De maléfiques zombies fossoyant ont envahi mon jardin, et leur principale jouissance est de bouffer les persils par la racine. Que ne se contentent-ils pas des pissenlits comme tout inhumé qui se respecte… Non, il faut qu’ils s’attaquent à tout ce qui ne bouge pas pourvu que ce soit sous terre.
Ces prédateurs invisibles m’ont saccagé - entre autres - une plate-bande de persil verdoyante qui commençait tout juste à prospérer.
Il m’a donc fallu tenter de maintenir provisoirement en vie dans mon appartement quelques pieds culs-de-jatte, le temps de leur trouver un usage culinaire et leur éviter une triste fin dans le compost. Pour ce faire je les ai immergés à mi-hauteur dans un récipient empli d’eau.
Malheureux persils |
Mais voilà, il est difficile à un persil de subsister sans racines, même s’il a son bac. Aussi, pour les deux derniers rescapés nichant dans ce bain-marie transformé en bain de pieds, je me suis senti obligé de me lancer dans une opération d’envergure.
Opération PERIL PERSIL
J’avais pensé un moment m’orienter vers le stockage de beurre maître d’hôtel, mais j’ai plus utile à faire qu'envahir mon congélateur, et puis, tout compte fait, le persil demeure minoritaire dans cette recette.
Alors, tout d’un coup, l’illumination est arrivée ! Quelle préparation pourrait-elle être plus consommatrice de persil qu’un taboulé libanais ? Voici la solution, c’est évident, d’autant plus que j’ai au frais et sous-vide des sachets de charcuteries et de fromages libanais. Il me reste même des pains congelés. Quelques achats chez le traiteur des halles locales : une barquette de hommos et des boulettes de kebbeh… Je pourrai me régaler libanais une fois de plus.
Après ces courses, je me lance donc dans la confection du taboulé.
La première chose à faire est de rincer dans une passette trois cuillerées de bourghol brun fin, puis de laisser gonfler ces grains recouverts d’eau au fond d’un bol pour une demi-heure.
Pendant ce temps je prélève le feuillage des branches de persil, les lave bien par trois bains successifs et les assèche, aidé par l’essoreuse à salade. Je les étale sur une grande blanche et les concasse - pas trop finement - choisissant mon couteau le plus tranchant afin de ne pas les écraser.
Je verse le résultat dans un cul-de-poule.
Je m’empare de trois tiges de menthe, arrache leurs feuilles que j’ajoute une fois ciselées au persil.
Suit un petit oignon blanc que je hache plus ou moins grossièrement.
Le bourghol est bien imbibé, je l’égoutte en le secouant dans la même passette où il avait été rincé. Il rejoint les feuillages et l’oignon dans le cul-de-poule.
Dans mon mortier j’écrase finement sur une petite cuillerée de gros sel trois baies de piment de la Jamaïque, cinq grains de poivre noir et cinq autres de poivre blanc. Bien pulvérisé, ce mélange vient parfumer le contenu du cul-de-poule en compagnie d’une petite cuillerée de sumac. Je brasse avec toute la délicatesse dont je suis capable, arrose du jus d’un citron et de trois cuillerées d’huile d’olive, de Provence en l’absence d’huile libanaise.
Je découpe une tomate épépinée en brunoise. Je fais tomber ces cubes sur le taboulé en gestation.
Quelques tours de mouvette me permettent d’homogénéiser l’ensemble.
Ben non, ça ne tiendra pas dans mes coupelles en porcelaine. C’est carrément un plat que je tapisse de quelques feuilles d’une salade du jardin qui recueillera le contenu du cul-de-poule.
Les habits verts |
Heureusement, ce taboulé est réussi, bien équilibré en parfums, offrant juste la pointe d’acidité bienvenue, alors il ne faudra pas se forcer pour le terminer.
Je transvase mon hommos - celui du traiteur serait plus exact… - dans une coupelle et fais tomber un trait d’huile d’olive.
Je suis un hommos, comme ils disent (chanson arménienne) |
Venant du traiteur elles aussi, les boulettes de kebbeh farcies de viande et de pignons de pin se disposent en étoile au creux d’une autre coupelle, séparées par des cubes de feta, quant à elle extraite de mes provisions de bouche, sur lesquels je fais tomber quelques gouttes d’huile d’olive et que je parsème d’une pincée de zaatar.
Feta kebbeh, fête à table |
Des tranches de bastorma viennent se nicher au creux d’un plat.
Le boeuf sur la salade |
Aujourd’hui, il y aura deux variétés de saucisses dans ce mezzé.
En premier, des makaneks que j’arrose de mélasse de grenade à la fin de leur cuisson au fond d’une poêle bien chaude.
En second, des soujouks, que je me contenterai d’arroser de jus de citron.
Entre ces deux variétés les épices diffèrent, et les makaneks ajoutent de l’agneau à la chair de bœuf. Et comme c’est toujours le cas, que ce soit à la maison ou dans les restaurants, ce sont les makaneks que je préférerai…
Je réunis makaneks - tendance libanaise - et les soujouks - tendance arménienne - dans un même plat, les séparant par une frontière saladesque. Je ne veux pas de conflit. Chacun chez soi. Non mais !
Makaneks à gauche, soujouks à droite |
Pour terminer ce mezzé, j’enfourne pendant une dizaine de minutes à 160 °C un pain libanais saupoudré de zaatar et partagé en deux. Chaque moitié a été ouverte pour y insérer des tranches de fromage kachkaval parsemées elles aussi de zaatar, mais en plus de menthe fraîche hachée.
Epanchements... |
Un point final agréable pour ce mezzé...
Et pour terminer ce repas en douceur, des pâtisseries achetées elles aussi chez le traiteur. Convenables, mais quand même bien moins fines que celles provenant du Liban…
Je me mets à l'amande |
Bien entendu, l’arak était présent tout au long du repas. Avec quoi de mieux voulez-vous que l’arak aille ?
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