Mercredi
Ce matin je fus tirée du sommeil par un bruit inhabituel sous ma fenêtre. J’ai ouvert les volets et me suis penchée : deux gendarmes encadraient Jean-Sol Partre qui vociférait « Laissez-moi, je n’ai rien fait ! » tout en se débattant. Ce n’était pas plus mal, je n’aurais pas supporté de voir un homme accablé par le sort, je me serais sentie trop coupable. Et quant à trouver du réconfort auprès de l’abbé Chaud-Rond…
Je suis descendue prendre mon petit-déjeuner. En me pomponnant devant ma psyché, j’avais vérifié que je possédais tous les atouts pour séduire mon hussard - dire que demain il sera là - et sur la table trônait ma pâtisserie préférée, le cramique, que Marie réussit si bien.
Aussi j’étais toute guillerette quand maman est arrivée, la mine défaite.
« Ne faites pas cette tête, ma petite maman ! Il est enfin parti, ce Jean-Sol Partre. De le voir me donnait la nausée.
- Tu as des nausées ? »
J’ai vu le visage de maman se décomposer. Mais qu’a-t-elle pu imaginer ? Elle m’a vexée, aussi je la laisserai confrontée avec ses stupides angoisses. Je ne répondis pas à sa question, mais enchaînai en prenant un air indifférent :
« Il n’y a que du café ? Dommage, j’ai des envies de chocolat… »
Maman a l’air encore plus consternée. Bien fait pour elle, elle n’a pas à me prendre pour qui je ne suis pas ! Mais le retour de père fit diversion.
« J’ai accompagné les gendarmes. Savez-vous que le petit salopard risque le poteau d’exécution ? Ce n’est pas moi qui le plaindrai, après ce qu’il a fait à notre malheureuse fille… »
Je me suis dit : hum, les choses se gâtent ! L'affaire avait pris des proportions que je n'avais pas prévues… Si jamais le vilain gnome arrivait à prouver son innocence - et nul doute qu’il tentera de le faire vu les risques qu’il encoure -, je serais dans de beaux draps !
Heureusement, mon joli minois cache une cervelle bien faite. J'en ai, sous le chignon ! La solution fut aussitôt trouvée.
J’ai réussi à sangloter de façon plutôt convaincante.
« Le pauvre garçon. Il ne mérite pas ça. Il faut faire quelque chose. Si j’avoue que j’ai provoqué son geste, il sera sauvé, n’est-ce pas ?
- Mais…
- J’avoue alors, c’est moi qui ai glissé sa main sous mes jupons ! Faites venir les gendarmes… »
Et je pris l’air extatique d’une martyre professionnelle. À tel point que Marie qui était en train de débarrasser la table a cassé un bol, a joint ses mains en prière, a tourné son regard vers le ciel et a bredouillé :
« Merci Seigneur ! Ah, le bon abbé Chaud-Rond a fait un miracle. Mamzelle qui abritait hier des démons est devenue une sainte !
- Mais non ma bonne Marie, je fais simplement mon devoir… »
Et je baissai les yeux avec une charmante modestie.
Comme prévu, père s’exclama :
« Pas si vite ! Je me fiche du sort de ce ruffian. Et l’honneur de la famille ? Je t’interdis, ma fille, tu m’entends bien, ma fille, je t’interdis de faire une telle déclaration !
- Vous savez bien, père, que je vous ai toujours obéi…
- Hum…
- Si, si. Alors, même si c’est la mort dans l’âme quand je pense au sort réservé à ce malheureux, je ne passerai pas outre votre volonté. »
Et ben voilà, si ça tourne mal, ce sera désormais père qui portera le chapeau.
C’est avec un appétit d'ogre qui a inquiété maman que j’ai dévoré le repas de midi. Je n’ai pas pu m’empêcher de la titiller en refusant la tarte aux pommes et en affirmant que j’aurais préféré des fraises. Et dire qu’ainsi je me suis privée de mon dessert favori !
Il faut parfois faire des sacrifices quand on ne veut pas s’écarter de sa trajectoire.
Cet après-midi, j’ai fouillé le bureau de père pendant son absence. J’ai trouvé le billet de cantonnement qu’il avait reçu des autorités militaires. Mon beau hussard devrait arriver vers minuit. Youpi ! Heureusement, ce youpi n’était qu’intérieur quand maman, qui est toujours là au moment où il ne faut pas, m’a surprise la main dans le sac - ou plutôt dans le tiroir. Je lui ai affirmé que je cherchais le coupe-papier pour séparer les pages du recueil de poèmes que je venais d’acheter chez le libraire. Toujours aussi benête, elle m’a crue, ne pouvant s’empêcher d’ajouter qu’elle espérait que ces vers n’étaient pas trop osés.
Comment puis-je être le fruit de tels géniteurs ?
Je vais maintenant me coucher. Sous mon oreiller, j’ai glissé l’image découpée dans l’encyclopédie familiale...
Bientôt il sera dans notre logis, lui que j’attends…
Cuisine qui ne roule pas à Vegelib. Comment se creuser pour que ses plats ne finissent pas en reliefs....
mercredi 14 novembre 2018
mardi 13 novembre 2018
Le hussard sous le toit (2)
Mardi
Entrouvre-toi, cher petit carnet où se nichent des bribes de ma triste existence provinciale, afin que je couche sur tes pages le déroulement de la journée particulière que je viens de vivre !
Le matin, la tête pleine de mes rêves, je me suis réveillée navrée d’être encore dans ce désolant présent.
Alors m’est venue l’idée de donner une bonne leçon à notre vilain militaire avant qu’il ne parte.
J’ai sorti du fond de l’armoire le tambour sur lequel était tendue la tapisserie que j’avais commencé à broder jusqu'à ce que je me lasse de ses abominables fleurs d’un jaune pisseux sur un fond lie de vinasse. Puis je me suis mise à manier l’aiguille comme sait le faire la jeune fille modèle que je suis. Le temps m’a paru long jusqu’à ce que j’entende par la porte entrebâillée de ma chambre le pas de Jean-Sol Partre qui montait l’escalier.
Action !
Je pousse un petit cri et gémit.
« Ah, Monsieur Jean-Sol, vous tombez bien ! Vous voyez, je suis en train de broder, et je viens de m’asseoir sur une aiguille qui s’est piquée dans ma fesse. J’ai mal, aidez-moi à l’extraire, je vous en prie… »
Je me saisis de sa main, la glisse sous mes jupons. Le sot l’y laisse !
Je sors alors à pleins poumons un magnifique contre-ut qui aurait fait honneur à l’enseignement dispensé par mon professeur de chant si ce dernier n’avait pas été chassé ignominieusement et prématurément car il n’était pas le castrat que voulait père et que croyait maman.
Une galopade dans l’escalier. C’est père. Il envoie un coup de poing au sieur Partre. Un flot vermillon s’écoule de son nez, un verre de ses bésicles est brisé. Père m’enlace entre ses bras et me murmure à l’oreille.
« Ma pauvre choupinette, ma pauvre choupinette… »
Puis c’est maman qui arrive tout essoufflée. Elle me toise et d’un ton sévère m’assène :
« Eh bien désormais je t’ordonne de fermer le verrou de ta chambre. Le suivant ne vaudra peut-être pas mieux que le premier ! »
Je savais que j’avais été élevée par un tyran et une niaise. J’apprenais aujourd’hui qu’en certaines circonstances les rôles pouvaient être inversés.
Enfin c’est Marie, la bonne, qui s’encadre dans le chambranle de la porte. Il est temps de clore la séance. Je me mets à balbutier.
« Honte à toi, funeste soldatesque ! Ô, jeunesse ennemie, n’ai-je si peu vécu que pour cette infamie…
Wer reitet so spät durch Nacht und Wind, es ist der Uhlan mit seinem Speer… Toubib or not toubib ?
E pericoloso sporgersi ! »
Marie se cache le visage sous son tablier.
« M’dame, Mamzelle est possédée. Elle parle les langages des démons. M’dame, oh m’dame ! »
Je fais effectuer quelques rotations à mes beaux yeux bleus, je les ferme et me laisse tomber les bras en croix sur la moelleuse descente de lit dont je me suis rapprochée mine de rien afin de ne pas me faire mal.
« Marie, allez chercher les sels. »
Le temps qu’elle les trouve, je peux me payer une petite sieste. Je l’ai bien méritée !
L’après-midi, je me sentais moins fière de moi. J’avais peut-être été trop dure envers Partre. Après tout son seul crime était d’exister… et de ne pas être hussard ! Mais aussi comment peut-on être aussi laid ? J’ai des circonstances atténuantes.
Je décide cependant de confier mes tourments à mon directeur spirituel, l’abbé Chaud-Rond.
Je lui narre mon aventure matutinale. Quand j’en arrive à l’épisode de la main du soudard sous ma jupe et sur ma croupe, je vois le prêtre rougir. Aurais-je réussi à cardinaliser un abbé ? Mais ne voilà-t-il pas qu’il me demande des détails, va même me proposer une reconstitution sous le prétexte de pouvoir trancher plus judicieusement. C’en est trop.
« Or ça, l’abbé, calmez votre frénésie ! Mes pauvres appâts de pure jeune fille suffisent donc à vous mettre en cet état ? Monsieur le maître en con-fesse, veillez à ne pas disjoindre ce mot ! Le goupillon va finir par être pire que le sabre. Abrégeons.
- Je constate une fois de plus qu'il n'y a pas que les voies du Seigneur qui soient impénétrables. Force est donc aux pauvres humains que nous sommes de nous soumettre, même si c’est de mauvais gré... »
L'ecclésiastique s'était mué en philosophe. Ce n'est pourtant que du bout des lèvres qu'il a consenti à me donner l’absolution.
La journée s’est terminée par une dispute avec mon amie Pauline. Je devrais plutôt dire mon ex-amie. Après que je lui ai raconté ma vengeance envers Partre, elle a commencé par s’esclaffer puis a pris un air sérieux.
« Je ris, mais je trouve que tu t’es montrée méchante inutilement.
- Comment ça ?
- Oui, tu as eu la main trop lourde. »
Non mais, c’est qu’elle va me sermonner, cette gourgandine. La réplique fuse.
« Mieux vaut avoir la main lourde que la cuisse légère ! »
Nous nous sommes quittées fâchées.
Après tout, ce n’est pas plus mal qu’elle s’éloigne de moi… Elle aurait été capable de tenter de me le piquer, mon beau hussard chamarré !
Entrouvre-toi, cher petit carnet où se nichent des bribes de ma triste existence provinciale, afin que je couche sur tes pages le déroulement de la journée particulière que je viens de vivre !
Le matin, la tête pleine de mes rêves, je me suis réveillée navrée d’être encore dans ce désolant présent.
Alors m’est venue l’idée de donner une bonne leçon à notre vilain militaire avant qu’il ne parte.
J’ai sorti du fond de l’armoire le tambour sur lequel était tendue la tapisserie que j’avais commencé à broder jusqu'à ce que je me lasse de ses abominables fleurs d’un jaune pisseux sur un fond lie de vinasse. Puis je me suis mise à manier l’aiguille comme sait le faire la jeune fille modèle que je suis. Le temps m’a paru long jusqu’à ce que j’entende par la porte entrebâillée de ma chambre le pas de Jean-Sol Partre qui montait l’escalier.
Action !
Je pousse un petit cri et gémit.
« Ah, Monsieur Jean-Sol, vous tombez bien ! Vous voyez, je suis en train de broder, et je viens de m’asseoir sur une aiguille qui s’est piquée dans ma fesse. J’ai mal, aidez-moi à l’extraire, je vous en prie… »
Je me saisis de sa main, la glisse sous mes jupons. Le sot l’y laisse !
Je sors alors à pleins poumons un magnifique contre-ut qui aurait fait honneur à l’enseignement dispensé par mon professeur de chant si ce dernier n’avait pas été chassé ignominieusement et prématurément car il n’était pas le castrat que voulait père et que croyait maman.
Une galopade dans l’escalier. C’est père. Il envoie un coup de poing au sieur Partre. Un flot vermillon s’écoule de son nez, un verre de ses bésicles est brisé. Père m’enlace entre ses bras et me murmure à l’oreille.
« Ma pauvre choupinette, ma pauvre choupinette… »
Puis c’est maman qui arrive tout essoufflée. Elle me toise et d’un ton sévère m’assène :
« Eh bien désormais je t’ordonne de fermer le verrou de ta chambre. Le suivant ne vaudra peut-être pas mieux que le premier ! »
Je savais que j’avais été élevée par un tyran et une niaise. J’apprenais aujourd’hui qu’en certaines circonstances les rôles pouvaient être inversés.
Enfin c’est Marie, la bonne, qui s’encadre dans le chambranle de la porte. Il est temps de clore la séance. Je me mets à balbutier.
« Honte à toi, funeste soldatesque ! Ô, jeunesse ennemie, n’ai-je si peu vécu que pour cette infamie…
Wer reitet so spät durch Nacht und Wind, es ist der Uhlan mit seinem Speer… Toubib or not toubib ?
E pericoloso sporgersi ! »
Marie se cache le visage sous son tablier.
« M’dame, Mamzelle est possédée. Elle parle les langages des démons. M’dame, oh m’dame ! »
Je fais effectuer quelques rotations à mes beaux yeux bleus, je les ferme et me laisse tomber les bras en croix sur la moelleuse descente de lit dont je me suis rapprochée mine de rien afin de ne pas me faire mal.
« Marie, allez chercher les sels. »
Le temps qu’elle les trouve, je peux me payer une petite sieste. Je l’ai bien méritée !
L’après-midi, je me sentais moins fière de moi. J’avais peut-être été trop dure envers Partre. Après tout son seul crime était d’exister… et de ne pas être hussard ! Mais aussi comment peut-on être aussi laid ? J’ai des circonstances atténuantes.
Je décide cependant de confier mes tourments à mon directeur spirituel, l’abbé Chaud-Rond.
Je lui narre mon aventure matutinale. Quand j’en arrive à l’épisode de la main du soudard sous ma jupe et sur ma croupe, je vois le prêtre rougir. Aurais-je réussi à cardinaliser un abbé ? Mais ne voilà-t-il pas qu’il me demande des détails, va même me proposer une reconstitution sous le prétexte de pouvoir trancher plus judicieusement. C’en est trop.
« Or ça, l’abbé, calmez votre frénésie ! Mes pauvres appâts de pure jeune fille suffisent donc à vous mettre en cet état ? Monsieur le maître en con-fesse, veillez à ne pas disjoindre ce mot ! Le goupillon va finir par être pire que le sabre. Abrégeons.
- Je constate une fois de plus qu'il n'y a pas que les voies du Seigneur qui soient impénétrables. Force est donc aux pauvres humains que nous sommes de nous soumettre, même si c’est de mauvais gré... »
L'ecclésiastique s'était mué en philosophe. Ce n'est pourtant que du bout des lèvres qu'il a consenti à me donner l’absolution.
La journée s’est terminée par une dispute avec mon amie Pauline. Je devrais plutôt dire mon ex-amie. Après que je lui ai raconté ma vengeance envers Partre, elle a commencé par s’esclaffer puis a pris un air sérieux.
« Je ris, mais je trouve que tu t’es montrée méchante inutilement.
- Comment ça ?
- Oui, tu as eu la main trop lourde. »
Non mais, c’est qu’elle va me sermonner, cette gourgandine. La réplique fuse.
« Mieux vaut avoir la main lourde que la cuisse légère ! »
Cuisse légère |
Nous nous sommes quittées fâchées.
Après tout, ce n’est pas plus mal qu’elle s’éloigne de moi… Elle aurait été capable de tenter de me le piquer, mon beau hussard chamarré !
lundi 12 novembre 2018
Le hussard sous le toit (1) - Journal d'une jeune fille rangée
Lundi
J’essaye de le cacher, mais mon cœur de jeune fille bat la chamade depuis que mon amie Pauline m’a appris sous le sceau du secret que la garnison qui occupe la ville et loge chez l’habitant sera relevée jeudi prochain. Elle n’a pas voulu me confier ses sources, mais elle sait que des hussards à la tenue chamarrée remplaceront les mornes biffins.
J’ai failli embrasser Pauline et crier hip hip hourra ! Mais je me suis abstenue et j’ai réussi à prendre un air indifférent. Sinon Pauline aurait été trop contente de faire les yeux doux à celui qui, je l’espère, remplacera l’affreux binoclard qui me regarde en biais avant de me pincer les fesses dans l’escalier menant aux chambres à l’étage. Dieu merci, cet horrible Jean-Sol Partre loge dans une mansarde encore plus haut, ce qui ne m’empêche pas de tirer précautionneusement le verrou. Ce que je ne ferai pas quand arrivera le beau hussard que j’espère de tous mes vœux !
J’ai eu honte de mes pensées, aussi je suis allée me confesser auprès du prêtre de l’église Saint Jacques. Je ne sais pas si je suis croyante, ça va ça vient, mais le calme de ce lieu me rassérène, avec ses arcades culottées par les ans qui encadrent de lumineux vitraux.
L’ecclésiastique plein d’onction a su me rassurer. Décidément, cet abbé Chaud-Rond sait huiler le péché pour le rendre plus digeste…
Pauline avait raison. Quand je suis revenue à la maison, père était en train d’annoncer à ma tendre maman que nous allions héberger un hussard au doux prénom de Roger. Enfin, doux, c’est moi qui ajoute cette épithète… De plus, n’ayant pas pris conscience de mon arrivée, père a ajouté : « J’ose espérer que ce ruffian sera aussi laid que son prédécesseur, pour le bien de notre fille. » Maman lui a fait signe de se taire, mais c’était trop tard. Mon bien, mon bien,... Mais qui êtes-vous, Monsieur mon père, pour parler de mon bien à ma place ! Il sera splendide, mon hussard, je le sais, et j’en suis fort aise, ne vous déplaise.
J’écris ces lignes avant d’éteindre la lumière pour me plonger dans une nuit enfin emplie de rêves charmants et d’espoir. Tu seras bientôt là, mon aimé !
J’ai failli embrasser Pauline et crier hip hip hourra ! Mais je me suis abstenue et j’ai réussi à prendre un air indifférent. Sinon Pauline aurait été trop contente de faire les yeux doux à celui qui, je l’espère, remplacera l’affreux binoclard qui me regarde en biais avant de me pincer les fesses dans l’escalier menant aux chambres à l’étage. Dieu merci, cet horrible Jean-Sol Partre loge dans une mansarde encore plus haut, ce qui ne m’empêche pas de tirer précautionneusement le verrou. Ce que je ne ferai pas quand arrivera le beau hussard que j’espère de tous mes vœux !
J’ai eu honte de mes pensées, aussi je suis allée me confesser auprès du prêtre de l’église Saint Jacques. Je ne sais pas si je suis croyante, ça va ça vient, mais le calme de ce lieu me rassérène, avec ses arcades culottées par les ans qui encadrent de lumineux vitraux.
L’ecclésiastique plein d’onction a su me rassurer. Décidément, cet abbé Chaud-Rond sait huiler le péché pour le rendre plus digeste…
Pauline avait raison. Quand je suis revenue à la maison, père était en train d’annoncer à ma tendre maman que nous allions héberger un hussard au doux prénom de Roger. Enfin, doux, c’est moi qui ajoute cette épithète… De plus, n’ayant pas pris conscience de mon arrivée, père a ajouté : « J’ose espérer que ce ruffian sera aussi laid que son prédécesseur, pour le bien de notre fille. » Maman lui a fait signe de se taire, mais c’était trop tard. Mon bien, mon bien,... Mais qui êtes-vous, Monsieur mon père, pour parler de mon bien à ma place ! Il sera splendide, mon hussard, je le sais, et j’en suis fort aise, ne vous déplaise.
J’écris ces lignes avant d’éteindre la lumière pour me plonger dans une nuit enfin emplie de rêves charmants et d’espoir. Tu seras bientôt là, mon aimé !
mercredi 7 novembre 2018
Petite semaine du blanc
Ma petite semaine du blanc…
Bien sûr, une blanquette de veau. Réalisée à la façon du chef Simon, c’est-à-dire sans liaison finale à l’œuf et sans le trait de citron.
http://chefsimon.com/gourmets/chef-simon/recettes/blanquette-de-veau--12
J’ai suivi sa procédure, donc je m’épargnerai toute littérature redondante. Des photos suffiront…
Mais aussi des boudins blancs achetés à Saumur chez l’excellente maison Girardeau.
Je les ai servis avec une purée céleri rave parmentière montée au lait bouillant et au beurre de ferme.
Blanches aussi les andouillettes tirées à la ficelle AAAAA provenant aussi de mon charcutier-traiteur préféré.
Mais comme je ne voulais pas faire chou blanc, nous sommes passés au vert des choux de Bruxelles…
Bien sûr, une blanquette de veau. Réalisée à la façon du chef Simon, c’est-à-dire sans liaison finale à l’œuf et sans le trait de citron.
http://chefsimon.com/gourmets/chef-simon/recettes/blanquette-de-veau--12
J’ai suivi sa procédure, donc je m’épargnerai toute littérature redondante. Des photos suffiront…
Veau sous l'eau |
Champignons cuits à blanc |
Glacés à blanc |
Oh le beau roux ! |
L'incorporation |
Bientôt sous vide |
Réchauffée doucement dans la cocotte |
Mais aussi des boudins blancs achetés à Saumur chez l’excellente maison Girardeau.
Tiens, voilà du boudin ! |
Je les ai servis avec une purée céleri rave parmentière montée au lait bouillant et au beurre de ferme.
Blanche purée |
Blanches aussi les andouillettes tirées à la ficelle AAAAA provenant aussi de mon charcutier-traiteur préféré.
Refaire l'andouille(tte) : |
Mais comme je ne voulais pas faire chou blanc, nous sommes passés au vert des choux de Bruxelles…
Verts et blanchis |
dimanche 4 novembre 2018
En tranchant la Parthenaise
La Parthenaise
musique de Serge Gainsbourg, paroles de Didier Barbecue
J’avoue j’en ai bavé
Devant cette côte de bœuf mon amour
Ne vous déplaise
En tranchant la Parthenaise
Nous nous aimions
Le temps d’une cuisson
À votre avis qu'avons-nous vu de l'amour?
De vous à moi vous m'avez eu mon amour
Ne vous déplaise
Vous aimiez la Parthenaise
Mais certes moi pas
Le temps d'un bon repas
J'avais envie de voir en vous cet amour
Ne vous déplaise
En tranchant la Parthenaise
Nous nous aimions
Le temps d'une cuisson
...cuisson sur des sarments (d'amour) de vignes du Chinonais
mercredi 31 octobre 2018
Tout ce que vous voulez savoir sur la sexualité de l'aiguillette sans jamais oser le demander
Aujourd’hui nous aborderons la reproduction de l’aiguille.
Il faut tout d’abord des mâles, les aiguilles,
et en second lieu des femelles, les aiguillettes.
Pour éviter que l’aiguillette ait une crise de nerfs, il faut commencer par la dénerver.
Malgré tout, quand l’aiguillette voit l’aiguille s’approcher, elle se recroqueville sur elle-même.
Là, enfin, après cette phase de contraction, l’aiguille peut passer à l’acte. L’on observera que l’aiguille peut pénétrer au moins deux femelles simultanément, trois pour les meilleurs, prouesse dont l’homme et même le lapin se montrent bien incapables, en dépit de louables tentatives vouées inexorablement à l’échec…
Il n’est pas inutile de fournir aux couples des herbes aphrodisiaques : sauge verte, sauge bicolore, thym citronnelle romarin. Ces plantes renforceront leur tempérament naturel.
De plus, à l’instar du Vert Galant qui avait toujours cru que c’était un os, l’aiguille, qui croit toujours que c’est en bois, apprécie particulièrement l’oignon.
Oignon, donc !
Après cet épisode qui devient torride durant six minutes environ, montre en main, les couples d’inséparables – ou plutôt les quatuors - pratiquent la couvaison : allongés sur les œufs appelés mojettes, ils veillent à maintenir une température optimale d’une soixantaine de degrés.
En raison de son incapacité évidente à nourrir cette tendre progéniture, il est préférable de se substituer à la parentèle indigne en fournissant carotte en quantité raisonnable et beurre à profusion. Une petite contribution en sodium par le biais de sel marin peut se montrer pertinente, tout comme le piper nigrum apparaît comme la solution idéale pour donner un coup de fouet vivifiant à cette petite famille. Du persil et une tête d'ail apporteront les vitamines indispensables...
J’espère que cet article contribuera à vulgariser les mœurs étranges de cette population à la fois méconnue et attachante : les aiguilles (de bois) et leurs femelles les aiguillettes (de canard).
À suivre dans un délai indéterminé une description de la reproduction du brochet et de la brochette…
Il faut tout d’abord des mâles, les aiguilles,
Un beau mâle |
et en second lieu des femelles, les aiguillettes.
Les trois Grâces |
Pour éviter que l’aiguillette ait une crise de nerfs, il faut commencer par la dénerver.
Malgré tout, quand l’aiguillette voit l’aiguille s’approcher, elle se recroqueville sur elle-même.
Là, enfin, après cette phase de contraction, l’aiguille peut passer à l’acte. L’on observera que l’aiguille peut pénétrer au moins deux femelles simultanément, trois pour les meilleurs, prouesse dont l’homme et même le lapin se montrent bien incapables, en dépit de louables tentatives vouées inexorablement à l’échec…
Il n’est pas inutile de fournir aux couples des herbes aphrodisiaques : sauge verte, sauge bicolore, thym citronnelle romarin. Ces plantes renforceront leur tempérament naturel.
De plus, à l’instar du Vert Galant qui avait toujours cru que c’était un os, l’aiguille, qui croit toujours que c’est en bois, apprécie particulièrement l’oignon.
Le Vert Galant s'apprétant à trancher un oignon |
Oignon, donc !
Après cet épisode qui devient torride durant six minutes environ, montre en main, les couples d’inséparables – ou plutôt les quatuors - pratiquent la couvaison : allongés sur les œufs appelés mojettes, ils veillent à maintenir une température optimale d’une soixantaine de degrés.
Le nid nuptial |
En raison de son incapacité évidente à nourrir cette tendre progéniture, il est préférable de se substituer à la parentèle indigne en fournissant carotte en quantité raisonnable et beurre à profusion. Une petite contribution en sodium par le biais de sel marin peut se montrer pertinente, tout comme le piper nigrum apparaît comme la solution idéale pour donner un coup de fouet vivifiant à cette petite famille. Du persil et une tête d'ail apporteront les vitamines indispensables...
Chair tendre et tête de bois |
J’espère que cet article contribuera à vulgariser les mœurs étranges de cette population à la fois méconnue et attachante : les aiguilles (de bois) et leurs femelles les aiguillettes (de canard).
À suivre dans un délai indéterminé une description de la reproduction du brochet et de la brochette…
samedi 27 octobre 2018
J'ai joué au Laocoon
Il était censé l’avoir tuée… J’avais bien vu la pince serrer la tête de l’anguille, puis la queue de la bête brandie comme un fouet frapper violemment l’angle d’une caisse.
Elle était inerte quand il me l’avait tendue, lovée au fond d’un sac.
Mais voilà, quand j’avais entrepris de l’inciser afin de la dépouiller, elle était revenue du royaume des morts… Il m’a fallu la maintenir d’une main pendant que j’opérais. Je ne m’étais jamais rendu compte qu’une anguille pouvait être aussi costaude ! Tel un nouveau Laocoon, j’ai dû me livrer à un bras de fer avec cet animal serpentiforme.
Sauf que moi je fus vainqueur dans cet affrontement !
Je passe sur les détails sanguinolents de la mise en tronçons du vaincu...
Après le combat, je versai un filet d’huile d’arachide au fond d’une sauteuse placée sur un feu vif. Quelques instants plus tard les morceaux d’anguilles se faisaient saisir brièvement avant d’être retirés du feu.
Dans une casserole, je fis dorer sur une noix de beurre demi-sel les lardons que j’avais taillés dans un morceau de lard, puis j'y fis suer une dizaine d’échalotes grises, des cives ciselées grossièrement et une demi-carotte découpée en bâtonnets. Je vidai les ¾ d’une bouteille de vin de Chinon rouge sur ces légumes et plongeai dans le liquide une feuille de laurier et une branche de thym. Je rajoutai quelques grains de poivre de Voatsiperifery. Je me suis lancé dans une réduction pour environ un quart d’heure. Puis je recouvris les anguilles dans la sauteuse du contenu de la casserole et poursuivis la cuisson à feu doux une vingtaine de minutes.
Comme il n’est prévu de manger cette matelote d’anguille que le surlendemain, je me suis contenté de rectifier l’assaisonnement par une pincée de sel, et de transvaser le contenu de la sauteuse dans un bac que j’ai mis sous vide.
Le jour J est arrivé. Dans une poêle, des champignons de Paris escalopés en quatre reviennent dans une noix de beurre demi-sel. Je ressors la sauteuse et y vide le bac sorti du réfrigérateur contenant l’anguille en sauce. J’ajoute une petite cuillerée de vinaigre balsamique de Modène, quelques gouttes d’arôme Patrelle et les champignons cuits al dente. Je laisse encore mijoter à feu doux sept à huit minutes. Je termine par un tour de moulin de poivre rouge.
Je répartis entre deux assiettes creuses avec des pommes de terre Prunelle dont je pensais que la couleur s’harmonisera avec les nuances brun violet du plat. Ouais, leur rendu est quand même un peu flashy… Je suis peut-être aussi tombé dans l’excès avec la touche verte du persil…
Quoi qu’il en soit, il n’y a rien à redire sur le plan gustatif.
Je n’ai pas joué au Laocoon pour rien !
Elle était inerte quand il me l’avait tendue, lovée au fond d’un sac.
Mais voilà, quand j’avais entrepris de l’inciser afin de la dépouiller, elle était revenue du royaume des morts… Il m’a fallu la maintenir d’une main pendant que j’opérais. Je ne m’étais jamais rendu compte qu’une anguille pouvait être aussi costaude ! Tel un nouveau Laocoon, j’ai dû me livrer à un bras de fer avec cet animal serpentiforme.
En pleine action ! |
Sauf que moi je fus vainqueur dans cet affrontement !
Je passe sur les détails sanguinolents de la mise en tronçons du vaincu...
Après le combat, je versai un filet d’huile d’arachide au fond d’une sauteuse placée sur un feu vif. Quelques instants plus tard les morceaux d’anguilles se faisaient saisir brièvement avant d’être retirés du feu.
Dans une casserole, je fis dorer sur une noix de beurre demi-sel les lardons que j’avais taillés dans un morceau de lard, puis j'y fis suer une dizaine d’échalotes grises, des cives ciselées grossièrement et une demi-carotte découpée en bâtonnets. Je vidai les ¾ d’une bouteille de vin de Chinon rouge sur ces légumes et plongeai dans le liquide une feuille de laurier et une branche de thym. Je rajoutai quelques grains de poivre de Voatsiperifery. Je me suis lancé dans une réduction pour environ un quart d’heure. Puis je recouvris les anguilles dans la sauteuse du contenu de la casserole et poursuivis la cuisson à feu doux une vingtaine de minutes.
Anguille faisant la course à l'échalote |
Comme il n’est prévu de manger cette matelote d’anguille que le surlendemain, je me suis contenté de rectifier l’assaisonnement par une pincée de sel, et de transvaser le contenu de la sauteuse dans un bac que j’ai mis sous vide.
Le jour J est arrivé. Dans une poêle, des champignons de Paris escalopés en quatre reviennent dans une noix de beurre demi-sel. Je ressors la sauteuse et y vide le bac sorti du réfrigérateur contenant l’anguille en sauce. J’ajoute une petite cuillerée de vinaigre balsamique de Modène, quelques gouttes d’arôme Patrelle et les champignons cuits al dente. Je laisse encore mijoter à feu doux sept à huit minutes. Je termine par un tour de moulin de poivre rouge.
Anguille reposant sous ses lauriers |
Je répartis entre deux assiettes creuses avec des pommes de terre Prunelle dont je pensais que la couleur s’harmonisera avec les nuances brun violet du plat. Ouais, leur rendu est quand même un peu flashy… Je suis peut-être aussi tombé dans l’excès avec la touche verte du persil…
L'anguille a trois prunelles |
Quoi qu’il en soit, il n’y a rien à redire sur le plan gustatif.
Je n’ai pas joué au Laocoon pour rien !
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