dimanche 24 janvier 2021

Ejusdem farinae

Une heureuse coïncidence a fait que le même jour arrivèrent dans ma cuisine deux soles achetées à un poissonnier des halles locales et dans ma boîte aux lettres le n° 1 de la nouvelle revue Embruns publiée par les excellentes éditions Menu Fretin.



Un article joignant l’érudition et l’humour tombait à pic, si j’ose dire. Intitulé La sole meunière nous roule-t-elle dans la farine ? il se concluait par ce petit paragraphe :

À la meunière pourrait donc être une appellation qui fasse référence au moulin — qui donna son nom à un petit poisson frayant dans ses eaux — ou à la meunière célébrée pour ses petits poissons frits au persil, tout autant qu’au bref passage du poisson dans la farine…

Le poisson, c’est le meunier à la chair blanche qui se plait aux alentours des moulins à eau.

Eau forte - Albert Flamen - Petit Palais

La meunière, c’est une belle jeune femme qui à la fin du dix-neuvième siècle servait sur les bords de Seine « d’imposantes fritures de gougeons qui s’élevaient en coupole d’or ; sous leur couronne de persil… » comme en témoigne l’écrivain et chroniqueur gastronomique Jean-Camille Fulbert-Dumonteil cité par l’auteur de l’article, Laurent Seminel.


Mais après la lecture il faut passer à l’acte. Et là, ça tombe encore plus à pic : dans la revue se trouve aussi la recette de sole au plat façon meunière d’Olivier Nasti. Recette que je possédais déjà par le biais de l'ouvrage Comment faire la cuisine ? du même chef, mais que je n’aurais pas eu l’idée d’aller rechercher dans ma bibliothèque - même si ce livre, quant à lui, y a été retrouvé facilement contrairement à certains…

Je me mets donc à l’œuvre, respectant la recette à la lettre, à l’exception des temps de cuisson que je diminue car mes soles sont d’un poids inférieur à celle traitée par Olivier Nasti. Je change aussi la garniture, faisant revenir doucement mes pommes de terre à l’anglaise à couvert dans du beurre sur une petite flamme afin d’obtenir des pommes fondantes à la peau croustillante.

Je commence par habiller méticuleusement mes soles, ce qui me change de ma cuisson meunière habituelle où je me contente d’enlever la peau sombre. C’est plus gastro, mais je regrette de me priver des joues et déplore la perte de têtes dont je ne fais rien, n’ayant pas l’usage d’un fond que je pourrais en tirer… Je pose mes soles bien enfarinées - mais sans excès - sur une poêle bien chaude barbouillée d’un trait d‘huile d’arachide.

Après 4 minutes de cuisson, je retourne la sole et y dépose quelques noix de beurre. J’enfourne pour à peine 4 minutes au four à 180 °C, avec un intermède où j’extraie la poêle pour arroser les soles de beurre des deux côtés.

Je sors la poêle, je vérifie la cuisson avec la pointe d’un couteau. C’est parfait, je peux allonger les soles sur les assiettes. Je presse un demi citron et verse le jus dans la poêle. Je laisse réduire à gros bouillons quelques secondes, puis arrose les poissons de ce beurre acidulé. En même temps je découvre les pommes de terre et hausse la flamme pour une ultime saisie.

Je parsème du persil que je viens de hacher.

Je pose les pommes fondantes à côté du poisson, fais tomber une pincée de fleur de sel. Je me dépêche d’apporter les assiettes sur la table. Je ne me fais pas de souci : aller sur les pas d’Olivier Nasti ne peut mener qu’à la réussite.

sole meunière, Olivier Nasti, Menu Fretin
Meunière, tu dors...

Et c’est bien le cas !


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire