mercredi 29 avril 2020

Maxipot, minichoucroute

Certains stockent des pâtes. Moi, c’est de la choucroute…
Moins que ça, cependant :



Je me suis même contenté du format intermédiaire des pots qui m’étaient proposés.



Pas celui de cinq kilogrammes, seulement de deux. Parfois je donne carrément dans la mesquinerie…

Je viens d’effectuer le premier prélèvement dans cette réserve.
L’extraction s’est déroulée sans problème - encore que si je tenais l’individu qui a conçu afin de sceller ce récipient une languette de plastique écorche-pouce si opiniâtrement résistante, je le plongerais volontiers pendu par les pieds au fond d’une cuve de fermentation dont il ne serait extrait qu’après avoir réussi l’exploit de détacher une douzaine de ses couvercles à main nue en moins d’une minute : c’est ce que mérite ce triste ingénieur de mes deux pour avoir inventé le coffre-fort à choucroute nécessitant le recrutement d‘un pro de la cambriole…



- On me demande ?
- Pas du tout, ce qu’il faut, c’est un vulgaire casseur armé d’un pied de biche, point de  bouchon de cristal mais un couvercle de gros plastoc…



Mais rendre son confinement au chou, c’est plus ardu… Il ne s’agit pas simplement d’être bourrin : en effet il faut assurer la bonne conservation dont ce seul damné couvercle n'est même pas capable tout seul. Méthode retenue : tasser du déjà tassé pour obtenir une surface plane, puis obturer. En cherchant bien, je découvre une petite assiette à dessert qui fera l’affaire si j’y ajoute le joint d’un papier siliconé découpé en disque. Reste à me procurer le poids à poser pour faire pression. Un disque en fonte bien pesant fera l’affaire.


La préparation du plat de choucroute ne sera plus qu’une formalité.

Il me reste le tiers de mon morceau de lard paysan fumé : je le découenne et le partage en deux. Je fais fondre une échalote ciselée au fond de la casserole sur une noix de saindoux et la couenne partagée en petits rectangles. Puis j’ajoute trois gousses d’ail, une feuille de laurier, des baies de genièvre, quelques baies de piment de la Jamaïque, une cuillerée de grains de poivre blanc de Penja.
Je fais revenir quelques secondes les deux morceaux de lard dans la graisse.
Je recouvre du chou que j’ai juste rincé brièvement, brasse afin qu’il soit bien enduit par le saindoux.
Je n’ai pas de vin d’Alsace à ma disposition - ou plutôt j’en possède bien dans mes réserves, mais il s’agit de gewurztraminer de vendanges tardives bien trop couteux pour être sacrifié à une cuisson pour laquelle, de surcroît, il n’est pas adapté. Un verre de sauvignon fera fort bien l’affaire : je le verse dans la casserole. Pour finir je complète avec de l’eau presque à hauteur.
Je laisse cuire à feu doux pendant une heure et demie.
Il est temps de faire dorer dans une poêle des saucisses blanches alsaciennes qui seront l’unique charcuterie de cette minichoucroute avec le lard de cuisson du chou.
Je dispose le contenu de la casserole sur un plat, laissant apparaître les deux morceaux de lard. J’étends les saucisses, trois grosses et deux petites, je ne sais pour quelle raison - j’ai même reçu un message d’excuses, mais je n’ai pas osé demander le pourquoi de ce défaut de calibrage…

choucroute, saucisse blanche
Choucroute blanche


Bon, ce n’est pas la choucroute débordante de charcutaille, mais c’est bien bon quand même…

lundi 27 avril 2020

Lard et la manière

La pâte avait été prévue pour une tarte aux pommes. C’était une pâte brisée, de celles qui sont presque feuilletées, car confectionnées en mélangeant à peine du bout des doigts le beurre bien ferme avec son double de poids de farine, s’aidant d’une larme d’eau fraîche et ajoutant une pincée de sel.
Les 300 g de pâte avaient reposé une nuit au réfrigérateur.
Mais c’était compter sans les caprices culinaires du bec salé que je suis.
En m’apprêtant à sortir la boule blottie dans son film transparent, j’aperçus à ses côtés un morceau de bon lard fumé paysan alsacien et à l’étage au-dessus un pot de crème épaisse d’Isigny à moitié vide / plein (rayez la mention inutile suivant votre sensibilité de l’instant).
« Ne préférerais-tu pas une quiche à une tarte aux pommes ? »
Et afin d’apporter le poids d’un argument irrécusable j’ajoutai que ça permettrait d’écouler ces quatre œufs frisant la DCR pour lesquels n’existait aucun projet.
« Certes, certes.. »
Je considère cette réponse comme un blanc-seing…
Le lard  se substituera à la pomme.





C’est donc parti pour la préparation d’une quiche.
J’étale tout d’abord la pâte.

quiche, pâte brisée
Au bout du rouleau


Pas si évident que ça, car la quantité correspondait à celle nécessaire pour tapisser le moule à tarte. Or le moule destiné à la cuisson des quiches est plus large et offre un bord plus élevé. Quand la surface requise est atteinte, la pâte est mince, très mince. Je crains le pire, mais non, en la transportant enroulée autour du rouleau le transfert se passe bien. Pas de chute - mais non plus de chutes en rab…
Le moule garni de sa pâte piquée avec les pointes d’une fourchette est séquestré au frais le temps de préparer le lard et la migaine.

Je prélève les deux tiers du morceau de lard et taille des lardons que je fais fondre et colorer légèrement sur le fond d’une poêle antiadhésive.

quiche, lard paysan fumé alsacien
P'tits lardons alsaciens


Je bats mes quatre œufs recouverts de 25 cl de crème liquide, puis y incorpore le reste de crème entière, c’est-à-dire à peu près 25 cl aussi. J’assaisonne de plusieurs tours de moulin de poivre rouge ainsi que de noix de muscade. Juste une infime pincée de sel, car je me méfie du lard, même si le test de la dégustation d’un lardon cru m’a démontré que l’artisan n’avait pas eu la main trop lourd.

quiche, migaine
Dernier coup de fouet


Je sors le moule chemisé, et je dispose sur la pâte les lardons que j’ai laissé refroidir. Pas facile de répartir à peu près uniformément… Je verse la migaine.

quiche, lard alsacien, crème normande
L'Alsace et la Normandie s'unissent...


La hauteur des bords permet de transporter la préparation vers le four à 180 °C sans trop de risques de débordements malencontreux.
Après une quarantaine de minutes de cuisson, la quiche sort toute dorée, dégageant des parfums qui me font saliver.

quiche
Première inspection...


J’ai le plaisir de constater que je ne suis pas le seul…
Reste à la démouler. Hum, la pâte est bien fine...
????? hum ????? hum hum ????????
Miracle.
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

quiche
Ouf, ouf, ouf !



Emparons-nous du grand couteau et tranchons !

quiche
Pas loin de la découpe aux lèvres


Mordons à pleines dents, pas la peine de s'embarrasser de couverts...

Mais modérons-nous quand-même dans notre élan de gourmandise, il  restera  de ce nanan pour un second repas, les parts - froides cette fois - accompagnées d’une salade de roquette. Et c’est encore un régal !

samedi 25 avril 2020

Pas d'eau, pas d'eau

Une querelle avait éclaté au jardin.

Les Jaunes gros du Poitou avaient eu le malheur de gémir que ce n’était pas possible, qu’ils crevaient de soif.
« Et pas un Zumain pour venir nous verser à boire… Nous allons tous mourir, comme les Cardons emportés par la déshydratation dans leur prime jeunesse ! Pauvre de nous… »
Les Bleus de Solaize, énervés, avaient répliqué que si l’on manquait d’eau, c’était peut-être parce que de gros patapoufs irresponsables n’avaient pas su se rationner après la disparition des Zumains.
« Arrêtez de chougner. Nous aurions pu tenir jusqu’à la prochaine pluie. Toujours compter sur les Zumains, c’est lamentable.
-  Ah, ces bleus qui prétendent nous donner la leçon !  Parce que vous, vous n’étiez pas benaizes quand une rigole d’eau du puits s’écoulait à vos pieds ou sous la douche de l’arrosoir d’un Zumain. N’attendiez point qu’il mouille, à c’t’époque ! Toute votre ramijhaudée, elle en a bien profité, des Zumains. Quand un jardinier vous débarrassait du luma qui vous chatouillait le pied, on s’attendait toujours à ce que vous lui sautiez au cou pour le biger !
-  Des ciboulettes qui avaient fréquenté une cervelle de canut l’avaient mille fois répété à mon pauvre père : méfie-toi des jaunes. Il me l’a aussi seriné. Mon père avait raison !
-  Eh, pauvres guignols… Tout ça ne vous empêche pas de rester à poireauter bêtement…
-  Sauf que nous, nous poireautons avec dignité.
-  Tu parle, quand est-ce que vous allez fermer votre goule ?
-  Et vous, arrêter vos pillandreries ? »
Un peu plus loin des épinards avachis sont réveillés par les éclats de voix.
« Qu’est-ce qu’ils disent ?
-  Ben, tu sais bien que nous sommes devenus durs de la feuille… »
Ils se tournent vers la planche voisine.
« Vous y comprenez quelque chose ?
-  Oh non. Bettes nous sommes, bettes nous resterons. C’est tout ce que nous savons. À part le fait que nous avons soif… »
Mais soudain un portillon s’ouvre. Cri unanime : « Un Zumain ! »
Ils n’arrivent pas à y croire.
« Un Zumain, ça existe encore ?
-  Certainement, mes amis. Libérés, délivrés… Enfin presque. Mais je puis désormais venir vous servir à boire. À qui qu’on dit merci ? »
Un pied rabougri qui a dû en voir bien d’autres s’exclame : « À Lama et Delon ».
Cet ancien combattant doit mériter les lauriers au-dessus de sa tête.
« Mais non, merci Monsieur le Préfet ! »
Nouveau cri unanime : « Fayot ! »

C’est ainsi qu’un Zumain fut intronisé dans le clan des légumes.

C’est ainsi que sur ma table arriva un plat de poireaux de bonne taille, bleus et jaunes mélangés (quoi de mieux pour obtenir un légume vert) néanmoins tendres sous la vinaigrette à l’échalote et à la moutarde.

poireaux vinaigrette
Et ça devait finir ainsi...


C'est ainsi que deux jours plus tard, ce sont des épinards qui sont tombés dans le beurre d’une poêle. Je n’en avais jamais encore mangé au goût si prononcé. Un concentré d’épinard !

jeudi 23 avril 2020

Postérieur d'agnelet

L’idée m’était venue de réaliser un lammele, ce dessert pascal alsacien, pour le servir en conclusion du repas de Pâques.
Las, il me fallait commander le moule traditionnel en terre.



Et ce dernier est arrivé postérieurement à nos agapes. Par ma faute uniquement, je tiens à le préciser, car aussi bien le commerçant alsacien que Chronopost ont fait diligence…
D’ailleurs, à ce propos, il faudra que je mette en ligne la recette Bananissimo que j’ai confectionnée avec des bananes ayant voyagé par le biais de Colissimo et donc reçues selon la célérité dont cette entreprise est coutumière - même en temps normal - plus d’une semaine après leur expédition. Oui, je sais, que venaient-elles faire dans cette galère…?  Eh bien tout simplement elles étaient là en supplément d’une commande plus justifiée, profitant de l’aubaine de pouvoir voyager à l’œil en profitant des frais de port de ses compagnons de route.
Ces belles bananes des Antilles bio sont arrivées dans un triste état. Même si mes goûts ne s’éloignent guère de ceux de la gourmande Colette qui écrit dans Claudine à Paris
L’abondance de bananes contribue d’ailleurs à me rendre la vie supportable. En les achetant mûres et les laissant pourrir un petit peu, les bananes c’est le bon Dieu en culotte de velours liberty !
ces fruits sont quand même très très avancés : ils sont à la banane ce que la pétafine est au saint marcellin… Cependant une fois débarrassés de leurs peaux virant au noir, ils me fournissent une chair au parfum vigoureux mais plutôt plaisant. Je la brasse dans une casserole avec une grosse noix de beurre et quelques cuillerées de sucre. J’arrête la cuisson quand cette mixture commence à caraméliser.
Je verse dans des coupes en porcelaine.

dessert, bananes, rhum
Merci, Colissimo...


Sous couvert de précautions sanitaires, j’arrose copieusement d’un bon rhum agricole.



Et, in fine, gaudeamus.
Vive le Bananissimo !

(Tiens, plus besoin finalement de poster ultérieurement la recette, j’ai été emporté dans mon élan… Ah, ces peaux de bananes…)



Revenons à notre mouton !
Ce lammele de Pâques se métamorphosera en agnelet du dimanche de la Quasimodo

Mais avant il me faut culotter le moule. Je le laisse tremper une nuit dans une bassine d’eau. Puis, une fois sec, j’enduis l’intérieur émaillé de beurre, enfourne à four froid et monte le thermostat à 160 °C.
Je sors les deux flancs au bout d’un quart d’heures et les dépose sur un torchon afin de les laisser refroidir.

moule à lammele
Ceci n'est pas une chaussure à talon haut


Le moule est à nouveau manipulable pour l’essuyer avec un papier absorbant. Une fois nettoyé, il est enduit de beurre, est réintégré dans le four à 160 °C pour un deuxième quart d’heure.
Une troisième opération identique, un bon nettoyage final au chiffon, et le moule est opérationnel.

Le grand jour où pour la première fois j’endosserai le rôle d’accoucheur d’agneau est arrivé. Il y a beaucoup de recettes proposées à droite à gauche, je me contenterai de celle jointe au moule :

Recette pour un moule de format 22 cm - 24 cm
Ingrédients :
- 3 œufs
- 5 à 6 cuillerées d’eau chaude
- 150 g de sucre
- 1 sachet de sucre vanille
- 100 g de farine
- 50 g de fécule
- 1 cuillère à café de levure chimique
Battre au fouet les jaunes d’œuf et l’eau chaude, ajouter le sucre et le sucre vanillé jusqu’à obtention d’une masse crémeuse. Battre les blancs en neige, la neige doit être très ferme
Glisser cette neige sur la masse des jaunes d’œufs, puis y tamiser le mélange de farine, de fécule et de levure chimique. Mélanger le tout délicatement. (Des œufs en neige se mélangent avec la pâte de bas en haut et non pas en tournant car les blancs retombent.)
Bien beurrer la forme du mouton pascal, en insistant au niveau des oreilles, y verser la pâte.
Temps de cuisson : environ 30 à 40 minutes à 175/200°
La cuisson terminée, laisser refroidir le biscuit avant de la démouler. Refroidi, démoulez-le et saupoudrez de sucre glace.

Je réunis les deux flancs qui s’ajustent à merveille et les maintiens avec la pince en acier. Je verse la pâte. La cuisson est arrivée à son terme. C’est bien ce que je craignais, la recette doit être plutôt pour un moule de 22 cm, la pâte ne s’est pas assez développée pour envahir complètement le socle, mon agneau ne sera pas triomphant. Mais je préfère encore cette insuffisance à la pléthore envahissante que j’ai pu observer d’un regard narquois en visionnant une vidéo du blog de cuisinier amateur.

Un four...


Toutefois, comme je ne suis pas si méchant que ça, comme le contenu de ce réjouissant blog est d’ordinaire mieux inspiré, comme la responsable de ce gag est l’invitée qui opère, comme le tenant des lieux fait preuve d’une grande mansuétude envers elle, je ne souhaite pas exhiber ce site devant la méchanceté populacière comme un objet de risée. Je ne fournirai donc ni son nom ni le lien !

Maintenant il faut attendre dans l’anxiété le refroidissement complet pour savoir si le démoulage se passera sans embûches, d’autant plus que je n’ai pas fariné le moule comme certains le conseillent.
Fort heureusement, tout se passe bien, et je peux disposer en ce dimanche in albis mon agnelet revêtu de sa robe candide sur l’ardoise, au ras des pâquerettes…

lammele...
N'est-il pas mignon ?


Nous en avons dégusté ce jour le baron.

lammele
Après le baron


La suite sera pour le lendemain.

dimanche 19 avril 2020

Pal toqué ?

Ils vivent mieux que moi, ces poulets.



Chacun dispose de plus de 65 m2. Alors que le vieux coq que je suis (mais pas si complétement déplumé…) et celle que je n’oserai pas appeler ma poule doivent se résoudre à gambader sur moins de 130 m2. Bon, question nourriture, je ne me plains pas, même si notre espace ne nous offre point cette nourriture exclusivement naturelle composée d’herbes et d’insectes que les volailles chassent (sauterelles, papillons, vers de terre, etc.) décrite par le bucolique éleveur.
Quoi que… Je me situe simplement à l’étage au-dessus dans la chaîne alimentaire…
Le voici, ce poulet arrivé tout droit de sa ferme. Il ressemble bien à sa pièce d’identité quand je l’extirpe de son sachet sous vide.



Il pèse un peu plus de deux kilos, c’est une belle bête. Il en a fallu des vermisseaux pour arriver à ce stade ! Mais les grains de maïs ont dû bien les aider…

Cependant avant de l’empaler suivant mon sinistre rituel, il me faut d’abord couper la tête proprement. Je commence par décapiter au plus court, puis je fends la peau sous le cou dans la longueur afin de pouvoir la détacher de la chair : elle me servira à recouvrir l’orifice laissé à nu après la section du cou à sa base.
Voilà, c’est fait. J’emplis le coffre du poulet, tapissé de quelques grains de gros sel, avec quelques quignons de pain sec frottés à l’ail, parsemés de pincées de ras el hanout puis mis à tremper dans un verre de sauvignon - en alternant avec des noix de beurre, une échalote tranchée en quatre, des branches de thym et de romarin, une feuille de laurier. J’assaisonne l’imposante bête sur toutes ses faces.
J’avais précuit dans l'eau salée des pommes de terre de la variété Ditta une dizaine de minutes. Je les place dans le creux du socle de mon plat en fonte pour cuisson verticale en compagnie d’une petite feuille de laurier, répartis quelques noisettes de beurre demi-sel, arrose de trois verres d’eau. J’y ajoute le cou qui viendra rehausser les saveurs.
Je place le poulet dressé sur son pal, jette un dernier coup d’œil - n’ai-je rien oublié ? Ah, si, j’ajoute une gousse d’ail au champ de tubercules.
Ouf, la grosse bête passe bien sous le plafond du four.
Four que j’allume en réglant le thermostat à 180 °C. Le plat restera un peu plus de deux heures dans cet espace, notre habitué des vastes prairies doit s’y trouver à l’étroit…
J’arrose régulièrement le poulet avec le liquide où baignent les pommes de terre. Au bout d’une heure, ne craignant plus que l’acidité entrave la cuisson de ces dernières, je verse doucement le vin de trempage des quignons de pain sur le poulet dont il dégouline pour compenser l’évaporation.
Le moment est venu de sortir animal et légumes du four.
Le poulet apparaît vêtu d’une peau craquante et dorée.

poulet fermier, cuisson verticale
J'ai pris le pal de haut


Si, si, il a bien des cuisses...

poulet rôti, poulet fermier
Poulette, tu as les bas qui plissent !


Les pommes de terre, dont la chair moelleuse et fondante est enfermée dans une coque croustillante, baignent dans un jus parfumé.
Finalement je décide de découper le poulet pour le présenter sur un plat, mais de conserver pommes de terre et jus dans la fonte de cuisson, où nous viendrons puiser la garniture et la sauce accompagnant le morceau que notre envie nous a fait choisir pour le poser sur notre assiette.

pommes de terre rôties, jus de poulet
Plat de cuisson déguisé en plat de service


Et c’est bien bon.
Il faudra longtemps avant que mon pal lasse, même si ce n’est pas un pal toqué…


vendredi 17 avril 2020

MENU : aux landaises l’hollandaise, gigot jus, belles beluga



MENU DE PÂQUES


AUX LANDAISES L’HOLLANDAISE


En entrée, asperges blanches des sables arrivées tout droit des Landes. Elles furent servies accompagnées d’une sauce hollandaise réalisée à la paresseuse, c’est-à-dire dans le bol de mon Mycook pro 1.8.

asperges blanches des sables, Landes
Prêtes à attaquer la hollandaise...


Je ne m’étendrai pas davantage sur cette procédure, car ma cuisine bégaye…


J’ai décrit déjà cette recette d’asperges sous le titre Hollandaise aux landaises, intitulé qui, un an plus tard, me semble pousser un peu trop loin en avant une sauce qui est surtout destinée à mettre en valeur le produit principal , qui est quand même l’asperge. …
Il en est d’ailleurs curieusement de même pour l’illustration photographique, qui plaçait alors en premier plan la saucière.
N'oublions pas que c'est l'asperge qui est aux manœuvres !

asperges, sauce hollandaise
Là là Landes



GIGOT JUS


Le gigot, petite pièce de 900 g environ prélevée sur un agneau de lait élevé sous la mère des Pyrénées, est arrivé dans le même colis. Je l’ai extrait du sac sous-vide deux heures avant la cuisson afin qu’il s’aère et se mette à la température ambiante.

agneau de lait, gigot
Gigot d'agneau de lait Label Rouge


Puis j’ai séparé l’os replié qui ne tenait plus que par quelques tendons pour le poser à sec sur le plat de cuisson avec à ses côtés oignons paille et échalotes grossièrement découpées ainsi qu’une carotte tranchée en tronçons épais. Malheureusement je n’avais pas de céleri sous la main.
J’ai enfourné à 210 °C et laissé une quinzaine de minutes jusqu’à une caramélisation poussée. J’ai alors arrosé de quatre verres d’eau, remis le plat dans le four après avoir ajouté trois gousses d’ail qui, introduites trop tôt, auraient brûlé et seraient devenues amères.

gigot, jus d'agneau
Au jus là dedans !


J’ai laissé réduire ce jus des deux tiers.
Pendant ce temps j’ai piqué le gigot d’éclats de gousses d’ail, le masse avec quelques noix de beurre et l’ai assaisonné.


gigot d'agneau de lait
Dans la famille Brebis ; Fils Dodu


J’ai baissé le thermostat à 170 °C, et ai sorti à nouveau le plat, introduit des branches de romarin et de thym, une feuille de laurier. J’ai déposé le gigot sur l’os et deux grosses échalotes tranchées en deux de façon à ce qu’il ne baigne pas dans le jus mais bénéficie des vapeurs qui en montaient tout en le nourrissant de sa graisse fondue.et laissé cuire un quart d’heure avant de flasher à 200 °C pendant cinq minutes pour l’obtention finale d’un doré appétissant.
J’ai étendu le petit (mais dodu) gigot sur une planche, l’ai assaisonné de quelques tours de moulin de poivre rouge et d’une pincée de piment d’Espelette.

gigot, agneau de lait des Pyrénées, élevé sous la mère
Sera-t-il rosé à point  ?


Il y reposa une dizaine de minutes le temps de finaliser le jus et de remettre en température l’accompagnement de lentilles. Mais ceci est une autre histoire…
Revenons vers ce bon jus qui s’étalait au fond du plat de cuisson. Je l’ai passé au chinois, relevée d’un trait de sauce Worcestershire et d’une grosse pincée de piment d’Espelette (Pyrénées obligent…). J’ai ajouté une noisette de beurre et vanné avant de verser dans la saucière.

jus d'agneau
Jus...


Il ne me restait plus qu'à me lancer dans le tranchage...

gigot, agneau de lait
Quand la cuisson est bonne....



BELLES BELUGA


Il s’agissait de Lentilles beluga du Perche (retour de Normandie…) , magnifiques dans leur sachet transparent.

encore plus belles en vrai...


Le problème, c’est que pour leur cuisson l’on peut lire tout et son contraire : départ à froid, jetées à l’eau bouillante, vingt minutes, trois quarts d’heure… Même le site du producteur donne des recettes en contradiction avec ce qui est écrit sur le paquet !
J’ai donc entrepris une préparation au feeling.
Après les avoir rincées, je les ai recouvertes dans une casserole de trois fois leur volume d’eau - ce qui a posteriori s’est révélé excessif - mais pas tant que ça, à mon avis deux fois et demie aurait été parfait. J’ai ajouté un quart d’oignon, une demi-échalote et une feuille de laurier. J’ai placé sur feu doux et laissé à petite ébullition une vingtaine de minutes. J’ai goûté, ça manquait encore un peu de cuisson, mais je pouvais saler. Â la vingt-cinquième minute, j’ai retiré du feu, égoutté les lentilles tout en conservant une cuillerée d’eau de cuisson au fond de la casserole dans laquelle j’ai fait fondre une noix de beurre. J’ai réservé mon beluga rural dans la passoire coiffée d’un couvercle et posée sur la casserole.
Avant de commencer le tranchage du gigot sur la planche, j’ai reversé les lentilles dans la casserole, ajouté sur le dessus une belle noix de beurre destinée à la fois à parfaire le goût et à me fournir un indicateur de la montée de la température. J’ai soulevé régulièrement le couvercle et quand la vapeur et la fonte presque totale du beurre m’y ont autorisé, j’ai brassé délicatement avant de transvaser dans un plat chaud. Faute de persil, des pousses d’oignon ciselées m’ont permis d’ajouter une touche de couleur dans ce noir finalement pas si mal conservé…

lentilles beluga, Perche
À la pêche au beluga, à la pêche au beluga,, tu ne veux pas aller ?





mardi 14 avril 2020

Vendredi, ou les Limbes du Plat si chic

Ce jeudi soir j’allais me coucher quand j’entendis des éclats de voix provenant de la cuisine.
« Vieille morue !
- Ta gueule, pauvre patate ! »
Il est quand même navrant d’entendre un légume et un poisson se donner des noms d’oiseau. Surtout aux prémices de cette période pascale.
Je n’étais d’ailleurs pas le seul à être outré. Un œuf ne put s’empêcher de réprimander ces tristes zigotos.
« N’avez-vous pas honte de vous comporter ainsi la veille du Vendredi saint. Déjà que mes frères et moi avons dû renoncer à notre pèlerinage à Rome, les vols de la compagnie Bell’s Airway ayant été annulés, il nous faut par surcroît assister à de malvenues prises de bec… »
Je ne doutais pas que pourtant les prises de bec devaient faire partie du quotidien de leur génitrice : le mot me semblait mal choisi. Mais effectivement ce n’était pas une raison pour tolérer cette chienlit. Je décidais donc d’intervenir.
Une bonne douche froide suivie d’un long bain nocturne dans l’eau glacée devait calmer la morue excitée. Il faut parfois savoir renouer avec les bonnes vieilles méthodes des aliénistes du temps passé… Je repoussai au lendemain une balnéothérapie quant à elle chaude pour la patate qui me regardait d’un sale œil et me repliai vers un lieu plus serein afin d’y bénéficier du sommeil du juste.


Le lendemain matin, ma décision était prise. Il fallait sévir.
Ne cédant à aucun attendrissement, je soumis la patate à des embruns bouillonnants durant une quinzaine de minutes Elle en sortit en robe des champs, accoutrement dont je la dévêtis aisément avant de l’allonger dans sa jaune nudité sur une planche. Eh oui, ensuite, il m’a fallu trancher…

La morue connut un sort plus paisible : une eau frémissante avait remplacé l’océan impétueux. Elle en émergea d’ailleurs tout attendrie, m’affirma qu’elle ne méritait pas ce surnom de vieille peau dont des malfaisants l’affublaient.
« Et ça ? » répliquai-je en la débarrassant de lambeaux gluants grisâtres qui me collaient aux doigts.
« Sans compter tes déplorables arêtes… On peut dire que tu n’es pas une chair facile !
- Mais si, mais si. Ah, effeuille-moi, effeuille-moi… Oui, mais pas tout de suite, pas trop vite, sache me convoiter, me désirer, me captiver. »

Oui, je le confesse, en ce vendredi qui fut plus sain que saint, cette morue bien dessalée est passée à la casserole. Ou plutôt au plat en terre.
Ce plat était tartiné de beurre et d’ail écrasé. J’ai dressé un lit de tranches de pomme de terre. Je l’ai parsemé de fines lamelles découpées dans une gousse d’ail et saupoudré d’une pluie de poivre rouge.
J’y ai étendu ma morue à la blancheur virginale (tu parles !). Quatre œufs qui jouaient les faux durs sous prétexte qu’ils avaient passé huit minutes dans l’eau bouillante l’encadraient en une garde rapprochée.
« Tu es sûr que l’on a besoin d’eux ?
- Aujourd’hui, sans nul doute.
- Ah bon… »

Mais je ne compte pas en rester là. Je prépare une béchamel pas trop épaisse que je rallonge du même volume de crème. Je parfume en râpant une noix de muscade.
J’en verse la moitié. Je ne puis m’empêcher d’y ajouter un mauvais jeu de mots.
« Avec la bénédiction de la béchamel… »
Suit une nouvelle couche de pommes de terre que je noie du reste de liquide onctueux encore tiède.
Estocade finale de la lance d’une feuille de laurier - « Eh voilà, tu es lauréate… » - et de la pique d’une branche de romarin - « J’ai descendu dans mon jardin… ».
La suite est torride : vous pensez, vingt minutes à 160 °C ! L'épectase l’est encore plus, certes brève, mais à 190 °C.
Ah, morue à dorer !!!

gratin de morue, crème,  vendredi saint
Morue alitée


« Je ne me sens pas dans mon assiette… »

morue à la crème
Morue épanouie


« Ben maintenant tu y es ! »