lundi 20 décembre 2021

JOYEUX L O E N !

 

C’est décidé, cette année mon Noël sera déstructuré.

Eh oui, pour moi la magie de Noël manque de sel.

Maggi de Noël


Aussi c’est avec une grande satisfaction que je vais narguer le ramoneur à la barbe moisie. Quoi de plus odieux que ce personnage ! Non seulement il trompe les moins éveillés de nos rejetons en leur faisant croire qu’il existe, utilisant de piteux subterfuges qui vont de l’embauche de clodos couperosés, dont fort heureusement - merci COVID - l’haleine empestant la vinasse va épargner cette année les têtes blondes qu’ils agrippent sur leurs genoux cagneux en dépit des cris et pleurs de désespoir, jusqu'à la subornation de parents pauvres invités aux agapes familiales moyennant une pitoyable prestation - la houppelande rouge de la honte et la barbouze en filasse habillant le malheureux d’un ridicule qui ne tuera point les appétits, sauf ceux des gens sensibles comme moi.

Ceci n’est cependant pas le pire, et un minimum de ruse permet d’échapper à ces chausse-trappes. Les dégâts collatéraux sont encore plus abominables.

Ah, ces grotesques villas SAM SUFFIPAS enguirlandées clignotant à tout va leurs couleurs agressives sous l’admiration des passants honnêtes et le ricanement des pervers nains de jardin… Ah, ces envahissants marchés de Noël qui défigurent nos plus belles cités dans l’exhibition d’un pseudo-artisanat mercantile - leurs vins chauds frelatés, j’ai envie de le cracher à la gueule des marchands du Temple… Ah, ces recyclages de décors à la pékinoise démontrant que qui veut faire l’ange fait le dragon dans de mortelles animations qui éblouissent les gogos par leurs criardes fulgurations.

Et ces réveillons à la festivité citoyenne et obligatoire…

Alors, je confirme, cette année, je nique le Daron Noël ! Je serai un précurseur. Le plat déstructuré, c’était tendance, eh bien je lance la festivité déstructurée. Un bout par ci, un bout par là…

 

En ce jour, premier acte : le plateau de fruits de mer. Qui d’ailleurs sera lui aussi déstructuré dans l’espace-temps (à suivre… ).

Je sers un plateau camarguais, que je baptiserai entre pourpre et violet. Il comprend le pourpre, des murex que j’ai fait cuire une vingtaine de minutes dans de l’eau très salée où je les ai jetés à froid après deux heures de dégorgement, et le violet, des fruits de mers éponymes que je tranche en deux pour en faire apparaître la juteuse chair jaune, regorgeant de saveurs iodées, protégée par une coriace cuirasse. Entre, des petits oursins qui m’envoient des embruns de Méditerranée quand je les décapite.

murex, violets, oursins

Plateau entre pourpre et violet


Je dispose aussi d’un kilo de palourdes blanches de Camargue - ouais, des émigrées de nième génération, il suffit de reluquer leur carte d’identité où figure l’inscription Ruditapes Philippinarum, mais très jolies sous leurs bariolages multiples et aussi bonnes que les palourdes grises autochtones.

J’en prélève la moitié que je dispose sur un autre plateau.

palourde de Camargue
De la palourde sur la planche

Citron et bol de mayonnaise posé sur la table, seau où gît une bouteille de Gros-Plant au milieu de glaçons (oui, un blanc de Cassis eut été plus en situation, mais je ne suis pas assez prévoyant… ) et nous pouvons nous exclamer 

« Joyeux L o e n ! ».

Pour le lendemain il me reste une livre de palourdes. Je les destine à un plat de pâtes - des fettuccine all’uovo - aux coquillages. Ma première intention était de cuisiner des tellines, mais des conditions climatiques défavorables à sa pêche ont fait tomber mon projet à l’eau où il a sombré dans un oubli forcé.

Je rince bien mes palourdes après un quart d’heure dans l’eau froide pour évacuer les souillures éventuelles. Je verse un petit verre de vin blanc sec - un reste de sauvignon de cuisine - dans une casserole. Je fais plonger un oignon partagé en quatre, deux feuilles de laurier, des brins de romarin, d’origan et de persil, une gousse d’ail, six baies de la Jamaïque, un clou de girofle. Je porte à ébullition, ajoute les palourdes. Je recouvre d’un couvercle, agite la casserole afin qu’aucun coquillage soit privé de la chaleur du fond. Rapidement, toutes les palourdes sont ouvertes, sauf deux que j’écarte sans pitié. Sur le feu voisin réglé au minimum se trouve une poêle dans laquelle j’ai versé deux cuillerées d’huile d’olive et une persillade obtenue en hachant cinq gousses d’ail et un petit bouquet de persil. Je complète du jus de la casserole d’ouverture des palourdes filtré à travers une passette à mailles fines. Je laisse réduire légèrement à feu doux pendant que la grande casserole emplie d’eau salée monte en température. J’en profite aussi pour extraire la chair de la majorité des coquilles, ne conservant que quelques palourdes entières que pour le visuel des assiettes.

Ça y est, l’eau s’est mise à bouillonner.

J’y plonge les pâtes que je retire au bout de deux minutes pour les transférer dans la poêle où elles poursuivent leur cuisson pour la minute manquante. Je retire du feu, ajoute la chair des palourdes et brasse.

fettuccine, palourdes
Palourdes empâtées

Passons au dressage ! Je dépose un monticule de fettuccine au creux de chaque assiette que j’agrémente d’un sextuor de palourdes non décortiquées décoratives. J’arrose d’un bon filet d’huile d’olive. Je termine par un tour de moulin de poivre noir de Penja.

fettuccine, palourdes
Pâtes à la plage


Nous pouvons nous exclamer « Joyeuses Pâtes ! »

mercredi 15 décembre 2021

Où je passe au vert

 

Une constatation : la présence du veau dans les deux recettes. Sans doute que si le vert dans les prés attire le veau, le veau dans les assiettes attire le vert.

 

Premier vert, celui des épinards qui ont accompagné un foie de veau. À la florentine donc…

Je commence par faire tomber les feuilles d’épinard. Je les brasse à l’aide d’une fourchette arborant une parfumante gousse d’ail de Lautrec au sein de la mousse d’une grosse noix de beurre demi-sel fondant dans la poêle. Eh oui, j’ai encore les moyens de mettre du beurre dans les épinards, ce ne sera peut-être plus le cas en janvier… Je réserve dans un coin du fourneau, le temps de m’occuper du foie.

Je fais subir un aller-retour de ce foie de veau, dont la découpe est à mi-chemin entre la tranche et le pavé, dans une poêle légèrement barbouillée d’huile d’olive placée sur un feu d’enfer - normal, Dante est florentin… Puis je baisse le feu, ajoute une noix de ce même goûteux beurre demi-sel prêt à se plier à tous mes caprices, et là il s’agit de nourrir la viande en la réchauffant doucement tout en préservant sa texture rosée, et non plus de violenter de malheureuses feuilles arrivées toutes fraîches de leur terre natale.

Je dépose les tranches de foie sur les assiettes. De Florence à Modène, il n’y a pas loin : je verse quelques cuillerées de vinaigre balsamique dans la poêle de cuisson du foie. J’y ajoute un trait de sauce Worcestershire (je sens que je m’éloigne de mon propos florentin… ) et quelques gouttes de Louisania Gold Pepper Sauce (toujours plus loin…).  Un retour de ma flamme dantesque me ramène vers le sujet. Elle émulsionne et réduit la sauce bistrée vers une consistance sirupeuse à un train d’enfer. À côté, je remets à température la tombée d’épinard qui retombe fumante sur les assiettes. Une noisette (soyons raisonnable… ) de beurre couronne chaque verte colline, je parsème d’une pincée de piment d’Espelette.

Il ne me reste plus qu’à arroser le foie de la sauce, qui en tranchant orne l’assiette d’une brune jaspure, et conclure par un tour de moulin de poivre noir.

Mon dieu, j’allais oublier le brin de persil contractuel ! Où avais-je la tête ? Voilà, c’est fait. 

Alors, à table !

Foie de veau à la florentine
Il était un foie...


 

Second vert, celui des pois cassés qui ont accompagné une andouillette à la fraise de veau. Lyonnaise donc…

La cuisson de ces légumineuses se révèle toujours délicate dans le dosage de l’eau nécessaire. Habituellement, je ne fais pas tremper les pois cassés, mais comme le sachet le prescrit, bête et discipliné, j’obtempère. Un bref trempage, à peine une demi-heure, il ne faut pas exagérer ! Une fois rincés, blanchis brièvement et versés dans leur casserole de cuisson, je noie les pois cassés - dont la vertitude s’était révélée sous l’action hydrique qui leur avait fait perdre leur jaunasserie poussiéreuse - sous une abondante couche d’eau. Abondante, mais plus précisément ? Après mûre réflexion, je verse à peu près le triple du volume occupé par les grains égouttés. Je leur adjoins six petites échalotes blanches du jardin, deux gousses d’ail, un brin de persil, une branchouillette de thym, une feuille de laurier un tantinet fripée et un sextuor de baies de la Jamaïque. Je laisse bloublouter à couvert sur une flamme moyenne pour une quarantaine de minutes. Par mesure de précaution, j’ai à côté une petite casserole d’eau chaude afin de remédier à une évaporation excessive. Précaution inutile : bien au contraire un excès d’eau me force à poursuivre une cuisson à découvert quelques minutes supplémentaires.

Quand il ne reste presque plus d’eau sous les pois cassés, je plonge ma girafe dévouée et efficace dans la casserole après avoir exfiltré mes échalotes pour les planquer dans une coupelle, puis évacué les condiments parfumeurs divers vers la poubelle. Las, la purée que je souhaitais ressemble plutôt à une crème… J’entreprends donc une opération assèchement, touillant en continu afin d’éviter que ça n’attache, ce qui me procure un prolongé supplice de l’ébouillantement par les geysers de vapeur jaillissant sous ma main Fini, le bloubloutage, on est passé au stade du plifplifage, nettement plus agressif. Mais j’en ai vu d’autres, et je sortirai de ce combat les mains rougies, mais victorieux. Une grosse noix du beurre demi-sel qu’ont bien voulu me laisser les épinards, un tour de moulin de poivre, une rectification d’assaisonnement, et je peux conserver au bain-marie une purée de pois cassés honorable.

Passons à l’andouillette lyonnaise, concoctée par la maison Sibilia. Je sais par expérience que la fraise de veau qu’elle contient doit être relevée par une sauce. Je me lance dans sa confection. Dans une petite casserole, je verse 20 cl de crème à 30 % de M.G.  J’ajoute quatre cuillerées de moutarde douce alsacienne pour les parfums, deux cuillerées de moutarde de Dijon pour la force et trois cuillerées de moutarde à l’ancienne pour la texture. Je mélange bien tout en faisant réduire à feu doux. J’ai obtenu la consistance nappante, mais l’apparence est bien pâlichonne. Une petite cuillerée de curcuma va redorer ma sauce et mon blason…

Il me faut maintenant griller les andouillettes. Je le fais sur le gril en fonte légèrement huilé. Bien que Sibilia prescrive ce mode de cuisson, il me semble qu’il ne soit pas optimal. Un passage au four arrosées de vin blanc donne à mes yeux - et surtout à ma bouche… - un résultat plus onctueux et plus chargé en saveurs. Ceci, je le constaterai plus tard... Pour le moment je dresse les assiettes : la purée de pois cassés contenue à l’aide d’un cercle jouxte les andouillettes sur lesquelles je verse la sauce blonde qui vient cascader sur la faïence bleue, les échalotes finissent leur pénible parcours en se prosternant au pied du pois retrouvé.

Et le sempiternel persil ? Eh bien une feuille en est tombée sur la tour de purée. Je la virerai à table d’un coup de fourchette. Sinon, une autre, ciselée quant à elle, prend des bains de sauce moutardée. 

Plus rien à ajouter ? Non ? 

Alors, à table !

andouillette de lyon, purée de pois cassés
Des pois et de la fraise


mercredi 8 décembre 2021

Où je suis dans le rouge

 

Premier rouge, celui de la sauce Nantua enrobant des quenelles de brochet. Un rouge tirant vers l’orangé après le passage sous le gril du four remplaçant la salamandre - « Je n’ai ma place que chez François Ier où chez les grands chefs ! ».


La prétentieuse ! Nutrisco et Extinguo, la belle affaire, je peux en dire autant… Ainsi, après avoir éteint le gaz, je vais me nourrir de ces savoureuses spécialités lyonnaises.

Le gaz m’avait servi à porter à frémissement l’eau froide dont j’avais recouvert les quenelles. Une fois celles-ci remontées à la surface, ce qui a pris quand même pas loin d’un quart d’heure (peut-être avais-je été trop prudent dans la gestion de la température ? ) j’ai poursuivi la trempette pour une dizaine de minutes avant de transférer dans un plat creux en fonte. Le gaz m’avait aussi permis de porte à ébullition la sauce Nantua dont j’avais recouvert le produit de ma pêche en eau chaude du brochet semoulé.

Un tour sous le gril, et zou, nutrisco, je dirai même plus, nutriscamus - je suis plus altruiste que la salamandre.

quenelles de brochet
On se passera de la salamandre


 

Second rouge, celui d’un chou, pour être plus précis d’un quart de chou passé à la mandoline pour le découper en lanières. Un rouge tirant vers le violacé après le passage dans un bain de vinaigre de Xérès. Il y est resté quatre heures avec brassages réguliers. « J’ai fait vinaigre pour l’attendrir ! » . * 


La prétentieuse ! Pauvre pseudo Belle de Cadix aigrie et engoncée désormais dans ta cotte de Maille, la seule qui t’aille, tu crois pouvoir attendrir, mais tu ne fais que ramollir…

Une fois ce chou coriace rendu plus agréable à la mâche, j’y ai ajouté une pomme un peu acide découpée en julienne et une petite poignée de cerneaux de noix vaguement concassés. Une pincée de fleur de sel, une autre de cannelle en poudre, deux cuillerées d’huile d’arachide, une autre d’huile de noix, et j’ai brassé afin de bien mélanger. Cette version crue du chou rouge à la flamande ( ou à l’alsacienne... ) a fourni une plaisante salade pour accompagner quelques charcutailles.

salade de choux rouges
Ceci n'est pas une salade à la noix, mais à la pomme et aux noix




samedi 4 décembre 2021

Grenadins façon Hirocht'imi

 

Retour du marché. Dans le cabas, deux grenadins de veau des Pyrénées et des endives de Je-ne-sais-où (une IGNP) mais bien serrées sur leur blancheur anémiée.

Je dois inventer une recette pour unir avec bonheur les sudistes et les nordistes. Ce qui est sûr, c’est que ces produits partagent une attirance vers la pâlitude… Et il ne faudra pas que cette fadeur esthétique se retrouve dans les saveurs.

Ma solution est de me tourner vers l’est, l’est lointain : l’orient, l’extrême orient - plus précisément le Japon.

Pour confectionner ma sauce, je verse 25 cl de crème fraîche épaisse dans une casserole. J’y fais tomber une pincée de sel et une cuillerée de curry japonais, le shichimi togarashi composé de piment de Cayenne, graines de pavot, poudre d’orange, graines de sésame, baie Sansho, gingembre et feuille de nori. Je porte à ébullition et laisse réduire du tiers. J’ajoute alors deux gousses d’ail noir d’Aomori que je viens de hacher sur ma planche. Je réserve, laissant l’alchimie opérer sous le couvercle dont je viens de coiffer ma petite œuvre.

En ce qui concerne les endives, je me contente de les parer et de les partager en deux avant de les poser côté coupe au fond d’un sautoir sur du beurre demi-sel mousseux et néanmoins breton (il fallait bien que l’ouest vienne mettre son grain de sel… ) dans lequel elles suent jusqu’à un début de coloration. Six petites échalotes blanches du jardin de la variété Hermine simplement pelées leur tiennent compagnie. Puis je retourne mes hémi-endives pour opérer de même sur l’autre face. Afin de les relier aux notes d’agrume dispensées par le curry japonais, je les recouvre du jus de deux clémentines (la mandarine aux fragrances plus marquées eut été préférable, mais voilà, d’la mandarine, j’n’en ai point ! ) et je laisse réduire jusqu’à ce que le liquide au fond du récipient, mélange d’eau de végétation et de mandarine pressée, devienne sirupeux.

Il est temps de passer au dressage.

Mes deux grenadins assaisonnés sont saisis sur les deux faces dans une noisette de beurre à feu moyen avant de passer au four à 150 °C pour cinq ou six minutes, le degré de cuisson étant vérifié au toucher. Bon, la viande me semble être rosée à point, je sors ma poêle et pose chaque grenadin sur son assiette chaude. J'allonge les endives braisées à ses côtés.

La sauce vient d’être remise à température pendant la cuisson des grenadins. J’en recouvre ces derniers, profitant du fait que l’ail est tombé au fond de la casserole pour le répartir à ma convenance. J'avais après l'évacuation du végétal poursuivi la réduction du jus clémentiné restant afin de le mener au bord de la caramélisation. J’en fais tomber une cuillerée sur les endives - et aussi dans un débordement assumé. J'ajoute les échalotes blanches. Elles semblent s'ennuyer. Tant pis, nous vous croquerons.

Manque la contrastante touche verte. Ce sera un banal brin de persil, heureusement à grandes feuilles ( une feuille de shiso eut été préférable, mais voilà, de ce shiso, j’n’en ai point ! ).

Il est temps de passer à la dégustation.

 

grenadin, endive, curry japonais, ail noir
Grenadin façon Hirocht'imi


Je n’aurais jamais cru que des chicons puissent se sentir si bien au Japon.

Franchement, c’est Hirocht’imi mon amour. De la bombe !

mardi 30 novembre 2021

Course à l'échalote

 

Avec l’humidité qui a régné au jardin, je crains fort que la durée de conservation de mes échalotes arrachées du bourbier ne soit brève, trop brève. Certaines commencent une triste pourriture qui n’a rien de noble Aussi je m’évertue à réaliser des recettes qui permettent aux bulbes encore vaillants de s’exprimer en nombre.

Pour ce jour, j’ai choisi de préparer une sauce aux échalotes pour accompagner des steaks taillés dans la bavette d’aloyau.

Je dénude une imposante cohorte d’échalotes rondes de la variété Méloine, petites en calibres mais développées en parfum. 

échalote Méloine
Comme sur ce catalogue La Bonne Graine

Je les concasse grossièrement avant de les déverser dans une casserole où fond une noix de beurre pour les laisser doucement suer parsemées d’une pincée de gros sel. Puis je les recouvre d’un verre de vin blanc - un vouvray sec - et un verre de fond de veau réalisé à partir d’un concentré.

Place beau veau

Il s’agit en réalité du fond de veau Ariake présenté dans un conditionnement de taille plus adaptée au débit d’une cuisine ménagère - hélas nettement plus onéreux au kilo, mais tel est le triste sort des cuisiniers amateurs…

Je laisse réduire presque jusqu’à évaporation complète, puis ajoute une cuillerée de balsamique blanc. Je laisse sur le feu et retire la casserole quand les oignons commencent à colorer dans un jus qui connaît un début de caramélisation. Je fais tomber dans cette compotée les feuilles ciselées grossièrement d’une branche de marjolaine et celles obtenues en frottant entre mes paumes une pousse d’origan. Je relève d’un trait de sauce Worcestershire et de quelques gouttes de Tabasco. Je monte hors du feu ma préparation avec quelques noix de beurre doux des Charentes Poitou. Je réserve le temps de passer rapidement mes bavettes sur la poêle et de finaliser l’accompagnement.

Cette garniture, ce sont des pommes allumettes précuites que je plonge dans le blanc de bœuf à 180 °C et abandonne pour cinq minutes de croustillonnage, temps que je consacre à saisir en parallèle les bavettes restées auparavant une heure à température ambiante. Je prends garde de les laisser bien saignantes à cœur.

Pendant que je dresse, disposant la viande et les frites sur les assiettes chaudes, je remets ma sauce aux échalotes à température. Je peux alors la déverser sur les bavettes. Je fais pleuvoir des feuilles de persil ciselées sur ces échalotes crémeuses et parsème les frites de fleur de sel.

bavette sauce échalotes
Tartinons la bavette


Je suis content. Mes échalotes n’ont pas vécu pour rien, elles ont fini victorieuses leur course, et tout ça pour nous régaler.

Inutile de dire qu’un rab de bonnes frites croustillantes traîne dans un plat à côté sur la table. Ben oui, on pique dedans avec les doigts, c’est ainsi que c’est bon. Il y a même aussi un petit bol de rab de sauce aux échalotes pour qu’éventuellement ces allumettes dorées y fassent trempette…

« Eh, moi dont le cœur saigne pour vous, on m’oublie ! »

Que non, que non ! Mais le thème, c’est l’échalote, il ne s’agit pas de bavasser sur la bavette. Alors tu étais tendre et goûteuse. C’est dit, tu es satisfaite ?

 

samedi 27 novembre 2021

Ma darne Sans Gin

  

Je suis tombé sur cette recette de Saumon au Gin :

Répartir le céleri branche et les quartiers de pomme de terre dans le moule, verser le bouillon et la crème dessus, ajouter les baies de genièvre, assaisonner, mélanger et recouvrir d’une feuille de papier alu.

Faire cuire env. 35 min. au milieu du four préchauffé à 220 °C. Retirer le papier alu.

Avec un couteau, faire 3 ou 4 incisions d’env. 5 mm de profondeur dans le saumon, assaisonner. Déposer le saumon sur les légumes, répartir le gin et le jus de citron par-dessus. Remettre au four pendant 10 minutes.

( site FOOBY )

Hélas - ou peut-être pas… - elle arrive trop tard. Ma darne si attendue que j’ai réussi à me procurer est déjà cuisinée, et même mangée. Ce fut donc Ma darne Sans Gin.

Une recette simple, pour ma darne sans gin : raidie par une pincée de fleur de sel avant un simple aller-retour sur une poêle bien chaude barbouillée d’huile d’olive. À la sortie, un tour de moulin de poivre rouge. Je dépose à ses côtés une salade de cresson à l’huile d’olive et jus de citron.

Et zou, Ma darne est servie !

darne de saumon, salade de cresson
Ma darne Cresson


Ma darne n’était pas arrivée seule. De grosses crevettes roses sauvages de l’Atlantique lui servaient de demoiselles de compagnie, de quoi réaliser un sympathique plateau de fruits de mer en y joignant palourdes et bigorneaux. J’ai fait cuire ces derniers en les jetant dans une eau bouillante salée à profusion que j’avais parfumée de feuilles de laurier, de grains de poivre à queue, d’une étoile de badiane et de quelques gouttes de Tabasco. Flamme baissée, ces coquillages sont restés sept minutes dans ce bouillon frémissant avant que je ne les sorte cuits à point. Une salade de haricots de mer arrosés d’une cuillerée d’huile de noix et du jus d’un quart de citron jaune est venue apporter une touche végétale. J’ai confectionné aussi une sauce cocktail pour y tremper les queues de crevettes : mayonnaise, chipotle ketchup, whisky. Je me suis cru malin en remplaçant le bourbon par un whisky fortement iodé, mais aussi fortement tourbé, et le résultat s’est révélé relativement déroutant, pas mauvais, non, mais éloigné de la rondeur habituelle de cette sauce, contaminée qu’elle était par la sauvagerie des Hébrides.

 

plateau de fruits de er
La fin des haricots (de mer)

Un seul regret : j’avais oublié de me procurer un bon pain de seigle. Nobody is perfect…

mercredi 24 novembre 2021

Retour de pompe

 

Retour de pompe en l'honneur d'un nouveau beaujolais nouveau…

En effet, suivant les années mes préférences allant soit vers le beaujolais Griottes des Domaines Chermette soit vers le beaujolais-villages Cuvée Bernard Pivot, je m’abstiens d’opérer un choix chez le caviste - « Les deux, mon marchand d’vin ! ». Je ne suis d’ailleurs pas certain que mon penchant périodique vers l’un ou l’autre corresponde à une réalité objective, car, outre l’humeur du moment, les mets avec lesquels ces vins sont servis doivent jouer un rôle essentiel, même si dans une tentative sans doute vaine de rigueur objective je procède à la dégustation préalable d’un premier verre apéritif, un verre solitaire et pour la science. Il me faudrait déposer puis ouvrir simultanément les deux bouteilles sur la table, mais je crains qu’ainsi après moult roulements de ces nectars sur mes papilles, ce ne soit moi qui roule sous la table, mes capacités bringuesques n’étant plus celles qu’elles furent jadis. Hein, quoi ? Recracher façon tasteur de vin en goguette ? Vous n’y pensez pas ! Quel gâchis… Et puis à quoi bon établir une hiérarchie, il suffit que ces deux vins nouveaux se montrent à la hauteur en endossant la robe prétexte à ces festivités annuelles. Et c’est le cas pour tous les deux.

Si hier ce furent des gougères et un saucisson lyonnais à cuire qui accompagnaient le beaujolais, aujourd’hui ce sont une pompe aux grattons et deux saint-marcellins de la mère Richard qui participent aux agapes.

Il y a un an à quelques jours près j’avais déjà réalisé une telle pompe. J’avais suivi selon mon habitude la recette figurant sur le site de Bobosse. Histoire de changer, je choisis de m’appuyer sur les recettes figurant sur le site de la Confrérie Bourbonnaise des Lechoux de la Pompe aux Gratons et celui de l’Allier-Bourbonnais.

Je mélange 500 g de farine, 10 g de sel, 100 g de saindoux et 100 g de beurre pommade. J’ajoute 3 œufs entiers et 5 g de levure de boulanger lyophilisée dissoute dans un peu d’eau. Je pétris. Comme le résultat est trop friable, j’ajoute de l’eau pour rectifier la consistance. Je boule le tout et mets pour une heure et demie dans la chambre de pousse à 28 °C.

La pâte a bien levé. J’y incorpore 100 g de grattons (en l’occurrence gratons de Lyon… ) et forme une couronne que je dépose au fond d’un moule à manqué barbouillé de saindoux. Je remets pendant deux heures dans la chambre de pousse, toujours à 28 °C.

J’enfourne à 160 °C pour quarante minutes. Je termine par cinq minutes à 180 °C pour obtenir de la coloration. Et voilà, la pompe aux grattons est prête.

pompe aux grattons
Pour un beaujolais en coup de pompe


Elle est encore tiède quand elle est servie avec quelques feuilles de salade du jardin - que l’on se rassure, c’est après une bouchée charcuto-pâtissière régénérant le palais dans ses capacités gustatives que nous portons les verres à nos lèvres…

pompe aux grattons
Pompe jouant les épouvantails

Puis arrivent les saint-marcellins. Bien que d’aucuns affirment que ces fromages ont connu une dérive vers l’industrialisation depuis le décès de la mère Richard, je dois reconnaître que ceux-ci étaient fort bons, crémeux, goûteux, bref affinés à souhait.

saint-marcellin, mère Richard
Un saint bien coulant

Pour autant le savoureux fromage ne vole pas la vedette au beaujolais nouveau. Ce n’est pas un Bernard Pivot qui se laissera mettre entre parenthèses.

Et même en fin de soirée, il restera debout, tel un point d’exclamation !

beaujolais, cuvée Bernard Pivot
Toujours jeune