lundi 18 février 2019

Actualités de ma cuisine

Dans ma cuisine, des truffes en gilet jaune.

truffe, oeufs brouillés
TRUFFE EN GILET JAUNE


Moi qui suis le Jupiter de ce lieu, je n’ai pas pu m’empêcher de lui dire :
« Traverse la rue, et tu trouveras du bulot ! »

bulots
Y A DU BULOT


En attendant, c’est moi qui suis descendu de mon piédestal et ai dû me mettre au travail…

Pour les œufs brouillés (qu’est-ce qu’ils ont, ceux-là, qui les pousse à ne jamais s’entendre ?), je casse sept œufs directement dans une petite sauteuse bombée sans angle vif



que j’ai barbouillé d’une fine couche d’huile d’olive. Je les parsème de noisettes de beurre demi-sel. Je pose l’ustensile sur une flamme moyenne, et brasse avec une spatule. Dès que le mélange a commencé à coaguler sur la paroi en inox, je retire la sauteuse du feu et amène délicatement la périphérie vers le centre en balayant soigneusement avec la spatule. Je répète cette opération jusqu’à ce que le contenu devienne crémeux. Je déverse alors la truffe hachée dans la sauteuse, remets sur le feu quelques secondes en brassant. Hors de la flamme je termine en incorporant quelques grains de fleur de sel, et je répartis dans les assiettes. Il me reste seulement à décorer à l’aide des plus belles tranches obtenues avec la mandoline à truffes et servir rapidement.




Quant aux bulots, mangés le lendemain, je les fais dégorger plusieurs fois dans un ersatz d’eau de mer obtenu avec du gros sel. C’était vraiment nécessaire, car ils contenaient beaucoup de sable !
Dans une casserole emplie d’eau salée à profusion, j’ajoute un oignon piqué, une carotte, deux étoiles de badiane, des zestes d’un citron dont je verse le jus, quatre feuilles de laurier, un brin de thym, des queues de persil, trois baies de poivre long, une cuillerée de poivre de Voatsiperifery, cinq tours de moulin de poivre rouge, dix gouttes de Tabasco rouge. J’y plonge les bulots qui avaient commencé à sortir leurs nez de leurs coquilles. Je dépose sur la flamme et laisse cuire à petit bouillonnement - une demi-heure suivant les conseils du poissonnier. D’habitude, je me contente d’une vingtaine de minutes, mais il y a dans le lot bon nombre d’exemplaires particulièrement gros, alors j’obtempère. À tort, car finalement les bulots se révéleront trop cuits, et il s’en est fallu de peu qu’ils ne deviennent caoutchouteux…
Je sors les bulots réservés au frais et prépare une mayonnaise relevée. Montée à l’huile de colza, j’y ajoute le jus d’un demi-citron et une cuillerée de piment d’Espelette.

mayonnaise, piment d'Espelette
Fouette, saucier !


Cette sauce me titille si agréablement les papilles que j'en arriverais à oublier la surcuisson...



dimanche 17 février 2019

Les navets sont cuits

J’ai commencé ma mise en place un peu plus d’une heure avant le repas : j’ai fait fondre un gros oignon haché dans du saindoux au fond de la cocotte en y ajoutant quelques baies de genièvre et grains de coriandre. J’ai débouché la bouteille de riesling et en ai prélevé un verre.
J’ai sorti les morceaux de lard demi-sel et de lard fumé paysan, les saucisses au cumin et les brotwurscht. D’excellentes charcuteries préparées par des artisans alsaciens. Je le sais avant même de les goûter, car les jours précédents je m’étais régalé de diverses saucisses (à tartiner, de foie, noire, de bière, au fromage) de la même provenance.
Puis j’ai ouvert au-dessus d’une passoire, afin d’en rincer le contenu, le sachet de süri rüawa, ce navet salé cousin de la choucroute qui devait fournir le reposoir et contrepoint de cette garniture porcine.
Je m’apprêtais à ouvrir le robinet purificateur quand je remarquai quelques corps étrangers au milieu des bâtonnets de navet. Je regardai de plus près : c’étaient des bouts de lardons. Je reniflai : ça sentait la bonne graisse, mais aussi le vin. Erreur fatale : j’avais acheté des navets déjà préparés !

N’avais plus qu’à changer mon fusil d’épaule.
N’avais qu’à pas me tromper.
N’avais pas d’autre solution que de différer la chauffe du navet cuit par autrui (vil usurpateur !).
N’avais donc pas le lit de navet pour cuire le lard et les saucisses.
N’avais plus qu’à cuire séparément pendant trois quarts d’heure le lard dans un vague bouillon improvisé.

Ce que je fis. Vingt minutes avant le service, les saucisses au cumin rejoignaient ces deux morceaux.
Me restaient dix minutes pour résoudre le dilemme : ajouter le verre de riesling à la préparation que j’allais réchauffer au sein de la cocotte, ou le boire. Je suis raisonnable, je me suis sacrifié en faveur du plat qui méritait bien ce petit regain d’acidité et de parfum.
Pendant que le süri rüawa mijotait doucement, j’ai fait dorer la paire de brotwurscht dans une poêle sur une noisette de saindoux.
Tout était prêt.

N’avais plus qu’à disposer sur un plat après avoir tranché le lard demi-sel en quatre et le lard fumé paysan en deux.

navets salés, Alsace, süri rüawa
N'avait plus qu'à se servir



N’avais plus qu’à poser à ma compagne la même question que nous avait susurrée d’un air cauteleux le patron d’un hôtel de La Petite-Pierre où nous étions attablés autour d’un civet de biche aux spätzle : « Alors, ça schmeckt ? »

La Petite-Pierre
Une Petite-Pierre dans mon jardin de souvenirs


Ben oui, ça schmecktait grave !

jeudi 14 février 2019

Cacabements


Je jette un regard désolé sur le rôti de pintade farci que m’a préparé le vendeur du volailler.
Quand j’étends ce long bébé mollasson à la peau grumeleuse (je précise que je décris ma pièce de viande et qu’il ne s’agit pas du vendeur - quoi que…), je me mets à désespérer. La farce de chair et de foies de volaille dont une partie commence à s’échapper d’un interstice mal ficelé me fait craindre par son manque de gras et son hachage très fin d'obtenir une texture desséchée après cuisson. Par endroits subsistent sur la peau quelques duvets et coûtons que je m’empresse de neutraliser au lance-flammes chalumeau.
Bref je suis hautement inquiet du résultat final. D’ailleurs même l’auteur ne croyait pas en son œuvre : « Faîtes attention en découpant les tranches, il n’y a pas de barde, alors ça risque de s’écrouler ! »
C'est dire !

Mais tout comme quand le vin est tiré il faut le boire, quand la pintade est ficelée il faut la cuire.

Je prépare une garniture aromatique - carotte, céleri, et oignons taillés en grosse brunoise — que j’étends sur le fond d’un plat en fonte beurré. J’ajoute une gousse d’ail, une feuille de laurier, quelques cassures de poivre long et une pincée de poivre de Voatsiperifery. Puis je couche mon gros bébé mollasson que j’ai assaisonné d’une cuillerée de sel fin et d’une pincée de quatre-épices.
Je parsème de noisettes de beurre, je verse un verre d’eau au fond du plat en arme anti-dessiccation.
J’enfourne pour une heure et demie à 160 °C.
Je renouvellerai régulièrement le verre d’eau afin de maintenir l’humidité.


Il me faut passer à la préparation de la garniture.

 En premier lieu, des gnocchis.

Je reprends grosso modo les proportions qui m’avaient jadis donné satisfaction.

http://sosgrisbiche.blogspot.com/2018/03/mon-lapin.html

Cette fois-ci ce seront 240 g de farine T55 et 2 jaunes d’œuf pour 800 g de purée de pomme de terre.

Je façonne sur une planchette, procède à la cuisson.
Je réserve.

gnocchi
Passés sur la planche




En second lieu, des champignons. Je nettoie à la brosse et au chiffon humide des pieds-de-mouton et des lentins du chêne dont je partage en deux les plus gros. Pour les chanterelles, il me suffit de les débarrasser d’une partie de leurs queues.
Je fais tomber tout ce petit monde sur un trait d’huile d’olive et une noisette de beurre. Quand les champignons ont perdu leur eau, je les noie sous 25 cl de crème liquide. Je sale, parsème d’une petite cuillerée de cinq-épices dont la note anisée devrait bien fonctionner et je laisse réduire à feu moyen.
Je réserve.


pieds-de-mouton, lentins du chêne, chanterelles
Trilogie de champignons


La cuisson du rôti de pintade est achevée. Heureuse surprise, la pièce ne s’est pas écroulée lamentablement, la fuite de farce est restée modeste. Mais surtout la peau est devenue craquante à souhait.
Toutefois c’est encore avec inquiétude que je dépose le bébé plus du tout mollasson sur une planche et m’apprête à le découper. Je sors même mon couteau le plus performant - un japonais acéré. Aligatô ! Miracle… Les tranches se succèdent sans problème. Elles sont nettes, la farce manque sans doute un peu d‘onctuosité, mais elle n’est pas desséchée. Je remets à température les champignons et je réchauffe les gnocchis dans moult beurre demi-sel fondu.

gnocchis
Au bon beurre



Tout est maintenant prêt pour dresser. Je termine en parsemant les gnocchis d'un peu de parmesan râpé et en arrosant les tranches de pintade farcie avec du jus prélevé au fond du plat de cuisson.

rôti de pintade farcie
Elles ne cacabent plus


Finalement, mes craintes étaient vaines. Toute la famille réunie se régale.
Je n’ai pas été le dindon de la farce que je m’imaginais être… Ouf



Pour sa part mon épouse et néanmoins pâtissière maison a confectionné un Bienenstich.

Il s’agit d’une pâte levée recouverte d’une masse aux amandes (tant pour tant miel, sucre, beurre porté à ébullition dans lequel on incorpore des amandes effilées) enfournée à 180 °C durant une demi-heure, puis fourrée après refroidissement d’une garniture consistant en un mélange d’une sorte de crème pâtissière affermie avec de l’agar-agar et de crème chantilly - donc une crème diplomate, me semble-t-il.

Bienenstich
Merci aux abeilles (Bienen) !



Pas mauvais ma foi, même si la pâte manquait un peu de légèreté…

Bienenstich
Une ancêtre de la tropézienne...


Ce qui ne facilitait pas la découpe des parts !

Bienenstich
Epanchement

lundi 11 février 2019

Courrier du coeur

Tendre cœur blessé cherche union profonde avec âme sœur.

Echalote arrachée à sa terre natale souhaiterait réconforter ce cœur saignant.

Ils se rencontrèrent, le mariage fut décidé.
Inutile de dire que Cœur blessé était sur des charbons ardents avant de passer à l’autel (mais non, pas à l’hôtel !). Quant à Echalote, elle se pomponnait, se parfumait : beurre demi-sel (mais non, pas beurre de missel !), vinaigre de cidre, miel de fleurs d’oranger (ça s’imposait…), quatre-épices, poivre rouge et, en touche finale, quelques gouttes d’un odoriférant balsamique de Modène.

Le père Chaud-Rond célébra l’union avec sa bonhomie habituelle en l’église de la Sainte Assiette. Étaient présents Persil, un des anciens voisins d’Echalote, et de nombreuses amies de Cœur blessé.
Les dernières notes de la Marche Nuptiale résonnaient encore quand Echalote se tourna vers Cœur blessé.
« Pourquoi as-tu invité toutes ces patates ? »
Après un silence, elle lança un regard venimeux vers son compagnon.
« Je parierais même que tu les as toutes sautées ! »
Ça commençait mal… Mais je ne suis pas étonné : Echalote en avait déjà fait pleurer plus d’un…


coeur de vau, échalote
La mariée était en brun

jeudi 7 février 2019

L'enquête Corse

Mission : découvrir où se cache le figatellu.


Le vrai, pas un imposteur comme on en rencontre trop souvent.


Ma première piste semblait prometteuse : un individu fils de porc élevé en plein air, en Corse.
Je l’ai mis sur le gril.

figatellu
Va-t-il se mettre à table ?


Quelques châtaignes allaient-elles le faire parler ?

figatellu
Il ne me dit rien !


Eh bien, il ne m’a pas dit grand-chose…
Je me suis réconforté en me coupant une tranche d’une tomme de brebis aux moisissures engageantes.

tomme de brebis corse
Corse ovin


Suivirent quelques canistrelli aux amandes bien croustillants.

canistrelli
Se mettre à l'amande


Enfin, pour mieux digérer cet échec, j’ai siroté un verre de liqueur de mirthe.



Il me fallait continuer ma recherche.
Deux jours plus tard, une piste m’avait conduit vers un autre figatellu qui se cachait à Porto-Vecchio.
J’ai réussi à le faire venir chez moi. Il m’a exhibé ses papiers. Je pouvais y lire :
Porc noir "U NUSTRALE" né et élevé en corse, nourri aux glands et aux châtaignes.
C’était bon signe. Toutefois je l’ai mis dur le gril lui aussi.

figatellu
Un vrai Corse !


Et je n’ai pas eu besoin de châtaignes pour le faire parler. On le sentait fondre quand il évoquait sa terre natale.

figatelle
Il s'épanche


Il avait apporté dans ses bagages un pot de Casgiu Pestu. Je m’en suis régalé.

ciasgu pestu
Lui, il s'étale


Je n’ai cependant pas osé lui dire que ce produit n’arrivait pas à la hauteur du fromage fort que je découvrais il y a bien longtemps dans des colis de produits artisanaux de l’Île-Rousse reçus par ma mère à une époque où l’on ne s’embarrassait pas de considérations diététiques ou sanitaires…

Mais parfois je suis sage, le point final consista en des clémentines. Corses, bien entendu !


dimanche 3 février 2019

Razzia sur le chou

Restaient dans le jardin quelques choux un peu rachitiques que leurs pommes maigrelettes avaient jusqu’alors exemptés de service. Il fallait néanmoins désormais les évacuer afin de récupérer l’espace qu’ils occupaient.
J’ai malgré tout eu à cœur que les trois choux de Milan rois de l’hiver (gros comme le poing…) ne soient pas décapités pour rien, que les deux choux cabus pointus (des petits duduches !) ne se fassent pas hara-kiri en vain et que les quatre choux rouges roodkop (tout aussi chétifs) ne versent pas leur sang inutilement.

Dans une première casserole, je fais suer quatre petits oignons dans une noix de beurre. Je déverse le chou rouge tranché en lanières fines, parsème d’une bonne pincée de sel fin et laisse suer. Puis j’arrose de deux verres de vin rouge de Gaillac, ajoute quatre pruneaux dénoyautés, six ou sept baies de genièvre, une feuille de laurier, une demi-cuillère à café de quatre-épices, un trait de vinaigre balsamique. Je laisse sur feu doux environ une heure. J’obtiens une compotée de chou rouge (à la flamande ou à l’alsacienne, je ne sais pas trop…). Je réserve.

Dans une petite poêle coiffée d’un couvercle, je fais tomber les feuilles des choux verts dans une grosse noix de beurre en compagnies de gros lardon taillés dans un morceau de lard séché portugais et de trois gousses d’ail tranchées en deux. Je pousse jusqu’à un début de caramélisation. Je réserve.

Dans une seconde casserole, je fais blanchir un morceau de poitrine de porc demi-sel plongée dans une eau que j’amène à ébullition. Je renouvelle l’eau dans la casserole, fais réintégrer son domicile au cochon exfiltré provisoirement. La cuisson sur feu moyen est poursuivie une quarantaine de minutes. Mais vingt minutes avant cet achèvement une saucisse fumée vient plonger à côté de la poitrine.


J’éteins le feu sous la cochonnaille.
Je remets à température le chou rouge, en parfumant d’un tour de moulin de poivre - rouge lui aussi, ils sont faits l’un pour l’autre…
Je replace la poêle sur le feu en l’arrosant d’un demi-verre d’eau et je monte ce liquide avec une grosse noix de beurre. Je parfume cette sorte d’embeurrée de chou en râpant une noix de muscade.
Je sors de l’eau poitrine et saucisse, pose sur une planche et découpe.

Il ne me reste plus qu’à dresser l’assiette : Charcutaille entre choux

porc, chou rouge, embeurrée de chou, cabus, chou de Milan
Le rouge et les verts

jeudi 31 janvier 2019

L'imposteur

Il s’est introduit chez moi.
« Salut, je suis le cervelas de Lyon. Je viens me faire embriocher… »
J’ignorais que mes talents d’embriocheur étaient connus jusqu’à la capitale des Gaules et des gones, mais, flatté que j’étais, je me suis prêté au jeu.

« Bon, pour commencer, la formule magique, ce sera cette fois-ci :
Farine : 200 g
Levure de boulanger : 10 g
Sucre : 1 cuil. à soupe
Sel : 1 demi-cuil. à café
Œufs : 2
Jaune : 1
Beurre mou : 80 g
»

Je pétris, finis par le beurre. Je laisse pousser une demi-heure, je pétris à nouveau, je boule et recouvre d’un film. Je mets au réfrigérateur pour trois heures.
« Je peux maintenant m’occuper de toi. Allez, zou, dans le bain ! »
Le cervelas de Lyon plonge dans l’eau d’une grande casserole. Sournoisement j’allume une flamme.
Bientôt l’eau frémit et le cervelas râle.
« Eh, c’est trop chaud !
- Que non, juste la température qu’il faut. Ça ne bout même pas ! Tu veux être embrioché, oui ou non ?
- Oui, mais…
- Il n’y a pas de mais qui tienne, Monsieur le douillet… »
Le cervelas reste coi désormais, même si je lui trouve un air un peu crispé.
« Quarante minutes sont passées, tu vas pouvoir sortir. Je t’allonge et je te déshabille..
- Quoi !!!
- En tout bien tout honneur, mais il faut être nu pour être embrioché.
- Je ne suis pas certain que je veuille vraiment être embr…
- Courage, le plus dur est fait. »


cervelas de Lyon
Saucisson sorti des eaux


Ou reste à faire, car j’ai bien du mal à le dépouiller. Sa vêture est mince, se détache mal et se déchire. C’est la première fois que je rencontre ce problème avec un cervelas en l’embriochant. Et puis je ne sens pas le bon effluve parfumé caractéristique monter vers mes narines. Je deviens soupçonneux.
« C’est sûr que tu es un cervelas de Lyon ?
- Ben oui, je suis un cervelas…
- Mais pas de Lyon, je parie.
- Ben non, de Versailles. »
C'était bien ça ! C’est le charcutier local qui l’a préparé. Certes, le meilleur traiteur de la ville, ses plats sont bien réalisés et plutôt généreux, mais en ce qui concerne les spécialités régionales, à part celles de la Touraine d’où il est originaire, ce n’est pas la réussite. Ses francforts, par exemple, défigureraient une choucroute alsacienne. Mais tant pis… Je ferai avec.
« Je ne sais pas si vous méritez d’être embrioché, Monsieur l’imposteur…
- Je ne suis pas lyonnais pure souche, mais je suis quand même pistaché !
- Ouais, pistaché mais menteur… Cependant quand la pâte est pétrie, il faut la cuire. Je serai bon prince. Il sera fait quand même selon ton souhait.
- Merci, ô merci !
- Ne m’embrasse pas, tu risquerais de me tacher. Et pour l’instant tu vas aller au frais.
- Tout nu ? Ah non !
- Jamais content. Finalement tu es un guignol, c’est ton seul côté lyonnais. »


Deux heures plus tard, je sors la pâte et le cervelas déchu, devenu saucisson à cuire.
J’étends la pâte.

cervelas de Lyon, brioche
Le lit douillet


« J’ai fait ton lit, tu vas pouvoir t’allonger
- Eh, pourquoi tu m’enfarines ?
- C’est pour mieux te border, mon enfant. »
Je rabats les bords, les colle avec le même jaune d’œuf étendu d’eau qui servira à badigeonner.

saucisson en brioche
Les pans se sont refermés


« Eh, c’est trop serré, j’étouffe !
- C’est ça être embrioché. N’est-ce pas ce que tu m’as demandé ?
- J’ai dû confondre avec entarté…
- Tu n’es pas encore assez célèbre pour ça ! Allez, un dernier coup de pinceau… »

cervelas brioché
Un peu de fond de teint


J’enfourne à 180 °C pour un peu plus d’une demi-heure.

saucisson brioché, cervelas de Lyon pistaché
Plus tout nu, mais tout bronzé


« Et voilà, tu es embrioché ! Tu es content ?
- Je me sens partagé… »

cervelas de Lyon brioché
Saucisson partagé





Perplexe, j’ai effectué des recherches pour expliquer le boyau inhabituel de ce saucisson, et j’ai pu lire sous la plume de Laurent Mariotte :
Les règles ne sont pas les mêmes pour le cervelas et pour le saucisson à cuire traditionnel. Le choix des matières premières et le hachage des morceaux sont les deux étapes qui font la différence.
« On utilise un boyau de bœuf pour le cervelas tandis qu’on utilise un boyau de porc plus épais pour le saucisson à cuire. »
Porc, plus épais ? Mais là la peau de ce saucisson à cuire était au contraire plus fine que d’habitude…
En revanche  sur un site spécialisé je découvre :
Menu de bœuf :
Paroi plus épaisse que menu de porc, gris rose
Menu de porc :

Texture fine presque transparente, nervuré, clair, beige clair  

Chez Bobosse comme chez Sibilia, il s'agit bien de bœuf pour les cervelas. Mais aussi pour les saucissons à cuire...
Qui croire ?