samedi 3 juin 2017

Oeil pour oeil

Il a fallu avoir à l'œil le poissonnier. La dernière fois il a suffi d'une minute d'inattention pour qu'il écaille et surtout qu'il vide en jetant à la poubelle leurs foies de beaux rougets sans défenses.
J'avais donc été fort déçu en les sortant du papier qui les enveloppait dans le sac en plastique bleu...

En fait, pour les rougets de très petite taille, je préfère les traiter à l'état brut comme une petite friture, pour ceux de petite taille les écailler mais ne pas les vider -tout comme les sardines-, pour ceux de bonne taille, les vider en  réservant les foies mais en conservant les écailles qui formeront une croute protectrice.
Restent les vraiment gros où je n'exclue pas de lever les filets, réservant les foies pour une sauce.
Quant aux entre-deux, les rougets moyens, tout dépend de l'humeur du moment...

Cette fois-ci, j'ai bien mes deux rougets vidés simplement de leurs entrailles, et les foies sont bien présents. Je me contente de les saler, d'y introduire par dessus les foies thym, laurier et quelques grains de poivre, et de les poser sur un gril barbouillé d'un soupçon d'huile d'olive.

rougets foies
Rougets sur le gril

La cuisson se poursuit convenablement, je peux retourner les bestiaux....

rougets foies
Rougets retournés

Je me penche au-dessus du gril afin de jeter un œil vigilant sur l'avancée de la cuisson, quand j'entends un claquement sec voisin de celui d'un petit pistolet à air, et un petit projectile blanc me saute à la figure.
C'est un rouget qui lui aussi a voulu jeter un œil. Un œil méchant ! Dieu merci, il n'a pas atteint le mien.
Ah, la vilaine bête...

rouget
Coup d'œil



Cette manœuvre intimidatrice n'a pas porté fruit. Le tireur compulsif finit quand même dans mon assiette. Il me suffit de soulever la croûte formée par la peau de la pointe du couteau, et une bonne chair cuite à point comme dans une papillote apparaît. Sous les herbes, un délicieux foie imprégné de leurs parfums. Pas de sauce, juste un petit tour de moulin de poivre de Penja (on sait que je suis piperomane...), ne troublons pas trop la délicate subtilité du produit, respect comme on dit dans les banlieues !
Ah, la bonne bête...


rouget foie
Rouget assiette


Après, toujours dans la simplicité, des épinards dans lesquels je mets du beurre, puisque je le peux, alors autant en profiter...
Et comme je n'aime pas faire la queue, je la défais.

épinards queues
Ne pas  faire la queue


Phénomène étrange, ne pas faire la queue m'a pris du temps...
Je peux désormais faire tomber les feuilles - j'aurai ainsi l'épinard sans l'eau.


épinards
Plat d'épinards


Le plat arrive sur la table. Après le rouge, on est passé au vert. Parfait, l'épinard est pressé...




jeudi 1 juin 2017

Ceci n'est pas ma cuisse


Ceci est mon plat :


canard confit, mousserons, pommes à l'ail
Ceci est mon plat


Mais ceci n'est pas ma cuisse : je n'ai pas élevé le canard  dont elle provient.
Pas plus que je ne l'ai confite.
Je ne suis pas allé en forêt rechercher les mousserons arrivés frais sur mon plan de travail.
Je n'ai pas déterré les pommes de terre -pour une bonne raison, je ne les avaient pas cultivées.
Je n'ai pas arraché l'ail nouveau, pourtant encore si juteux.
Je ne me suis pas rendu au jardin afin d'y cueillir le bouquet de persil que je n'y ai pas fait pousser.
Je ne suis pas parti à Kâmpôt participer à la récolte du poivre.

Bref, rien de ce qui figure dans l'assiette n'est de moi !
Qu'ai-je donc apporté?

J'imagine les bonnes âmes, sensibles à mon désarroi, me ressortir l'antienne habituelle :
"Tu y as mis de l'amour...."

Eh bien non, je ne suis pas comme ces chefs médiatisés qui exhibent à qui mieux mieux leur amour plein de poêles !
L'amour ne se fait pas frire ou braiser...


Peut-être simplement ai-je ajouté au travail de tous ceux qui ont contribué en amont à la confection de ce plat mon propre travail.
Ce n'est pas de l'amour qu'il faut ajouter dans sa cuisine, c'est de la sueur !

Elles ont mérité leurs bonnottes

Oui,  ces gambas snackées rapidement sur la plancha avec un trait d'huile d'olive, et parfumées ensuite d'une persillade méritaient un accompagnement simple, mais à la hauteur de leur saveur.

Les bonnottes de l'île de Noirmoutier ont tenu ce rôle à merveille. Grattées légèrement à la brosse  puis soigneusement frottées et essuyées au torchon pour les débarrasser des lambeaux de.peau qui peuvent gâter le goût en cramant à la cuisson, elles ont d'abord été saisies à feu vif sur toutes leurs faces dans une cuillérée d'huile d'olive et une grosse noix de beurre (le Charente-Poitou s'imposait !), puis, feu baissé et couvercle posé sur la poêle, elles ont baigné dans  leur propre vapeur une quinzaine de minutes. Au moment de servir, il a suffi de découvrir et de donner un dernier coup de chaleur afin de rendre la peau légèrement croustillante.
Si l'on oublie le marketing éhonté qui accompagne l'apparition de ces tubercules sur les étals, il faut bien reconnaître que cette variété et sans doute aussi le support de culture aboutissent à un produit exceptionnel.
La cuisine embaumait du suave parfum dégagé par la cuisson...



gambas bonnottes Noirmoutier plancha

Les gambas et leur bonnottes
Hélas, je n'ai pas réussi à me procurer la bouteille de vin blanc de Pissotte que j'aurais eu plaisir à boire pour ce repas...

Et je dois encore me plaindre du livreur Intraflora qui, une fois de plus, m'a livré un bouquet minimaliste..

mardi 30 mai 2017

Les chasses du Comte Orloff

Le comte Orloff avait une grosse envie  de viande.

chasse du Comte Zaroff
Le vilain comte


Il serait bien parti à la chasse, et il me tirait par la manche. Son projet était de se payer un des visiteurs lâchés par un quelconque accompagnateur touristique dans le parc du château royal, plutôt que de rester échoué sur les rivages de l’îlot viande des Halles.
Sur le fond, je ne lui aurais pas donné tort, mais voilà, gastronomiquement parlant, je suis peu porté vers la viande humaine.

Alors j’ai développé des trésors de diplomatie afin de le ramener à la raison, utilisant les armes les plus sournoises de la dialectique.
« Comte, vous  vénérez le Général...
-Certes, mais..
-Le Général a dit que les Français étaient des veaux.  Le fin algébriste que vous êtes ne peut nier que si  Français = veau, la proposition veau = Français est aussi vraie. Donc si  vous avez dans votre assiette du veau, vous avez du Français. Le Français, ce qui se fait de mieux, le E dans le classement EUROP ! Alors..
-Je réfuterai votre raisonnement en répliquant que les touristes ne sont pas des Français !
-Tss, tss, dans la lunette de votre carabine, vous eussiez tout juste pu identifier un Bavarois en culotte de peau sous son bitos à plume, une jeune Japonaise avec sa jupette bleu marine, son chemisier blanc et son teint jaune, un Américain crachant son chewing-gum sous l’ombre de son stenton, tiré par son épouse dont le short rose parvient avec peine à contenir le gros fessier, un Russe avec la liasse de dollars dépassant de sa poche, un jeune Roumain qui louche vers cette poche... Et encore sans certitude : le Français vagabonde aussi beaucoup dans ces sous-bois et se démarque peu du touriste tout-venant, tout comme il arrive que le touriste étranger parvienne à se donner une apparence française, croyez moi, il y en a même qui se camouflent par le truchement d'une baguette et d'un béret…
En cette époque de mondialisation, vous n’allez tout de même pas faire la fine bouche !
Croyez-moi, le veau fera l’affaire.
-Mais moi, je veux du sanguinolent…
-Qu’à cela ne tienne, on rajoutera un peu de Bacon.

Francis Bacon
Du Bacon

-Mais…
-Il n’y a pas de mais ! Tenez, comte, je serai bon prince.  Afin d’honorer votre titre, je vais ajouter un comté. Ce ne sera pas, j’en conviens, le comté d’Orloff, cependant, beau, fort comme vous l’êtes, vous allez vous l’approprier… »

Je me suis fait trancher un rôti de veau, Orloff voulait que ça barde, et bien ça a bardé.
« Et voilà, comte. N’êtes-vous pas satisfait de votre trophée, crépiné comme un nouveau-né ?
-Boff… »
Jamais content, ce comte !

Arrivé, à la maison, j’offre  un petit verre de vin blanc avec une garniture aromatique en guise d’apéro à notre proie ligotée. Elle se plaît avec la cocotte et j’entends siffloter Ah ! Le petit vin blanc qu'on boit sous les tonnelles..
« Vous voyez, c’est un Français !
-Ben alors, pas un tout jeune ! Ce jeune veau est une vieille baderne… »
Jamais content, ce comte !
Le trophée d’Orloff est un peu parti, il est même parti au four  à 210 °C pour une dizaine de minutes.


veau Orloff
Trophée



Orloff, magnanime, propose de baisser la température à 180 °C. Il n’a pas tort.
Quarante minutes  plus tard,  nous pouvons  délivrer le trophée de ses liens.
Le comte s’empare de son Jagdmesser au manche de corne
Je ne puis m’empêcher d’ironiser :
« Heureusement que parfois ce sont des harpails que vous poursuivez. Encore que…»
Le comte me lance un regard peu amène. Et moi qui croyais la comtesse au-dessous de tout soupçon. Il est vrai que qui va à la chasse perd sa place….

En tout cas les parts sont belles.


veau Orloff
Orloff s'en paye une bonne tranche



Pour la sauce, j’ai fait cuire des spätzle. Le comte grommelle qu’il aurait préféré une kacha de sarrasin.
Jamais content, ce comte !

J’ai une grosse envie de chasser le comte Orloff …oui, de le chasser de chez moi !

dimanche 28 mai 2017

Des araignées sur le paillasson

Gloire à l'araignée !

En premier gloire à cet animal capable de tisser une toile de haute technologie, puis d'avoir la patience d'y assurer le guet afin de nous débarrasser de moult malfaisants. Je me suis d'ailleurs toujours demandé ce qui lui passait par la tête durant ces longues périodes consacrées à l'affut. Car après tout elle ne pouvait avoir à ses côtés la bouteille de pastis pour tuer le temps comme un vulgaire chasseur de palombe. Alors revoit-elle le corps poilu (et, quelle chance, garni de quelques œufs...) de la Musca domestica dodue qui fut son dernier repas ? Se projette-t-elle au contraire dans le futur, imaginant un gros taon agonisant en vrombissant, promesse d'un festin pantagruélique moyennant quelques dégâts facilement réparables ? Est-elle simplement concentrée, telle un sportif, genre Fabien Barthez attendant l'arrivée d'un ballon (enfin, je crois, car je ne suis pas un familier de la guerre des goals) ? Ce qui est plus probable, c'est qu'elle roupille tranquillement en attendant que le vibreur la réveille. Je n'ai jamais osé lui demander ce qu'il en était vraiment, de peur qu'elle prenne la mouche !


Mais aussi gloire à cette habitante des fonds marins qui nous procure une chair savoureuse, d'autant plus ferme et goûteuse si l'on gave ce sympathique majidé de protéines par le naufrage d'un paquebot géant, événement jubilatoire qui offre le double avantage de débarrasser des sites tels que Venise d'un polluant et de soulager les caisses de retraite.


Enfin gloire à ces araignées qui vont se nicher dans la cuisse des quadrupèdes.

L'araignée de bœuf bien sûr, un de mes steaks favoris, qui évoque pour moi le goût de mon enfance, car au gré des déménagements ma mère trouvait toujours un boucher qui lui réservait cette pièce délectable, comme cet artisan qui écrivait toujours à la craie sur l'ardoise de la devanture "Poullets de ferme", rien que pour le plaisir de répliquer à un client de passage qui lui faisait remarquer cette faute d'orthographe : " Comment, ils n'ont pas deux ailes mes poulets !". Pour les araignées, point d'ardoises, elles étaient cachées dans l'arrière boutique pour les clients favoris...

Et l'araignée de porc, ce morceau à la fois tendre et parfumé, que malheureusement le plus souvent les artisans présentent déjà baignant dans une marinade, je suppose pour une meilleure conservation mais aussi pour une présentation plus attractive, dans l'idée qu'ils se font, peut-être pas si fausse que ça, d'une ménagère timorée un peu dégoûtée par les branches plus ou moins tentaculaires engendrées par le parage, les veines de gras au milieu d'une chair un peu grisâtre... Pourtant, brutti ma buoni, comme disent les Italiens à propos de certains de leurs biscuits !

Aussi c'est avec un grand plaisir que j'ai vu arriver chez moi quelques unes de ces araignées porcines brutes de décoffrage, pardon, décuissage.
J'ai décidé de les servir avec des pommes paillasson et des navets et oignons nouveaux.

Pour débuter, j'ai peaufiné le parage des araignées et les ai partagées en morceaux sensiblement identiques.
Pour la sauce, j'ai fait réduire le jus de deux oranges avec une bonne cuillérée de balsamique blanc et une  petite cuillérée de balsamique traditionnel de Modène, y ajoutant trois ou quatre grammes de fécule, une pincée de 5 épices (anis vert, fenouil, coriandre, cannelle, clou de girofle) et une autre de piment d'Espelette. Et là  j'ai commis une erreur de débutant : si fort justement je n'ai pas salé avant réduction, j'ai voulu rectifier la couleur qui me semblait un peu terne en rajoutant du piment d'Espelette. Las, j'oubliais que celui que j'utilise actuellement est, pour une raison que j'ignore, grimpé beaucoup plus haut sur l'échelle de Scoville que ses frères qui restent bien souvent pas loin du niveau des pâquerettes.
Quand j'ai goûté le résultat avant de dresser, j'ai constaté que ma sauce manquait de rondeur, n'avait pas assez d'acidité, et surtout était très pimentée. D'urgence j'ai découpé quelques petits cubes de pulpe dans une tomate fraîche que fort heureusement j''avais sous la main, les ai ajoutés ainsi que deux pincées de sucre et un trait de jus de citron. Et, ô miracle, ça a fonctionné. J'oserai affirmer que la sauce était devenue plutôt bonne.
J'ai gratté deux petits navets nouveaux, enlevé la première peau de petits oignons blancs en conservant une partie de la queue, et j'ai classiquement fait glacer ces légumes dans un soupçon d'eau avec sucre, sel et beurre.
La réalisation des pommes paillasson m'a permis de liquider un petit stock de pommes de terre disparates qui une fois râpées ont fait bon ménage. Lavées, fortement essorées en tordant un torchon qui  les contenait, je n'ai plus eu qu'à tasser deux blocs dans une poêle antiadhésive recouverte d'une bonne couche d'huile d'arachide parfumée par une noix de beurre, le plus difficile ensuite étant de les retourner sans dommage.
Les araignées sont passées sur la bonne vieille poêle en acier culottée depuis des lustres.
La cuisson achevée, j'ai partagé entre deux assiettes, disposé sur chacune  un navet et cinq petits oignons et fait glisser un paillasson bien doré. J''ai versé la sauce dont je n'avais plus honte. Deux feuilles de roquette du jardin afin d'apporter une touche de verdure. Enfin couronner d'une touffe de piments cheveux d'ange de Tianjin  s'est imposé à moi comme une évidence, peut-être à cause de mon déboire espelettien...

Et voilà...



araignée de porc, navet, oignon nouveau, pommes paillasson

Araignées de porc paillasson n°1

oignons nouveaux ,navets nouveaux

Araignées de porc paillasson n°2



Nous avons pu essuyer nos lèvres barbouillées de sauce sur le paillasson...

vendredi 26 mai 2017

L'INCORPORATION, où l'on voit une omelette être réalisée sans E


Recette cuisinée à la fortune de l'Oulipot...

omelette, oeufs, sans S, Oulipo
Ceci n'est pas une omelette



Il souhaitait du nanan sans tracas, un plat bon mais prompt dans sa cuisson.

Non loin il y avait un rubicond marchand BOF façon Dutour qui lui fournit un pack garanti bio, vantant d’un ton jovial son produit : « Ils sont frais pondus nos cocos ! Frais nos cocos, frais ! ». Puis un sac où figurait un coq hautain, tyran du nichoir, vint couvrir l’achat ; la maison savait promouvoir du rural chic…


Son cabas à la main, il arriva pour midi à la maison…

Afin d’avoir un final moussu il aurait fallu d’abord qu’il clarifiât, puis qu’il montât trois blancs mis à part dans un bac.
Mais il n’a pas voulu, il a saisi un bol, il a rompu sur son bord un quatuor, chançards toujours intacts sortis du pack – un choc ayant puni un transport nonchalant par un bris fatal pour un duo d’occupants, tant pis pour lui, cuistot gourmand mais maladroit… -, il y a fait choir d’aussi luisants qu’avachis calots d’or baignant dans un blanc gluant, puis sans mollir il a battu tout ça d’un bras viril. Pour finir, du moins il croyait ça, il incorpora six noix d’un Isigny AOC au subtil parfum issu du sainfoin local.

Il alla au piano, alluma un gaz - qu'il poussa au maximum -, y plaça sa Tradition inox 24 cm, posa sur son fond un toujours plus gros bout d’Isigny qui lui parut odorant à souhait quand il passa du blond au roussi dans un jouissif chant du gras qui fond.
Il y vida son bol, maudissant son oubli : il aurait fallu qu’il assaisonnât - salant, poivrant, pourquoi pas muscadant - pour aboutir à un haut goût. Pas trop tard ! Il donna moult tours du moulin sur son futur plat avant la coagulation.
Il chassait loin du bord un magma d’un ton canari au parfum diffus qui aussitôt voulait toujours s’y blottir, flux ragoûtant dont au bout d’un instant il admit l’invasion. Combat aussi fictif qu’il fut vain ; car un rond parfait saisi au dos par la cuisson, mais miroitant d’un jus opalin sinuant par monts, par vaux, dans un sol mouvant aux confins brunis, ainsi imaginait-il l’attirant plat qu’il souhaitait voir surgir sous sa main.
Aussi la jubilation fut au bout du parcours !

Il plia un coin du rond fumant, inclina. La manipulation aboutit à un format oblong qu’il glissa sur un plat d’un blanc virginal. Il donna du brillant - un soupçon, sans abus.
Son chatoyant frichti arriva chaud, chacun admira.
« Plat sans chichis, mais bon plat » dit-il d’un air satisfait.
Satisfait, mais non fat pour autant…

mercredi 24 mai 2017

Clovis et Pompadour : le mariage


Il y a des moments où il faudrait savoir trancher...
Ainsi je me suis trouvé partagé entre une envie de linguine alle vongole et le désir de profiter de l'arrivée des pommes de terre nouvelles.
Tiraillé entre ces deux possibilités de savoureux repas, j'ai repoussé la solution de facilité qui eut été de plouffer : am, stram, gram, pic et pic et colégram ...ce sera toi !  En effet je me connais bien. Quel qu'en fût le résultat, je l'aurais contesté, ayant la ferme intention de ne pas me laisser manipuler sans réagir par le destin, tout en pensant que ce refus n'était que le volet symétrique de la soumission au bour et bour et ratatam. Pas plus avancé...
Mais voyant une pomme de terre choir du panier et  une autre sortir de son bain, nouveau Newton mâtiné d'Archimède, je me suis écrié : Eureka ! J'avais tranché le nœud gordien.

La décision était prise, j'allais réaliser des pommes de terre nouvelles avec des palourdes.


Ce fut le mariage non pas du siècle, mais des siècles :

CLOVIS ET POMPADOUR


J'ai procédé à la cérémonie. Alliance sans faille, le couple faisait bon ménage. Pas étonnant, elle était née Poisson...
Pour l'onction, point de chrême, mais une alliance d'huile d'olive et de beurre demi-sel.
En fin de cérémonie, un trait de balsamique afin de réveiller les mariés.
Voulant bien faire les choses, je leur ai fait livrer un bouquet. Hélas Intraflora fut au dessous de tout,
et la gerbe se résuma à une composition soliflore.



palourde pompadour
Mariage Clovis Pompadour




La vérité me force à dire que Clovis se monta insupportable. Pour son repas de mariage, il n'arrêta
pas de réclamer un vase de soissons. N'ayant que des mogettes sous la main, je prétextai que le vase était cassé. Il me jeta un regard mauvais en me lançant : "Je m'en souviendrai".
Enervé que j'étais, je lui jetai au visage une persillade. Il en fut bouche bée.
La jeune mariée à la chair tendre m'assura qu'elle préférait les persillades aux poissonnades.
Je n'en doutais point.