Gloire à ce végétarien qui dégage un parfum incomparable et dont la finesse en bouche n’a d’égale que la vigueur en terre ! En effet un pied de cette variété de piment, séjournant en mon appartement sur un coffre à côté d’une fenêtre résiste depuis plus de quatre ans aux multiples aléas de sa vie ingrate dans un pot étriqué en me fournissant abondamment de ses fruits en toutes saisons : manques d’arrosage durant les absences, tailles sauvages de ses rameaux, chutes malencontreuses en raison de sa dimension en regard du peu de poids de son récipient, rien ne l’a empêché de poursuivre sa tâche. Parfois j’ai craint le pire, feuilles en berne ou jaunissement, branches mortes, mais non, un bon arrosage, parfois une petite dose d’engrais, et cette plante incomparable se redressait, plus fière que jamais, et me manifestait une gratitude que je ne méritais pas par une abondante fructification.
C’est ainsi que cette semaine, confronté à une pléthore de piments végétariens ornant les branches de cette merveille de la nature, je me suis dit qu’il était de mon devoir d’effectuer une cueillette afin que ce pauvre arbuste ne se soit pas dévoué pour rien.
Récolter est une chose, mais il me fallait aussi concocter une recette afin d’en mettre en valeur le produit.
J’avais deux tranches d’un espadon de Méditerranée, c’était un bon point de départ. Mais en revanche, question légumes, la saison n’était pas très propice : pas d’aubergines, pas de tomates…
Finalement voici le déroulement que j’ai improvisé…
Je dépose mes tranches d’espadon dans une marinade :
jus de deux citrons jaunes et d’un citron vert
rondelles de deux oignons blancs et découpe de leurs tige
morceau de gingembre frais haché
trois gousses d’ail hachées
trois clous de girofle
mes piments végétariens, rouges, verts et oranges (les plus odoriférants…) découpée en tranches ou fendus dans leur longueur
une cuillerée extraite d’un bocal de piments habaneros confits au vinaigre
fleur de sel
tours de moulin de poivre rouge de Kâmpôt
Je laisse au frais en retournant les tranches de temps en temps durant un peu plus d’une heure.
Le bain de l'espaadon |
Puis je sors l’espadon en l’égouttant le mieux possible.
Je verse un abondant filet d’huile d’arachide au fond d’une poêle en inox placée sur un feu vif. J’y dépose les tranches de poisson que je parsème de graines à roussir (un mélange de graines de moutarde, de fenugrec et de cumin). Une minute et demie sur chaque face, je retire et je réserve.
Je baisse la flamme et fais suer dans cette même poêle les pétales un oignon rouge partagé en huit avec une pincée de sel. J’ajoute les tronçons d’une banane pas très mûre découverte dans la corbeille à fruit que commence à faire dorer dans l’huile sur toutes les faces. Trois minutes plus tard, je verse la marinade en remettant la flamme au maximum en la complétant d’un trait minimaliste de sirop de canne. J’y plonge aussi une feuille de laurier et une branche de thym.
Au bout de quelques minutes, le mélange a réduit et commence à caraméliser.
Va donc, eh, banane ! |
Je le détends alors avec le jus d’un citron jaune et le verse dans un plat au creux d’un riz thaï que j’ai fait cuire simultanément sur le feu voisin. L’espadon retourne dans la poêle et je le remets à température par un aller-retour à feu vif. Il rejoint le plat où je le saupoudre d’une pincée de curcuma et je lui fais supporter un piment végétarien. J’y ajoute des feuilles de basilic vietnamien frais coupé du jardin. Quelques gouttes du jus de citron vert… Et la touche finale sera conférée par le zeste d’un combava.
Espadon végétarien |
Le résultat était probant, ce plat aigre-doux titillait les narines et les papilles par sa symphonie d’odeurs et de saveurs…
Ce n’était pas tout, j’avais sorti le sirop de canne à sucre, il me restait un demi-citron vert et au cours de mes recherches j’avais découvert un fruit de la passion tout ridé, mais dont la découpe m’avait permis de découvrir à l’intérieur un vivier de grains parfumés.
Avec ces produits et l’ambiance des îles qui régnait, un ti-punch s’imposait.
Avec modération ? |