samedi 17 juin 2017

Les vaillantes petites cueilleuses

J'avais pourtant été clair...
"Je veux bien vous laisser cueillir des cerises. Mais surtout faites le avec délicatesse !"

Las... J'aurais dû m'en douter, avec les garnementes que sont mes petites-filles, voici le résultat :


cerises, cerisier
Krack de juin 2017

Pas de doute, elles ont tiré trop fort.
J'avais entendu au loin glapir "Douze d'un coup !".
Bon, c'est vrai, c'était l'arbre de la tentation.



cerises
Tentation 

Pauvre excuse ! Les coupables seront privées de clafoutis. Non mais !

mercredi 14 juin 2017

La fille de la Loire et l'enfant du Marais

Eh bien ça y est, j'ai enfin pu déguster la matelote d'anguille - réchauffée non le lendemain, mais le surlendemain.


rillons, anguille, matelote
Matelote au rillon
Heureuse surprise, le rillon ne fut pas qu'un remplaçant de fortune des lardons, bien au contraire. Pour ma part, je trouve qu'il apporte un goût très plaisant, et sa texture un peu fondante s'équilibre bien avec celle de l'anguille.
J'ai accompagné la matelote des mêmes pommes de terre dont je m'étais déjà régalé sautées, en les faisant cuire au four enveloppées de papier d'aluminium. Toujours aussi bonnes !



Le dépiautage de la bête m'a renvoyé près de deux ans en arrière, en une journés de début d'automne où j'avais pratiqué le même sport. J'ai retrouvé le texte que la préparation de la matelote d'alors m'avait inspiré...

 

L'ENFANT DU MARAIS

 

Quand Emilie l’Anguille fut plaquée par Paul le Poulpe, le monde s’écroula autour d’elle, et elle partit à la dérive.
Elle revint vers son marais natal, où un ignoble maraichin profita de sa détresse ; elle devint entraîneuse dans un rade à matelot(e)s. Puis un jour, enivré par l’abus de bernache, il la menaça de son eustache :
« Alors, ma belle, tu sais bien te tortiller ! Fais-nous donc un petit striptease… ».
Les compagnons de beuverie beuglèrent à qui mieux mieux :
« À poil l’anguille, à poil ! »
La malheureuse dut s’exécuter. Tremblante, elle enleva le haut.


Emilie enleve le haut


Arrivée à la taille, elle tenta de résister, se voila le visage.



Emilie se voile le visage

Mais les huées fusèrent, les surins furent brandis :
« Enlève tout, enlève tout !!! »
Elle dut s’exécuter, et ses pauvres oripeaux jonchèrent le pavé de marbre.

 
Emilie jolie

Un peu plus tard, on découvrit son corps ensanglanté, privé de ses viscères. On pensa à Jack the Ripper, il ne sévissait plus à Londres, peut-être avait-il délaissé le smog de la Tamise pour les brumes du marais ? Aussi fit-on venir un médecin légiste d’Angleterre, le docteur Jekyll.
On retrouva dans la morgue le corps d’Emilie l’Anguille sauvagement découpé en tronçons
.


La malle sanglante


Le docteur avait disparu ; demeuraient, tracés en lettre de sang, ces mots : Mr Hyde m’a tué.


 

 

Je me raconte cette triste histoire du destin d’un enfant du marais en préparant la bête. Mais maintenant il me faut passer aux choses sérieuses. Qu’elle ne soit pas morte pour rien, qu’elle revive dans un plat savoureux.

Je fais suer une garniture aromatique d’échalote grise, carotte, céleri-branche dans une noix de beurre doux fermier. J’y ajoute une couenne de poitrine fumée,une gousse d'ail écrasée, quelques grains de poivre de la Jamaïque et une queue de persil, arrose des deux tiers d’une bouteille de vin de Chinon. Je fais réduire d’un tiers à petit feu.

Puis je fais dorer les tronçons d’anguille en compagnie du quart d’une tranche épaisse de jambon de Vendée découpée façon lardons, singe d’une demi-cuillérée de farine, et verse la réduction de Chinon à travers un chinois. Un bouquet constitué d’une feuille verte de poireau cernant une feuille de laurier, une feuille de céleri, un brin de thym, deux ou trois queues de persil va donner son arôme.

Et c’est parti pour une demi-heure de cuisson frémissante. Après le premier quart d’heure, j’introduis une dizaine de petits champignons de Paris poussés dans le Saumurois.

Pendant ce temps, je prends quatre petites pommes miniatures ramassées au pied d’un pommier sauvage dans la forêt. Elles sont aigrelettes à souhait. J’en partage une paire en deux et en enlève les membranes et les pépins. Je creuse le fond des deux pommelettes restantes au couteau d’office afin d’en ôter aussi le cœur. Je place le tout au fond d’une petite casserole, un peu d’eau à effleurement, une noix de beurre, une pincée de sel et une pincée de sucre afin de les glacer. J’y adjoins deux petites échalotes violettes entières et une autre tranchée en son axe, qui subiront le même sort. Je coiffe d’un disque de papier sulfurisé percé en son centre, et laisse s’évaporer à petit feu.

La demi-heure est terminée je sors les tronçons d’anguille et en dispose cinq sur chaque assiette chaude. J’enlève le bouquet garni. J’ajoute un carré de chocolat noir d’Ouganda à 80% de cacao à la sauce, poursuit la réduction à feu vif en ajoutant un léger trait d’Arôme Patrelle. Quand la sauce a atteint une bonne consistance, je la vanne avec une petite noix de beurre demi-sel.

Je prends une louche et partage la sauce entre les deux assiettes.
Je finis de glacer pommes et échalotes, et les dispose sur les assiettes à l’aide d’une pince.
J’ai fait blondir lentement dans une grosse noix de beurre trois tranches de baguette tradition que j’avais divisées en petits morceaux. Je parsème de ce croustillant savoureux.
Un tour de moulin de poivre noir, du persil ciselé : l’on peut passer à table. Quelques pommes de terre à l’anglaise servies à part permettront de saucer d’une fourchette gourmande.


Matelote septembre 2015
 
 
 
 
Reniflons de plus près...

 

Je suis content. L’accord entre les pommes sauvages et la matelote était parfait.
Une tuerie, dirais-je, si je ne craignais de me montrer trop désinvolte envers la mémoire de la pauvre Emilie…

 

mardi 13 juin 2017

Le secret de l'espadon

L'espadon est un menteur. J'aurais du m'en douter à la longueur de son nez !
Il m'a fait croire qu'il était cuit alors qu'il ne l'était pas.
Résultat, j'ai dû le reposer sur le gril....

En revanche, les asperges vertes se sont montrées bonnes filles, un bref glaçage dans une poêle a suffi pour les attendrir. L'artichaut dont j'ai fendu le coeur ne m'en a pas tenu rancune. Un peu al dente, mais c'est ainsi que je l'entendais, et un trait de balsamique blanc lui a fourni un parfumé aftershave (j'avoue qu'il s'agissait plus d'une épilation que d'un rasage, m'enfin...).

Donc, en dépit de la mauvaise volonté du spadassin marin, une bonne petite assiette:


espadon, artichaut, asperges verts
Espadon, asperges vertes, artichaut

Comment avoir à la fois la cerise et du pot...

Commencer par cueillir la cerise.

cerises, panier à salade
Panier de cerises


Equeuter et  dénoyauter, puis plonger dans une bassine à confiture.

cerises, bassine à confiture
Dans la bassine !


Ajouter le sucre.


cerises, confiture
Enfoui dans le sucre


Porter à ébullition et écumer, écumer...

cerises, confitures
Et ça cuit...
 
 
Quand la bonne consistance est atteinte, verser dans le pot.

confiture de cerises
Une affaire louche...
 
 
On a enfin la cerise et le pot !
 
 
confiture, cerise.
Quel pot !
 
 
 
 
 
 
 
 

lundi 12 juin 2017

Anguille sous roche


Il y a bien anguille sous roche...


anguille de Loire, ammonite, Montreuil-Bellay



Anguille qui, avant de sortir son nez de sous la roche dont l'avait coiffée je ne sais quel deus ex machina, frétillait gaillardement au milieu de ses compagnes tout aussi vivaces dans la caisse posée sur un tréteau par le vendeur d'anguilles du marché de Neuville-de-Poitou...



Il fallait voir comme ce vieux briscard des anguillidés a fait passer l'animal en un clin d'oeil de vie à trépas en la saisissant par la queue, en frappant sa tête sur le macadam pour l'estourbir et en détruisant son centre nerveux d'un adroit coup de pince !

Cette anguille avait quitté l'eau de la Loire pour finir dans le vin... Vin de Saumur en l'occurence. Mais j'anticipe...

Avant de passer à cet étape, je me suis offert un petit en-cas retour de marché en savourant une petite soeur grillée de la bête à même son papier d'emballage.
Vla l'résultat !



anguille grillée
De beaux restes

Un suave boudin que j'ai vu sortir de son eau de cuisson en guise de dessert, et, zou, au travail !


Dépouiller le bestiau n'est pas une mince affaire ! Je sors de ce combat vanné et ensanglanté (enfin presque, juste une petite tache sur la chemise, ce n'est quand même pas comme une lamproie...).
Je signale aux tanneurs ou autres mégissiers qui liraient ce blog que je tiens une magnifique peau à leur disposition.
Mais j'ai le plaisir de découvrir les magnifiques structures incluses dans la nageoire. Tours Eiffel, girafes, dinosaures, danseuses...



anguille préparation
Je ne manque pas de peau. L'anguille, si !
Je découpe des tronçons que je fais tremper dans de l'eau vinaigrée pendant que je prépare trois tronçons de blancs de petits poireaux, sept ou huit échalotes nouvelles étonnement lacrymogènes pour moi qui suis peu sensible à ce type d'agression, cinq petits oignons blancs nouveaux et deux gousses d'ail, lui aussi nouveau.
Je commence à faire réduire une bouteille de vin rouge du Saumurois avec un bouquet garni de laurier, thym, romarin enfermés entre des feuilles verts de poireau.
Je fais dorer les tronçons d'anguille bien essuyés et assaisonnés sur une noix de beurre et une cuillerée d'huile d'arachide dans  un sautoir, j'ajoute poireau, échalote, oignon, ail, je sale, et quand tout ce petit monde a fondu, je singe. Quand la farine est cuite, je verse le vin rouge et laisse cuire une quinzaine de minutes à petit feu en ajoutant un clou de girofle et une pincée de quatre-épices
Je taille des champignons de Paris bruns (cultivés en Charente-Maritime...) en quartiers et les fais revenir dans une poêle, toujours dans un mélange beurre-huile d'arachide.
Zut, je n'ai pas de lardons ! Qu'à cela ne tienne, l'anguille fut pêchée dans la Loire, elle ne verra donc aucun inconvénient à ce que je les remplace par les tranches d'un rillon que je mets à dorer dans une autre poêle...
Je jette champignons et ersatz de lardon dans le plat ainsi que quelques grains de poivre sauvage de Voatsiperifery.
Je laisse encore frissonner quelques minutes puis j'éteins le gaz.

La sauce réduite semble onctueuse, et ça sent très bon...


anguille matelote
Matelote d'anguille de Loire au vin du Saumurois


Je laisse refroidir, je réserverai dans un récipient au frais, prévoyant de réchauffer le lendemain.
Vivement demain !

Le bonheur est dans le près



Le bonheur est dans le près !
Encore que d'aucuns prétendent que le bonheur est dans le Loing....



Sisley
Près du Loing



Près de la Vendée, ce qui me permet de trouver au marché des sardines de Saint-Gilles-Croix-de-Vie quasi frétillantes.
Je me suis empressé de les faire griller sur la braise, y adjoignant une pette tranche de thon blanc (il  faut bien rentabiliser la combustion !)




sardines, thon blanc
Sardines tournant le dos à un thon
 
 
sardine, thon, bourrache
Sardines faisant ami ami avec le thon
Près de mes pieds de bourrache, ce qui permet aux plats méritants d'arborer cette fleur sur leur plastron.




Près des champs, ce qui me permet de trouver au marché des pommes de terre nouvelles d'un maraîcher local arrachées la veille.
Elles m'avaient semblé un peu grosses, et la variété n'était pas indiquée. J'avais tort de me méfier. Un pur régal, elles étaient encore meilleures que les bonnottes.
Je me suis contenté de les gratter afin d'éliminer les squames, puis, une fois essuyées et les plus grosses tranchées en deux, de les poser au fond d'un sautoir bombé dans du beurre (Poitou-Charentes bien sûr !) mis à mousser sur un trait d'huile d'olive. Une vingtaine de minute à feu doux sous un couvercle en agitant de temps à autre, puis un petit coup à feu vif pour parfaire la dorure et rendre la surface un peu croustillante, une pincée de fleur de sel, et ces pommes de terre toutes simples ont accompagné à merveille une tranche de rumsteak passée rapidement à la poêle.




pommes de terre nouvelle, rumsteak, parthenaise
Pommes de terre nouvelles, bonne nouvelle


Près du lit pour se payer une bonne sieste après ce bon repas...

D'un jardin à l'autre

J'ai abandonné -provisoirement, s'entend- le jardin de ville qui venait de me fournir une belle récolte de petits pois pour le jardin de campagne qui m'a accueilli avec une magnifique collection de mauvaises herbes...


orties, mauvaises hrbes
Les malfaisantes



Heureusement, pas seulement, car le cerisier croule sous les fruits.





cerises
Vieux croulant




cerises
Confiture en puissance



Un projet de confiture est en cours d'élaboration.



Mais revenons à mes petits pois urbains.
Ils ont permis de valoriser une opération vide-placard par une touche de fraîcheur bienvenue.



pâtes, escalope, ventrèche, petits pois
Escalopes ventrèche  et petits pois du jardin !



De quoi se régaler avec deux escalopes de veau, mais aussi deux tranches de ventrèche roulée qui trainaient leur ennui au fond du frigo, se demandant pourquoi elles avaient été dédaignées, le reste d'un paquet de pâtes alsaciennes dont je me demandais pourquoi je les avais dédaignées, un morceau de pecorino s'exclamant "perché sono qui ? mi ha si dimenticato ?", requête à laquelle j'étais resté sourd car je ne parle pas un mot d'italien, et enfin deux gousses d'ail nouveau dernières rescapées d'une soustraction progressive.

Ma recette -si l'on peut parler de recette... :
Je fais revenir sur un trait d'huile d'olive les tranches de ventrèche, puis dépose les escalopes que je fais dorer rapidement sur les deux faces dans la graisse obtenue.
J'ajoute un demi-verre d'eau et fais rouler les petits pois à côté de la viande dans la poêle -je n'oublie pas de leur adjoindre les gousses d'ail.
Une fois l'eau évaporée, je peux verser les pâtes en légère sous-cuisson. Un soupçon de balsamique blanc qui ajoute des notes parfumées et sucrées, puis je tente avec plus ou moins de bonheur de regrouper les pâtes vers le centre et de dégager escalopes, tranches de ventrèche et petits pois  -ambition plus esthètique que gastronomique...
J'émiette le pecorino sur la surface du plat.
Je termine par un soupçon de piment d'Espelette.

Eh ben, le résultat n'est pas si mal du tout !