Adieu pochetron larmoyant s’épanchant en votre giron, adieu ivrogne agressif qu’il faut bien éviter de regarder dans les yeux, adieu complexé qui s’offre une psychanalyse à un bock de l’heure en se cramponnant à votre bras, adieu politicien de comptoir se croyant à la tribune de la Mutualité, adieu solitaire rêvant qu’il est entouré d’amis, adieu étranger baragouinant à peine le français qui trouve sa naturalisation en ce temple, adieu intellectuel qui a flairé le complice en vous et vous bassine de ses théories, adieu habitué persécuteur de patron et serveur, adieu énervé joueur de flipper en quête de partie gratuite qu’il faut chasser à l’heure de fermeture, adieu mystérieux inconnu de passage dont je me plais à imaginer le destin…
Bref, adieu la vie.
Tout ça pour dire que le fait de constater que ma cave à cigare était vide m’a plongé dans la nostalgie du café-tabac et a ranimé ma haine envers la tyrannie des hygiénistes donneurs de leçon qui veulent nous imposer une longue (et ça, ce n'est même pas certain…) vie bien chiante.
Et c’est ainsi que j’ai réalisé un plat que j’aurais bien pu manger jadis le midi à la table d’un de ces bougnats de salut publique, espèce en voie de disparition dont se désintéressent les écolos :
Faux-filet grillé sauce bleu d’Auvergne et haricots verts.
J’ai fait fondre un gros morceau de bleu de Laqueuille que l’on m’avait rapporté d’un passage par Clermont-Ferrand au sein de deux bonnes cuillerées de crème épaisse d’Isigny. Une pincée de sel, des grains de poivre rouge de Kampot et de poivre blanc de Panja écrasés au mortier, et la sauce était prête.
Faux filet et vrai Laqueuille |
Les haricots frais cueillis du jardin étaient tendres et goûteux.
Mais il n’y a pas à dire, je préfère quand même l’entrecôte au faux-filet !