. J'étais couché sur quelque chose de si dur que j'en ai des bleus et des noirs sur tout le corps ! C'est terrible ! »
Il arracha draps et couvertures, retourna toute la literie, quand soudain un petit pois roula sur la descente de lit d’Ikean, un brocart de soie brodé de fleurs d’or, pour finir sur le parquet en point de Hongrie entre deux chaussettes trouées.
Le prince se devait de châtier le coupable. Il ordonna  que l’on alla quérir l’ensemble des pois du royaume, ce qui fut fait, même si un certain Mendel fit un scandale dans son couvent, refusant de se séparer de ses graines au nom de la science, ce qui fit bien rire la maréchaussée.
Quand toute la récolte fut amassée aux pieds du prince, celui-ci manda la troupe et hurla d’une voix rauque :
« Cassez le pois !
   Cassez le pois !
   Cassez le pois ! »
On entendit un grognement. C’était l’animal familier du prince, une sémillante jeune truie au cou grassouillet élégamment cerné d’une fraise d’organdi rose. Cette interruption eut le don d’irriter le prince.
« Que l’on se saisisse de la bête. Elle est bonne pour BTC ! »
Puis il fit ébouillanter les coupables, et, hystérique, il sauta sur eux, trépigna, les écrasa sous ses Dr Martens 1460.
Ce n’était pas la première fois que le prince faisait appel à "Balance Ta Cochonne". En remerciement l’association lui fit parvenir un assortiment de cochonnailles.
Comme de plus le prince était avare, il récupéra les pois, y ajouta la charcuterie et convia sa cour à un banquet.
La purée de pois cassés garnie était née.

Mais doit-on croire cette histoire ? Car j’ai entendu il y a peu une autre version.

Marco Polo, revenant de Chine, avait dans ses bagages un petit sachet de graines des plantes produisant les savoureuses petites sphères vertes qu’il venait de découvrir en cette lointaine contrée. Las, quand il défit le lacet fermant la pochette de soie, il aperçut les dégâts causés par le long périple : les pois étaient cassés !
C’est ainsi que Marco Polo fut l’inventeur des pois cassés.

Bon, chacun choisira la version qu’il préfère.

Quant à moi, je serai pragmatique.
Dans une cocotte en fonte je recouvre d’eau les pois cassés que j'ai rincés en les sortant de leur emballage, les place sur la plaque coup de feu du fourneau avec un oignon clouté, trois gousses d’ail, un morceau de céleri-branche, une carotte coupée en deux, des tranches d’un blanc de poireau, un bouquet garni, des grains de poivre de Voatsiperifery.

pois cassés
Lancer de pois
La cuisson durera une cinquantaine de minutes.
À côté, une petite casserole d’eau chaude afin de compléter si besoin, et une grande casserole dans laquelle cuiront de la poitrine demi-sel et du lard fumé pendant la même durée, puis une saucisse de Morteau durant une demi-heure, enfin une petite saucisse fumée de mon éleveur favori durant vingt minutes. J’immerge en compagnie de toute cette viande une branche de thym, une autre de romarin, du poivre long de Timiz, du poivre blanc de Penja et des baies de genièvre.

Quand les pois cassés sont cuits, j’en extrais la carotte et l’oignon que je réserve, le bouquet garni, l'ail et la branche de céleri qui vont à la poubelle.
Je plonge la girafe équipée de son bras blender et mixe les pois jusqu’à obtenir une purée fine que je trouve un peu trop liquide. J’assaisonne, et deux ou trois minutes à petit bouillon tout en tournant et raclant avec un fouet afin que ça n’attache pas me permettent d’atteindre la texture souhaitée. J’incorpore une grosse noix de beurre et réserve hors du feu.
Je retire la viande, la découpe. Je passe dans le beurre à la poêle trois tranches de poitrine, trois tranches de lard, trois rondelles de Morteau, la petite saucisse fumée partagée en trois. Je sors ces morceaux, les installe dans la cocotte, ajoutant la carotte et deux éclats d’oignon.
J’arrose du jus présent au fond de la poêle et parsème de persil haché.

pois cassés, purée, charcuterie, lard, Mortteau, saucisse
Dans la purée de pois

La cocotte est posée sur la table de la salle à manger avec à ses côtés un plat recouvert du reste de charcuterie pour si jamais un besoin de rab en viande se fait sentir.

Morteau, saucisse, lard, poitrine demi-sel
Bon porc


Mais aucun des trois convives -même pas moi !-  n’est un ogre. Il ne me reste plus qu’à inventer un destin pour ce reste….

samedi 6 janvier 2018

Déçu par ma blonde

«Ah, non, c’est pas possible… Je t’ai déçu ? Snif, snif !!! »

Blonde désolée

Mais non, pas toi, la blonde dont que j'cause, elle est espagnole.

«Oui, on parle de moi ?

Blonde d'Espagne
Comment ça ! Une Miss Monde, te décevoir ! »

Il ne s'agit pas de toi non plus, ô blonde labellisée, ma blonde espagnole, la voici :

Blonde de Galice

Elle m'a déçu...
Pourtant, sacrée par d’aucuns qui sont certainement tout sauf naïfs au rang de Miss Monde du Bovin,  elle m’avait procuré jadis une relative satisfaction.
http://sosgrisbiche.blogspot.fr/2017/07/la-blonde-de-galice.html

Mais cette fois-ci l’entrecôte n’était quasiment pas persillée, et, bien que certifiée maturée plus de 45 jours, manquait de tendreté. Pas de graisse fondante, un bord  caoutchouteux et coriace. Bref, aucun plaisir, en dépit d’un traitement soigné : mise à température ambiante avant de poser sur une poêle pas trop chaude tapissée d’une larme d’huile d’arachide et d’une noisette de beurre fondu, puis introduction d’un gros morceau de beurre afin de nourrir sans cesse de Surgères mousseux.

blonde de Galice, entrecôte
Blonde de poêle
Enfin repos avant la découpe… Que faire de plus ?


Après nous avoir envahis de fruits et légumes immangeables, l’Ibérie va-t-elle désormais nous arnaquer sur la viande ?

mercredi 3 janvier 2018

Où je me prends la tête et où je décire

Paraphrasant Louis XVI notant sur son journal :
-14 juillet 1789, rien
j’écris :
-31 décembre 2017, rien

En effet pour la Saint-Sylvestre j’avais rendu mon tablier, me livrant à la facilité des plats préparés par le traiteur. Tout à fait convenables d’ailleurs et m'évitant ainsi pas seulement le travail, mais aussi la mauvaise conscience.
Je signalerai cependant une découverte : j’ai débouché en guise d’apéritif pour accompagner les petits fours une petite -eh oui, 25cl seulement…- bouteille achetée pour le foie gras mais oubliée à Noël  : un Tokaji Aszu 3 puttonyos 1993.

Tokaji Aszu, puttonyos
Qu'est-ce qu'il fait, qu'est-ce qu'il a, qui c'est celui-là ?
En savoir plus sur https://www.paroles.net/vassiliu-pierre/paroles-qui-c-est-celui-la#tg3XaFf4toFJ566G.99
Qu'est-ce qu'il fait, qu'est-ce qu'il a, qui c'est celui-là ?
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Qu'est-ce qu'il fait, qu'est-ce qu'il a, qui c'est celui-là ?
En savoir plus sur https://www.paroles.net/vassiliu-pierre/paroles-qui-c-est-celui-la#tg3XaFf4toFJ566G.99
Qu'est- ce qu'il fait, qu'est-ce qu'il a, qui c'est ce vin là ?
Une symphonie de parfums, et surtout une teneur en sucre raisonnable équilibrée par une pointe bienvenue d’acidité.
http://tokaj.free.fr/tokay-classification.html


Mais quittons cet émouvant souvenir bacchique…

En farfouillant dans le bac de mon réfrigérateur, je me suis aperçu que la poutargue qui y était rangée s’approchait dangereusement de sa date de péremption. D’où, le lendemain, la recette suivante :
pâtes à la poutargue et aux gambas.
Je décapite par torsion une douzaine de gambas et les dénude en laissant la nageoire caudale.
Les têtes et la carcasse vont au fond d’une poêle bien chaude.J’ajoute un trait d’huile d’olive.

gambas, fond
J'ai perdu la tête..
Puis je déglace de deux verres de vin blanc, un reste d’une bouteille de gros-blanc dévolue à la cuisine. Je réduis jusqu’à obtenir un verre d’un beau jus parfumé et coloré que je vide à travers un chinois dans une petite casserole et que je rehausse d’une gousse d’ail hachée et de plusieurs tours de moulin de poivre rouge de Kâmpôt.
Je mets dans l’eau bouillante salée une douzaine de nids de nuedle fines alsaciennes de chez Thirion que j’en ressortirai un quart d’heure plus tard.
Pendant ce temps je dégage la poutargue de la cire qui la préserve, puis de sa peau. Je la découpe en tranches de 2mm environ.
Je rajoute une nouvelle cuillérée d’huile d’olive au fond de la poêle où les gambas vont subir un bref aller-retour sur le feu. J’éteins, sors les gambas avec une pince pour les transférer dans la casserole de jus placée en réserve.
Les pâtes sont cuites al dente, je les égoutte, les verses dans la poêle déglacée d’une petite louchée d’eau de cuisson où je les brasse avant de les  regrouper en couronne sur le pourtour. Je les parsème des tranches de poutargue. J’ai remis la petite casserole à température. Je dispose les gambas sur les pâtes avant de les arroser du jus parfumé. Au centre (ou presque…) de la poêle je couche des feuilles de plantain corne-de-cerf et de la mâche ramassées deux heures auparavant au jardin.
Je distribue quelques gouttes d’huile d’olive, plus, pour la salade, un soupçon de balsamique blanc.
La présence abondante de poutargue m’a dissuadé de rajouter du sel. En revanche je ne me prive pas de donner quelques nouveaux tours de moulin de poivre rouge.

poutargue, gambas, pâtes
Oh, poutargue... !

La poêle est posée sur la table.
Tout ce que je puis dire, c’est que les gambas n’ont pas perdu la tête pour rien, et que les oeufs de la poutargue ont bien fait de se débarrasser de leur triste cire.