Les thons rouges ont un beau tour de poitrine. Beau et bon :
il s’agit de la grasse ventrèche.
Un morceau de cette partie noble prélevée en Sicile sur un
thon pêché au large des côtes de l'île est arrivé chez moi après un long
voyage (du moins en distance, en ce qui concerne la durée la fraîcheur de la chair
démontre qu’il a fait fissa) emmailloté dans un habit de vide.
Je débarrasse ce kilo de Thunnus thynnus de sa cape de
voyage. Il aspire un bon bol d’air et reprend des couleurs.
Premier mi-thon
Je dépose ma pièce sur une planche et la partage en deux. La
seconde part est remise sous-vide. Pauvre thon ! Il n’a connu que la
liberté provisoire, et maintenant il retourne au frais… Mais, mon vieux, tu ne penses tout de même pas que l’on va pouvoir s’enfiler une livre de thon par personne en un repas !
Je m’occupe de la moitié restée étendue sur la planche :
j’enlève la peau et une partie de l’épaisse couche de graisse. Bref, je
découenne. J’obtiens deux pavés bien épais. Je réserve le temps de préparer les
pickles d’oignon et la salade de puntarelle servis en accompagnement.
Je partage en deux verticalement un oignon prélevé sur une
botte de cipolla rossa di Tropea venant quant à elle de Calabre. Je prélève une
découpe de 5 mm d’épaisseur sur chacune des faces planes et cisèle le reste
en gros éclats Dans une petite casserole je verse un petit verre d’eau, un
autre de vinaigre d’alcool, un demi-verre de balsamique blanc, une petite
cuillerée de sucre, une grosse pincée de sel Je porte à ébullition, éteins le
feu et fait plonger mes découpes d’oignon Je laisse refroidir.
Je chauffe sans excès cinq cuillérées mon huile des
Baux-de-Provence aux profonds parfums d’olives maturées, retire de la flamme et
y écrase les filets extirpés d’une petite boîte de filets d’anchois à l’huile, Là
encore j’attends que ce mélange retourne à température ambiante.
Pendant ce temps je prélève le cœur d’une salade de cette
magnifique variété italienne baptisée puntarelle – que je n’arrive malheureusement
pas à faire pousser dans mon jardin.
Je tranche les plus grosses pousses en deux, me contente de
séparer les autres Je plonge le résultat de mes prélèvements dans l’eau glacée
Je réserve jusqu’à…
…Jusqu’à ce que ce soit l’heure du repas.
Je revêts la poêle qui fera fonction de mini-plancha
improvisée d’un papier siliconé badigeonné au pinceau d’une fine couche d’huile
d’olive. Je la fais chauffer sur un feu moyen avant de déposer les pavés côté
graisse. Puis je fais pivoter afin de snacker rapidement sur trois autres faces,
réservant le cœur de la chair de thon tiède mais pas cuit.
Je passe au dressage. À côté du pavé de ventrèche, les blancs
pickles d’oignon rouge. Je répartis la puntarelle soigneusement essorée et l’arrose
d’un filet de jus de citron (même pas de Sicile, quelle honte ! ) avant de
faire couler mon huile aux anchois. Pour terminer, j’écrase au mortier quelques
grains de poivre de Bahia dont je parsème le thon par-dessus une pincée de
fleur de sel.
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Puntarelle menaçant un pauvre thon |
Fin du premier mi-thon.
Deuxième mi-thon.
Là encore je pare le thon, le découpant cependant en portions plus
petites.
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Le thon retrouvé |
Et ce sont deux oignons qui passent sous la lame de mon couteau…
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Venus de Calabre |
Je lave cinq pommes de terre nouvelles de taille moyenne, mais ne
les épluche pas.
Dans ma cocotte je mets à fondre à feu moyen ma découpe d’oignon sur
une cuillerée d’huile d’olive. J’ajoute la ventrèche dont je fais colorer les morceaux
assaisonnés de sel sur toutes les faces. Puis je verse un verre d'un vieux banyuls
rouge de 2014.
Je dépose les pommes de terre, fait plonger un bouquet garni constitué
de deux feuilles de poireau enserrant thym, marjolaine, sauge et persil. Je
parsème la ventrèche de quelques pincées de piment d’Espelette et de lambeaux du zeste d'un citron jaune. Je complète d’eau
à presque hauteur, relève d’une pincée de gros sel et coiffe la cocotte de son
couvercle. Je laisse bloublouter à petit feu durant une demi-heure, retournant
les pommes de terre à mi-cuisson et en profitant pour introduire une douzaine
de ces énormes olives vertes que sont celles d’appellation
Bella Cerignola. |
Mon thon sur la cocotte |
Je poursuis la cuisson encore cinq minutes sans couvercle afin de réduire la sauce que je vivifie du jus d'un demi citron. Je peux alors puiser dans la cocotte pour dresser les assiettes.
Je fends les pommes de terre à l'aide d'une épaisse spatule en alu afin
d’obtenir une découpe grossière et un début d’écrasement propre à fournir une
surface apte à retenir la sauce.
Une pincée de piment d’Espelette en pluie sur la bordure ajoute sa couleur,
sa force et son parfum.
La feuille de persil n'a fournit que sa couleur. Et c’est aussi
bien, le plat explose déjà de fragrances et de saveurs, alliant la tendreté de
la ventrèche, l’onctuosité de la sauce imbibant les pommes de terre fondantes
et l’al dente des olives.
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Ventrèche de thon rouge en cocotte |
Un régal !
Fin de deuxième mi-thon.