Le maigre qui vient d'arriver dans ma cuisine est tout sauf maigre. Il est bien loin de n’avoir que la peau sur les arêtes… Peau que je lui laisserai, me contentant de vider son bon ventre rondouillard et de le débarrasser de ses nageoires. Nageoires qu’il n’aura pas besoin d’agiter à tout va pour traverser l’Atlantique et se retrouver en Nouvelle-Angleterre… En effet, après avoir comblé le vide tripal par une pincée de gros sel puis un petit fagot de thym, origan et laurier, je parsème la bête de Rubs New England seafood seasonning, un ready-made qui permet de voyager en classe économique.
Certes, j’aurais pu effectuer moi-même un tel mélange : basilic, oignon, sel de mer, persil, piment, aneth, huile de citron. Mais à quoi servirait donc que Legal Sea Foods se décarcasse pour m’apporter un petit goût venu d’ailleurs ?
Une petite pluie de fleur de sel (chic, je retrouve les embruns, s’exclame le maigre), un léger filet d’huile d’olive (j’ai pas demandé une extrême-onction, vitupère le maigre), et j’étends mon courbine-grogneur sur la grille que j’ai posée au fond de mon plat de cuisson afin que l’air torride pulsé par le four puisse circuler sur toutes les faces du gisant.
Maigre dodu |
J’enfourne pour une dizaine de minutes à 200 °C.
Le temps de cuisson vient de se terminer, je retire la grille, faisant glisser le maigre au fond du plat.
Survient alors l’angoisse de la chair blanche : mon poisson ne serait-il pas trop cuit, ou, au contraire, en levant les filets, une bonne partie en restera-t-elle accrochée à l’arête dorsale ?
Armé d’une cuillère, je soulève le capot que j’écarte sur le côté. Je suis aussitôt rassuré. Y-en-a sous ce capot, et ça tourne rond. Le trajet s’est effectué sans encombre, j’inspecte, c’est nickel.
Sous le capot du maigre décapotable |
Je suis bien arrivé aux U.S.A.
Je vais m'attabler au comptoir... |
Et Paris-Boston en dix minutes, même le regretté Concorde n’en était pas capable…
Le Concorde atterrit à l'aéroport de Boston |
Bravo le maigre dopé !
Puisque c’est jour maigre, le repas sera, une fois n’est pas coutume, dans le registre diététique.
Pour accompagner les filets de poisson simplement arrosés d’une larme d’huile d’olives de la variété Grossane et parsemés d’un tour de moulin de poivre blanc de Penja : des courgettes sautées.
Il s’agit de deux courgettes cueillies le matin au jardin, l’une verte et l’une jaune. Taillées en paysanne, je les jette dans une poêle bien chaude au milieu d’une cuillerée d’huile d’olive avec deux gousses d’ail violet nouveau et un petit piment, lui aussi du jardin. La cuisson sera brève, cinq à six minutes. À mi-cuisson j’introduis la tranche partagée en deux d’un citron particulièrement parfumé dont une cuillerée de jus viendra donner du peps à la courgette, légume un peu fade, il faut bien l’avouer, même s’il ne vient pas d’un supermarché.…
La jaune et la verte |
Ce plat quasi de régime se révèle cependant plutôt agréable…
Et je ne veux pas finir frotté d’épices comme un vulgaire Ramsès II !
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