vendredi 4 décembre 2020

Fromage ou des cerfs ?

 

Fromage ou des cerfs ?

Eh bien pour ce jour je choisis des cerfs. Enfin, des, peut-être pas, car il est fort probable que ces entrecôtes de cerf qui attendent d’être posées sur la poêle dans leur sachet sous-vide proviennent d’une seule bête…

Toutefois, avant de procéder à cette cuisson qui sera fort rapide afin de conserver un intérieur saignant, il me faut me lancer dans la préparation de l’accompagnement : un chou rouge qui, en revanche, nécessitera un long mijotage.

Je commence par passer le chou à la mandoline. J’obtiens de fines lanières qui viennent s’entasser dans une bassine. Je cisèle sur une planche un oignon du jardin.

Je m’empare de ma cocotte ovale en fonte. Je dépose sur son fond une noix de saindoux. Il me reste un cube de lard gras fumé de porc Mangalica.

C’est l’occasion de finir en beauté pour ce morceau venu de Hongrie. Je le partage en petits lardons que je déverse à côté du saindoux. J’allume le feu sous la cocotte. Bientôt les lardons commencent à colorer après avoir répandu une graisse abondante, parfumée à souhait. J’y fais suer la découpe d’oignon.

Quand ils blondissent, je m’empresse de vider ma bassine dans la cocotte, et, passant de feu moyen à feu vif, je fais tomber ces lanières de chou rouge en les brassant assaisonnées d’une belle pincée de gros sel.

Quand je vois que le chou a perdu sa fermeté et s’abandonne mollement au creux du récipient, je l’arrose d’une cuillerée de vinaigre de Maury et de la moitié d’une bouteille de côtes-du-rhône.

J’enfonce au creux du légume une boule à thé. De thé, point, mais la moitié d’un bâton de cannelle, un chaton de poivre long rouge de Kosla dont les arômes puissants devraient bien fonctionner avec cette recette aux notes sucrées, une dizaine de baies de genièvre, six ou sept baies de piment de la Jamaïque, une petite cuillerée de fenugrec, une autre de poivre blanc de Muntok. J’ajoute aussi un bouquet garni ficelant au sein de deux feuilles vertes de poireau une feuille de laurier, une tige de thym et une queue de persil.

Pour finir, six pruneaux d’Agen viennent compléter les ingrédients et je coiffe la cocotte de son couvercle. J’enfourne pour une heure à 150 °C.

L’heure est passée, je sors la cocotte : non, ce n’est pas encore assez confit à mon goût. Je rajoute un verre de vin, profite de cette sortie pour saupoudrer de la cuillerée de cassonade que j’avais oubliée.

Quarante-cinq minutes plus tard, le chou est cuit à point. Je le réserve en l’attente de l’heure du repas.

D’habitude des quartiers de pomme s'additionent à mon chou rouge. Là, ils sont absents car je compte dresser avec une rondelle de pomme sur chaque assiette.

J’anticipe cette préparation. Je prélève deux tranches de 7 mm d’épaisseur dans une Boskoop dont la touche d’acidité et la tenue à la cuisson devraient faire merveille. Je me hâte de les frictionner avec la tranche d’un citron afin de leur éviter de s’oxyder. Je fais fondre une noisette de beurre demi-sel dans une petite poêle, y ajoute une larme de balsamique blanc. Et zou, un aller-retour de mes tranches de pomme à feu vif… J’éteins le feu aussitôt et réserve.


L’heure de l’entrée en scène du cerf est arrivée.

J’avais bien pensé à laisser les entrecôtes déballées sur une plaque à débarrasser, à la fois pour la mise en température ambiante et pour l’oxygénation. J'étends mes pièces sur une poêle bien chaude barbouillée de beurre mousseux. Une minute trente sur chaque face préalablement parsemée de fleur de sel, et je verse sur elles un petit verre de genièvre de Houlle. J’incline la poêle à côté de la flamme. Ça flambe. J’ai économisé une allumette ! Alléluia !

Je dépose mes entrecôtes de cerf sur une planche le temps que je finisse le dressage.


Mon chou rouge vient d’être réchauffé à feu moyen. Pour une bonne note finale d’acidité, j’ai ajouté une cuillerée de balsamique blanc.

Les pruneaux ont bien gonflé, j’en mets deux de côté, le temps d’emplir un bol de ce chou rouge parfaitement tendre néanmoins encore légèrement al dente, récipient qui me sert de moule avant de renverser sur l’assiette. Je place sur l’éminence rouge un pruneau bien imbibé. Tombera, tombera pas ?


Je réserve les assiettes dans le four encore chaud pendant que je remets en température les tranches de pommes et prépare la sauce.

Le genièvre a déjà partiellement déglacé la poêle. J’y ajoute un petit verre de vin rouge, quelques gouttes de balsamique traditionnel de Modène et un soupçon de fond de veau. Je fais réduire à feu vif, et quand le liquide est devenu bien sirupeux, j’y incorpore trois tours de moulin le poivre rouge de Kampot.


Je sors mes assiettes du four. Sur chacune je dispose trois entrecôtes de cerf. Eh oui, trois, ce sauvage des forêts vosgiennes n’a pas le gabarit d’une grosse vache normande (ou charolaise, ou limousine, ou etc.)

La tranche de pomme est chaude. Elle peut rejoindre l’assiette.

Je complète avec les dernières tranches de concombre à l’aigre doux maison restant au fond du bocal.

Je termine en arrosant de la sauce nappante les entrecôtes.

Quant au persil… Honte à toi, l’envahisseur de plats ! Mais honte à moi aussi qui t’accepte sans broncher sous le prétexte d’ajouter une touche verdelette bon marché…

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Cerf et chou

Nous nous régalons avec ce chou rouge débordant de flaveurs. Surtout - ce n’était pas gagné… -  j’ai réussi la cuisson du cerf : le cœur des tranches est resté saignant. Et cette viande offre un goût de gibier marqué, mais sans excès.

J’ai  fait le bon choix. Des cerfs...

Et puis, finalement, pourquoi pas un bon munster pour finir ce repas alsacien en apothéose?




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