lundi 18 septembre 2017

Supion l'Armoricain

Les troupes de Supion l’Armoricain viennent de subir une lourde défaite. Chaque soldat fut débarrassé de son glaive et décapité.
Finalement, nul besoin de faire intervenir l’artillerie.

pommes de terre sautées
À boulets rouges

Par mesure de précaution, j’ai jeté de l’huile chaude depuis mes machicoulis.
Piment d’Espelette et jus de citron : les victimes pouvaient reposer en paix sur un champ de bataille fleuri de basilic.

supions
Requiescat in pace

Et Caton l’Ancien pouvait continuer à glapir Parigot delenda est, je m’en contrefichais !

vendredi 15 septembre 2017

Il n'y a qu'un oeuf qui puisse être parfait

J’avais déjà tout en tête pour le déroulement de ma recette destinée à mettre en valeur les beaux cèpes arrivés d’Auvergne en ma cuisine.
Je n’avais plus qu’à passer à l’action…


ACTION !

Je verse de l’eau chaude du robinet dans un bac en plastique, et installe le thermoplongeur.
En effet les cèpes accompagneront des œufs parfaits. Je règle à 64,5°C, et attend que cette température soit atteinte et bien stabilisée.

oeuf parfait, thermoplongeur, 64.5°C
Chauffe Marcel !


Je place 4 œufs dans un petit panier grillagé afin qu’ils ne soient pas ballotés par les remous provoqués par l’hélice -même si j’ai réglé ce flux au minimum- avec dans ce cas un risque de casse, et immerge délicatement ce nid au fond du bac. La cuisson devra durer une heure, je programme et déclenche un minuteur.
Je découpe pendant que l’appareil ronronne un oignon rouge afin d’obtenir des cercles que je laisse mariner dans du yuzu-ponzu (mélange de vinaigre, de jus de yuzu et de mirin, rehaussé par une touche de dashi). Mon objectif est d’obtenir ainsi de pseudo pickles rapide.
Je passe ensuite à la préparation des cèpes. Pas  grand travail, car ils sont très propres (peut-être une pousse sous des conifères ?), il me suffit de coups de brosse et d’un léger épluchage des pieds.
Je les tranche en deux et les réserve.
Je cisèle du persil plat et prépare des extrémités de persil frisé. Je réserve.
Je verse environ une cuillerée de flocons d’algue ao nori dans une coupelle. Je fais la même chose avec du piment d’Espelette.

Puis je vaque à d’autres occupations, pensant que tout était prêt pour anticiper le dressage.

Le minuteur sonne, me rappelant à l’ordre. L’avantage de la cuisson à basse température, c’est de bénéficier d’une certaine latitude pour les durées de cuisson. Aussi je laisse les œufs dans leur bain à 64,5°C et c’est sans hâte excessive que je verse un trait d’huile d’olive au fond d’une poêle, suivi d’une grosse noix de beurre demi-sel. Sur feu moyen je pose  les moitiés de cèpes côté tranche avant de les retourner après dorure.
Les cèpes sont cuits. Je les retire du feu
J’écale les œufs, en place deux dans chaque assiette que je fais voisiner par les cèpes.
Les persils, les cercles d’oignon, l’algue, le piment : l’assiette est dressée. Il ne reste plus qu’à donner un coup de couteau afin de faire apparaître le jaune bien crémeux.

oeuf parfait, cèpes, basse température
Cèpes, œuf parfait 


Content de moi, je pose les assiettes sur la table.
Et mon épouse me dit ; « N’aurais-tu pas oublié quelque chose ? »
Mais oui, bien sûr, en décrivant mon projet de plat, j’avais parlé de la présence de trois très fines tranches du saucisson au roquefort bien sec et si goûteux qui pend dans la cuisine. J’avais tout en tête… Sauf que visiblement ma tête a connu une défaillance.
Je me console en me disant que ces tranches charcutières, ce n’était pas forcément une bonne idée car le plat fonctionne très bien sans elles, et que le mieux est l’ennemi du bien.
Consolation gastronomique… Mais ça ne règle pas pour autant mon inquiétude devant cette preuve de sénilité !


jeudi 14 septembre 2017

Les beaux arts d'utiliser les restes

Reste N°1 :
La seconde moitié du chou frisé dont la première moitié avait été utilisée pour réaliser la potée de sac d’os et saucisse cousine (Pastre et Courade sont dans un rondeau…).

Je décide d’acheter deux crépinettes. Je découpe le chou en lanières, le blanchit, et le fait compoter sur une grosse noix de beurre demi-sel où un petit oignon blanc haché avait été mis à fondre. À mi-cuisson, j’ajoute une carotte découpée en julienne.
Seul problème, un convive inopiné s’est présenté, et il n’y a que deux crépinettes. D’autre part, on est un lundi, et toutes les boucheries et charcuteries sont fermées dans le quartier… Il faut donc improviser un plan d’urgence : il consistera  en une rafle rapide d’une boîte de saucisses de Toulouse chez le Picard situé dans une rue proche.
Les deux saucisses sorties de leur conditionnement et cuisinées selon les instructions se révèlent décevantes, pour ne pas dire franchement mauvaises : insipides et d’une texture granuleuse désagréable. Désormais les hôtes seront priés d’annoncer leur venue suffisamment à l’avance !
Dégât collatéral, seules deux pièces ont été utilisées, il reste encore deux de ces saucisses que faire de ce :

Reste N°2 :
Une paire de saucisses se prétendant de Toulouse surgelées.

Reste N°3 :
Le riz au curry qui avait accompagné le saumon, conservé dans une boîte sous vide.

Il en reste d’autant plus que la jeune infante qui s’était empiffrée de cette même recette quelques semaines auparavant (sauf qu’un bouillon de crustacés avait remplacé un bouillon de volaille…) avait décrété cette fois-ci que ça piquait et avait écarté avec vigueur les grains jaunes d’or, se rattrapant sur le poisson.
Je décide de l’associer avec le reste N°2.

Reste N°4 :
Trois grosses tomates Cœur de Toro qui avaient échappé la veille à la confection d’une salade multicolore.

Je décide de me lancer dans la préparation d’une sauce du genre de celles qui servent à faire passer le merlan, un plus ou moins rougail destiné à masquer la déplorable saucisse sous ses saveurs.
Ce sera donc :

Rougail fantoche :
Je commence par monder les tomates. Elles sont suffisament mures pour que je puisse me passer de les plonger dans l’eau bouillante, même si il reste deux ou trois lambeaux qui ne me gênent pas plus que ça : c’est un plat rustique, non mais !
Je les concasse en gros morceaux, ne voulant pas aboutir à une sauce tomate et encore moins à un coulis. Je fais fondre les pétales d’un oignon dans l’huile d’olive au fond d’une la casserole, les recouvre des morceaux de tomate. Je remets sur feu doux. Après quelques minutes durant lesquelles l’eau de végétation des tomates a commencé à s’épancher, j’ajoute un bouquet garni constitué de céleri-branche, thym et persil enfermés sous une feuille de poireau, une feuille de laurier et des grains de poivre Voatsiperifery. Une dizaine de minutes plus tard suivent demi-une gousse d’ail écrasée, un piment végétarien frais cueilli sur le pied qui me tend ses branches, un morceau de gingembre râpé, du zeste de citron vert, un trait de balsamique blanc. Comme mon piment maison apportera beaucoup de parfums, mais pour la vigueur ne sera pas à la hauteur, je le fais épauler par une bonne cuillerée d’aji molido, une poudre de piment argentin dont j’avais fait l’acquisition quand j’avais préparé des empanadas. Je termine par un léger trait de la bonne Worcestershire sauce produite par la maison Lea & Perrins.

rougail
Rougail fantoche en voie de formation


D’autre part, en simultané, j’avais sorti mes saucisses du congélateur et j’avais commencé leur décongélation complétée d’un peu de brunissement sur une poêle  à feu doux.

rougail
Le dégel


Au bout d’une dizaine de minutes, je peux désormais les trancher en tronçons.

saucisse de Toulouse, Picard
Il faut savoir trancher


Je  plonge ces morceaux dans la casserole dont j’ai retiré le bouquet garni et la feuille de laurier.  Comme je m‘aperçois que son contenu est presque sans liquide, je complète d’un verre d’eau, car les saucisses doivent encore cuire une vingtaine de minutes. Puis me vient une idée : souvent, dans un vrai rougail réunionnais les saucisses sont fumées : j’arrose donc mes pseudo saucisses de Toulouse insipides de quelques gouttes de Smokey chipotle.

J’allume le four, le règle à 130°C. J’y enfourne le plat dans lequel je viens de verser le reste N°3 et que j’ai enfermé sous une feuille d’aluminium.
Les vingt minutes sont passées, je vérifie la réduction et la bonne cuisson des saucisses. Encore une minute à découvert, et la consistance sera bonne…
Ce délai me permets de sortir le plat du four, d’enlever la feuille d’aluminium et de creuser lau milieu du riz afin de créer un emplacement où verser mon rougail fantoche.
Ce qui est fait dans les secondes qui suivent… J’arrose du jus d’un demi citron vert, pose un petit quartier de ce même citron, dispose des volutes de persil.
Ces restes n’ont plus l’air de restes.
Nous pouvons passer à table et manger ce plat avec appétit.

rougail, Toulouse, Picard
R2+R3+R4 


Il n’y aura pas de reste N°5...

mercredi 13 septembre 2017

Du saumon et du jaune

Remercions le progrès ! Jadis un saumon parti d’Ecosse eût eu beaucoup de mal  pour quitter l’Ecosse, emprunter la Mer du Nord et la Manche, remonter la Seine puis la Bièvre afin de parvenir tout amaigri à deux pas de chez moi (j’exclue toute arrivée à la Pièce d’eau des Suisses, le bond nécessaire pour atteindre cet espace aquatique étant hors de portée du plus sportif des saumons, le Label Rouge étant quand même moins sélectif que la Médaille d’Or de saut en longueur aux Jeux Olympiques). De toute façon, n’étant pas francilien de fraie et de naissance, il eût été incapable de trouver son chemin.
Alors qu’en notre période bénie des dieux  il lui a suffi d’engins motorisés et d’un GPS pour se présenter frais comme un gardon en plein centre de ma ville.
Nous vivons une époque formidable…

Ça c'est bien vrai !

Mal lui en a pris cependant d’effectuer ce périple. Car la conclusion en fut un passage dans ma poêle.
Salé quelques minutes avant, et la face chair saupoudrée de cinq-épices. Cuisson à l’unilatérale avec juste un retournement de quelques secondes.

saumon, label rouge, Ecosse
Saumon écossais

Ce saumon ne sut que dans l’assiette ce qu’il y avait caché à l'intérieur de la cocotte bleue sortie du four posée à ses côtés : un riz long nacré dans l’huile d’olive avec des brins de thym et de sarriette, parsemé d’une bonne cuillerée de curry, arrosé du double de son volume de bouillon de crustacés Ariake et enfourné 20 minutes à 160°C.

riz, curry
Mon curry chez les Françaises

dimanche 10 septembre 2017

Des lignes sur la friture...




L’araignée et l’éperlan


L’épeire lentement tisse la toile.
« Un filet ! Ah, quoi ! » bondit l’éperlan.
Un fil laid…  « À quoi bon ? » dit l’éperlan.
L’éperlan te ment : tisse la toile !


Moralité   :
La rime ne paie pas.





Il était prévu de dîner avec les restes du sac d’os.
Mais voilà, il y avait l’étal du poissonnier. Alors le programme a changé. Nous avons troqué le sac d’os contre un sac d’arêtes des petits éperlans resplendissants de fraîcheur. Quand ils sont entrés dans la cuisine, c’est l’océan qui a déferlé entre ces murs - tout un parfum…

éperlans, friture
C'est marée basse ?

 
Un seul regret, ce beau produit aurait mérité une huile neuve pour sa cuisson, et non celle déjà utilisée pour deux ou trois fournées de frites dont j'ai dû me contenter.
Mais finalement la friture n’eut pas pour autant des relents de graillon. L’huile s’est effacée derrière les embruns.
Alléluia !

J’ai mis les éperlans avec un peu de farine dans un sachet, et j’ai secoué, puis j’ai vidé sur une passoire, resecoué pour faire tomber l’excédent  de farine, et j’ai versé dans le panier de la friteuse.

éperlans, farine
Pourquoi qu'on nous a mis en prison ?

Quelques brefs bains dans l’huile à 180°C, et la friture est devenue croustillante et dorée.

friture, éperlans
Eh oui, vous êtes frits, mes amis !

Sel, persil ciselé et quartiers de citron.
Le plat simplement posé sur la table et les doigts qui vont à la pêche aux éperlans…


friture, éperlans, citrons
Une bonne petite friture






vendredi 8 septembre 2017

Bones

Naguère - ou plutôt jadis… -  après être tombé non pas sur un os mais carrément sur le sac d’os – ou plutôt sa recette… - j’avais émis le projet de réaliser ce plat lozérois.
Malheureusement le souvenir de la réalisation d’un estomac farci à l’alsacienne m’a poussé à différer, pour ne pas dire renoncer. Je n’avais pas oublié la galère afin de me procurer un estomac de porc, ni la laborieuse entreprise que fut son raclage et son nettoiement. Et tout ça pour me retrouver finalement avec un contenant difficilement utilisable, car trop ouvert par l’éleveur-vendeur…
Mais l’envie de déguster un tel plat trottait toujours dans ma tête, et j’ai profité d’une commande de produits de l’Aubrac pour me procurer un tel sac déjà tout préparé : le pastre.
C’est ainsi qu’il y a quelques jours un livreur est venu sonner à ma porte : le sac d’os était là.
Le surlendemain, de tôt matin, je le sors de son papier protecteur. Bien appétissant sous ses épices et sa fleur duvetée par endroit, avec ses os tendant la peau dans une vaine tentative d’échappement – je me suis revu après ma rupture de ligament acromio-claviculaire…

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Pastre


Mais il faut être patient : pas question de déguster ce pastre au repas de midi. Il devra tremper dans de l’eau fraiche jusqu’en milieu d’après-midi. Je le plonge dans une bassine dont je change l’eau sous le robinet toutes les demi-heures.
En début d’après-midi je réalise un bouillon : carotte, poireau, branche de céleri, laurier, thym, sarriette, poivre.

bouillon, pastre
Oui, ça va bouillir

Il est 16h30, il est grand temps de plonger le pastre dans le bouillon dont je viens de relancer l’ébullition après en avoir retiré les légumes sacrifiés pour sa confection. Il restera dans ce bain frémissant environ un couple d’heures durant lesquelles je taille les légumes de cette sorte de potée (chou frisé, poireau, carotte, navet, panais) et j'épluche les pommes de terre.


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Pastre prenant un bouillon


Ce délai passé, je découpe une courade, saucisse contenant du cœur et du poumon de porc, qui avait bien voulu tenir compagnie à mon sac d’os dans sa montée vers l’Île de France.

saucisse, courade, Aubrac
Saucisse des cousins, alias courade


Je plonge ces morceaux dans le bouillon à côté du sac, puis un quart d’heure plus tard les tronçons de carotte ainsi que les quartiers de chou.  Encore une dizaine de minutes, et arrivent le navet et le panais.

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Tout y est sauf les pommes de terre


Cinq minutes plus tard, ce sont les pommes de terre qui assurent la clôture de ce festival de plongeons.
Au bout d’un quart d’heure, je pique avec la pointe de mon couteau. Les patates sont cuites, dirais-je si mon langage n’était pas aussi châtié… Les autres légumes itou.
Je puis donc disposer sur le plat.

sac d'os,  courade
On dirait presque un haggis...


Et sur la table, je tranche le sac. Que d’os, que d’os !

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Je l'ai éventré !


En tout cas, ça sent fichtrement bon, et l’on se régale des morceaux posés dans l’assiette à la bonne franquette.

pastre
Des échantillons


Pour accompagner, une bouteille de Marcillac.

vin, Marcillac
Marcillac


Bien que très bon, vin un peu décevant pour moi, car je ne trouve que très édulcorés le parfum fruité si caractéristique et la couleur d’un violet presque noir qui me réjouissaient le palais et l’œil avec le Marcillac que j’achetais il y a bien longtemps chez mon Auvergnat du quartier Mouffetard. Pas étonnant, car le cépage Mansois y est coupé de cépage Cabernet Sauvignon…

Le début des haricots

La belle jardinière, offusquée de ma mise en exergue de haricots parcheminés, qualificatif qu'elle nie avec vigueur, et désolée de la mise en cause d'une production qu'elle a maintes fois arrosée avec eau du puits et amour, me demande de publier un rectificatif . Elle conteste aussi le fait qu'il s'agisse de la fin des haricots, puisqu'une seule rangée et une unique variété est concernée, et qu'elle en a d'autres en son catalogue.

J'obtempère bien volontiers.
En effet je reconnais que ces mange-tout (enfin presque...) étaient plus proches du papyrus que du parchemin.
Et surtout le haricot est mort, vive le haricot. Après le règne d'Oxinel Ier commence celui de Crockett II.

Hier soir nous nous sommes régalés, la belle jardinière et moi, d'une poêlée de ces haricots, cueillis bien fins.
J'y avais ajouté, outre force beurre, le parfum de feuilles d'estragon.



haricots, Crockett, cuisson
Haricot bouillu, haricot goûtu


haricots, Crocket, poêle, beurre, estragon
Du beurre dans les haricots