lundi 13 septembre 2021

Le complexe de l'escargot

Tout bon jardinier vous le dira : les escargots fuient les capucines. Pourquoi ? Ma foi, je n'en sais rien. Peut-être le complexe du recroquevillement devant l'épanouissement ?

Il y a toutefois une exception : l’escargot alsacien de l’espèce Fleischschnaka Vulgaris. On peut le vérifier par la photo ci-dessous.

Fleischschnaka , fleurs de capucine
Un escargot tout chaud, trempons le dans l'bouillon. Et bouffons la capucine !

Quant à moi je ne fuis ni les uns, ni les autres, et c’est d’une fourchette gourmande que je m’attaque à ces colimaçons un peu nouilles qui barbotent dans le bouillon et à ces fleurs béates qui s’y épanouissent sous le regard autoritaire d’un persil un brin tordu.


jeudi 9 septembre 2021

Frire aux éclats


Cette fois-ci, les piments basques qui prospèrent dans mon jardin ont été cueillis bien charnus, mais encore verts.

J’ai décidé de les cuisiner façon tapas, frits dans l’huile d’olive.

Je les servirai posés sur des filets de thon germon de Saint Jean de Luz sortis d’un bocal où ils baignent dans de l’huile d’olive de Navarre.


Allez, zou, j’enfile mon tablier (virtuel) !

C’est comme si c’était fait… Enfin presque, car au moment de passer à l’acte, je m’aperçois qu’il ne me reste qu'à peine un petit verre d’huile d’olive au fond de la bouteille dédiée aux cuissons. Et vraiment se payer trois étages aller-retour plus le tortueux escalier en pierre qui virevolte depuis le hall d’entrée jusqu’à la cave où se cachent les réserves, ça ne fait pas partie de mes envies immédiates. 

Fort heureusement, paresse est mère de système D et plan B… Je fais tomber le contenu du bocal dans une passoire à mailles fines, laissant dégouliner l’huile de la conserve dans la poêle à frire pour rejoindre celle de mon fond de bouteille. Je plonge ma jauge : parfait, pour ces piments allongés le niveau devrait suffire pour mon excursion vers le Pays basque.

Je dispose les morceaux de thon blanc égouttés dans mon plat, puis allume la flamme sous la poêle.

J’ai pris soin de bien sécher les piments afin d’éviter tout incident de cuisson. L’huile me semble proche de la bonne température, j’y plonge prudemment la pointe d’un des piments avec la timidité d’une Cannoise testant du bout de son mignon peton bronzé les ressacs de la plage de Knokke-le-Zoute. Le bain frémit, mais ce n’est pas encore ça, néanmoins je laisse mon capsicum téméraire s'aventurer dans la poêle en guise de pionnier. Je hausse la flamme : j’ajouterai les autres quand le bouillonnement autour de mon chargé de test m’en donnera le signal.

Las, je ne verrai pas ce moment arriver : une grosse explosion fait fuir le chat, alerte ma compagne, éclabousse le carrelage, tapisse le mur et la crédence, barbouille les ustensiles suspendus, parsème ma chemise et mon pantalon de taches de tailles diverses, la plus grosse giclée ayant évité de me transformer en eunuque uniquement de par une qualité de tissage étonnante en notre époque de médiocrité généralisée - le tablier que j’ai enfilé n’aurait pas dû être virtuel, il faudra que je réfléchisse à une évolution dans ma tenue.

Une seconde explosion se produit. N’écoutant que mon courage - et surtout craignant l’incendie - je réprime mon instinct de fuite pour venir d’urgence éteindre la flamme sous la poêle.

Mais maintenant, que faire ? J’ai négligé de percer les piments. Serait-ce l’air contenu qui serait à l’origine de ces jaillissements intempestifs ? J’enfonce la pointe d’un couteau pour crever ces légumes qui ne seraient donc que d'agressives baudruches. En vain… 

Finalement, ai-je accusé des innocents ? Je veux en avoir le cœur net. Eh bien, même sans les piments, les mêmes explosions se produisent à la chauffe. L’explication qui me vient aussitôt à l’esprit, c’est que mon huile de récupération était chargée de l’humidité du thon préalablement étuvé pour être ensuite plongé dans son huile de conservation avant le passage à l’autoclave.

Il ne me reste plus qu’une solution : balancer rapidement les piments dans la poêle, hausser la flamme illico et coiffer d’un couvercle.

J’entends de sourdes explosions sous la coiffe d’inox, heureusement insuffisantes pour soulever la protection que je m’obstine cependant à contenir d'une main pressante par mesure de précaution.

Cinq minutes plus tard, je baisse la flamme, m’enquiers prudemment du résultat par un coup d’œil rapide. Quelques secondes encore à feu vif, j’éteins. Les crépitements ont cessé, je puis extraire mes piments verts que j’avais flanqués d’un petit jalapeno, surtout pour le visuel - et effectivement deux petits grignotages m’ont suffi avant de l'abandonner, la bouche en feu…

Le résultat est excellent, ces piments à la fois tendres et légèrement croquants sont goûteux et s’allient bien avec le thon germon à la qualité irréprochable.


Il y a cependant un frein à ces réjouissances. Troquer quelques minutes dans les escaliers contre plus d’une heure de ménage et nettoyages divers, était-ce une bonne affaire ? 

Je me pose cependant une autre question. N’ai-je pas dédouané trop rapidement ces piments pour ce bombardement qui a dévasté ma cuisine ? Car je viens de vérifier l'inscription qui figure sur le sachet de graines. Et j’ai pu lire : variété basque à saveur douce de type GUERNIKA


Vous voyez le tableau !

piments Guernika, thon basque
Champ de bataille



lundi 6 septembre 2021

J'accuse



Paru le 04 septembre 2021 à la une du quotidien   

LE CREPUSCULE



J'accuse !



pieds de cochon, Girardeau, pappardelle
Le pied à l'étrier ?


Comment ont-ils fait ? Les voici dans le Cadre Noir ! Je sais bien qu’ils sont de Saumur, ça aide, mais, à ce que je sache, le Cadre Noir n’est pas une troupe à pieds...

Plus étonnant encore, ils venaient de se faire flasher à 220 km/h dans le tunnel de Lacanche qu’ils ont traversé en moins de huit minutes - le pied au plancher si j’ose dire - avant de se retourner et être éjectés, sauvés fort opportunément par un buisson douillet de pappardelles. Le Cadre Noir serait-il une nouvelle Légion étrangère où l’on accueille - au pied levé, si j’ose dire, mais les yeux fermés - tout délinquant plus ou moins repentant, fut-il de la route ?

Ces pieds auraient-ils des appuis occultes qui leur permettent de parader ainsi sans vergogne alors qu’ils devraient être dans leurs petits souliers ? Quel est ce colonel venu de Livarot en Normandie que l’on a vu couler des jours heureux en leur compagnie au 53 Rue Saint-Nicolas, à Saumur, sous le regard complice de Monsieur Sébastien Girardeau ?



Droit de réponse :

Quel sérieux accorder à un rédacteur qui mélange km/h et °C... Ce monsieur, au moment où il a écrit ses élucubrations, devait être aussi beurré que les pappardelle dont il fait mention. Ce n’est pas un regard complice que le bon Sébastien Girardeau porte en regardant ses pieds la tête haute, mais un regard bienveillant, pour ne pas dire fièrement paternel, comme en témoigne cette photographie publiée par la revue VSD le 31 juillet 2015.


Alors prendre aussi arbitrairement le Cadre Noir pour cible me paraît particulièrement cavalier !

Espérons que ce texte ne soit que le simple dérapage d’un pisse-copie du Crépuscule (des vieux ? ) et non le début d’une campagne diffamatoire. Il serait bien triste qu’une certaine presse profite de la liberté qui lui est généreusement allouée pour en arriver à un tel degré d'ignominie...

Glaçant, non ?


vendredi 3 septembre 2021

À l’Auberge de la Cigogne Égarée

 

MENU DU JOUR

 

Planche de charcuterie : Saucisse de Jambon , Saucisse Pistachée, Mettwurscht (saucisse à tartiner)

saucisse dee jambon, saucisse pistachée, saucisse à tartiner, Alsace



Céleri rémoulade

céleri rémoulade


Munster-Géromé
au lait cru des Caves d'Affinage Schuster et son carvi

munster


Tarte maison aux mirabelles bio de Toul

tarte aux mirabelles


Boisson : bière de saison de la brasserie l’Orhinoise

Café offert par la  maison.

J’ai été tenté par le majestueux point final qu’aurait fourni une odoriférante eau-de-vie de framboise sauvage, mais ce n’aurait pas été raisonnable. Et comme je suis le sérieux personnifié…

En tout cas notre cigogne a bien fait de s’égarer sur mes terres franciliennes. Et c’est quand même mieux qu’elle soit arrivée avec des victuailles plutôt qu’avec un bébé même pas comestible - la recette en ayant été perdue depuis la disparition du regretté Jean-Christophe Averty…



 

vendredi 27 août 2021

Une Salsa chez Riz-thon

 

«  Allo, c’est quoi qu’on graille ce soir ?

-  Allo, oui, c’est riz-thon !

-  Oh, pardon, je me suis trompé de numéro… »

Et pourtant ce sera bien thon blanc-riz jaune, avec en plus une salsa verde.

D’ailleurs je ne changerai pas le menu, j’ai déjà taillé en cubes des courgettes du jardin, trois variétés différentes : Costata romanesco, Black beauty, Blanche de Sicile

courgettes, Romanesco, Black beauty, Blanche de Sicile
Le rendez-vous des trois courgettes

Je n’en prélève cependant que la moitié, le reste sera simplement cuit à part dans un peu d’huile d’olive avec deux gousses d’ail et des herbes aromatiques. Je réserverai le résultat qui, le lendemain, fournira - parfumé au dernier moment de basilic - un agréable accompagnement pour les onglets cuits sur le gril. Un bon repas rapide en perspective…

Mais pour l’instant je fais revenir deux ou trois minutes ma moitié du jour au fond d’une casserole dans de l’huile d’olive et verse un petit verre de riz long traditionnel pour le faire nacrer. Le riz est devenu translucide, j’ajoute une bonne pincée de gingembre en poudre et une cuillerée de curry de madras. J’inonde d’un peu moins de deux verres d’eau frémissante - il me faut tenir compte de l’eau de végétation que rendront les légumes. Je complète d’une tomate offerte généreusement par un voisin de jardin plus chanceux dans ses récoltes (tu parles, à coups de déferlantes de bouillie bordelaise...) taillée en huit et de trois gousses d’ail partagées en deux. Un brin de romarin que je retirerai en fin de cuisson rejoint tout ce petit monde. Je n’oublie pas d’assaisonner d’une pincée de gros sel, je couvre d’un disque de papier siliconé percé en son centre, mets le couvercle, et enfourne pour dix-huit minutes à 160 °C.

Je parsème les deux faces de ma darne de thon blanc du Pays Basque avec de la fleur de sel.

Les dix-huit minutes sont écoulées, je retire ma casserole du feu et la réserve couverte, le temps de snacker le thon. Je barbouille ce dernier au pinceau d’une fine couche d’huile d’olive, j'effectue un bref aller-retour sur une poêle antiadhésive bien chaude utilisée en guise de plancha.

Cette brève opération terminée, je passe au dressage. Je commence par débarrasser la tranche de thon de ses arêtes et de sa peau, pare les quatre morceaux obtenus en enlevant les parties sombres peu appétissantes (ce qui ne m’empêche pas de me les goinfrer en guise de hors-d’œuvre en catimini…) et les répartis entre les deux assiettes. Je me contente sur eux d’un petit tour de moulin de poivre rouge symbolique, juste pour marquer mon territoire.

Je décoiffe le riz aux courgettes, il est tendre et se détache convenablement, tout va bien. 

riz aux courgettes, curry de madras
Avec ses légumes, un curry de campagne

Pour une fois je vais me livrer au dressage avec un cercle, histoire de changer, car je n’aime guère ce géométrisme de la facilité. Ouais, facilité, mais que dans l’intention… Car parfois le château s’écroule. Mais ici ce ne sera pas le cas. Allez, vaillante tour, protège ton thon !

Ce n’est pas terminé. Je vais faire danser mon plat. Avec une salsa diabolique. Mais non, pas la Salsa du Démon, mais une Salsa Verde dont j’avais entamé le bocal il y a quelques jours. C’est précisément sa vigueur parfumée qui m’avait donné l’envie de la vouer à une grillade marine. Et fort heureusement un thon passait par là…

« C’est quoi qui-y-a, dans cette Salsa ? »

Je laisse le vendeur répondre :

Cette salsa issue d’une recette traditionnelle mexicaine se compose de tomatillos, de petites tomates vertes typiques du Mexique. Le tout pimenté et relevé à la coriandre fraîche.


En tout cas c’est une réussite, et cette sauce fonctionne on ne peut mieux avec le thon snacké. Du tonnerre, sinon du démon !

 

«  Allo, qu’est que c’est-y qu’on mange ce soir ?

-  C’était riz-thon et sa salsa, et le spectacle est terminé.

thon blanc, riz aux courgettes, salsa verde
Salsa chez Riz-thon

-  Je préfère l’Orchestre du Splendid ! »

Et l’on a raccroché. Pas étonnant, non ?

 

 

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mercredi 25 août 2021

Aukazou contre Biperra

 Il est bien utile d’avoir des aukazous chez soi, ces réserves qui nous permettent de faire face à des événements imprévus tels que pandémie de peste noire, troisième guerre mondiale ou invasions d’extraterrestres. Aussi mes placards regorgent-ils de ces nécessaires de survie, dont je crains hélas que la DLC ne soit dépassée quand ces catastrophes surviendront.

Quoi que…

C’est précisément à l’invasion de petits hommes verts camouflés sous l’avatar de petits Basques rouges qu’aujourd’hui je dois faire face. Verts eux aussi il n'y a guère, ils ont viré sournoisement au rouge dès que je les ai repérés dans le jardin. Il est grand temps de réagir !

Je dégaine donc mon aukazou approprié : une boîte de saucisses confites préparée par Pierre Oteiza. Contre ces poivrons bipirras, ce sera comme de la dynamite !


Bâtons de dynamite auxquels, conglomérés et serrés flanc contre flanc sous leur enrobage de graisse, elles ressemblent bigrement à la sortie de la boîte.

Je fais fondre doucement en déposant le cylindre porcin sur une poêle. Petit à petit les saucisses se séparent, s’allongent et se dispersent. L’union ne fait plus leur force, je les arrache manu militari à leur bain pour les réserver temporairement sur une plaque à débarrasser.

Cette graisse de bon cochon, elle exhale d’appétissants parfums, mais il y en a quand même bien trop. Je n’en laisse qu’une fine couche au fond de la poêle. Alors je hausse la flamme et je jette impitoyablement mes petits hommes rouges - mes biperras - dans mon ustensile grésillant. L’un d’eux parvient à se venger : je reçois la gouttelette brûlante qu’il m’a envoyée à la figure sur la joue. C’est qu’il aurait pu m’éborgner, ce malfaisant.

Puisque c’est la guerre, je riposte. Je le bombarde avec un piment Japaleno pas assez incendiaire à mon goût, mais je n’ai pas sous la main l’arme de destruction massive que serait un Carolina Reaper.

Il me semble néanmoins entendre aïe aïe aïe… Ce qui me fait penser que j’ai oublié l’ail. Je m’empresse d’ajouter une gousse taillée grossièrement et, tant qu’à faire, une petite courgette découpée en cubes que je soupçonne de connivence avec l’ennemi. L’invasion me semble maîtrisée, les dépouilles fumantes gisent sur le champ de bataille. Toutefois, pour plus de sûreté, je bats le rappel des aukazous qui se jettent sur les bipirras.

saucisses confites et poivrons basques
Aukazou et Biperras


Il ne me reste plus qu’à convaincre le monde que le cauchemar a déjà commencé.


lundi 23 août 2021

Tu l'as dit bouffi

Il est venu s’épancher sur mon épaule.

«  Ah, la vie est bien triste. Tel que tu me vois, quand j’étais un jeune harenguet, je rêvais de devenir gendarme. Et qu’est-ce que je suis désormais ? Un vieux bouffi suintant de graisse.

-  Eh oui, nul ne sait ce que le saur nous réserve… Un pari à kipper gagne. »

Sur ces bonnes paroles, je l’enfourne sous le gril pour deux ou trois minutes allongé à côté de son compagnon de route qui lui était resté coi. Quoi coi ? Oui, coi, parfaitement coi, un silence de carpe.

Les deux compères sortent de la fournaise. Devant la chaleur ils ont entrouvert leurs manteaux dorés. Quelques pommes de terre à l’anglaise s’interposent entre eux.

hareng bouffi
Deux bouffis pour la bouffe

Un peu plus tard, je constate que l’un des compères était en fait une commère - et c’est elle qui est restée muette. Étonnant, non ?

Ainsi, vous étiez donc en couple... Et ça, tu ne l’as pas dit, bouffi !