Ce couple de piles me remettait en mémoire la mésaventure du regretté Pierre Desproges qu’il avait narrée avec tant de verve…
M’émerveillant en mon for intérieur de la miraculeuse adéquation entre mon besoin et le conditionnement, je tombais néanmoins en arrêt devant une corbeille d’osier tressé. Une inscription avait attiré mon attention (eh oui, mon cerveau se vante d’être multitâches, contrairement à Gerald Ford je pourrais marcher et mâcher du chewing-gum en même temps si toutefois un tel agissement, fort peu probable en ce qui me concerne, me venait à l’esprit) : une étiquette plantée en son sein affichait en grosses capitales tracées négligemment avec la rusticité adéquate : FOUÉES.
Quoi de mieux pour y étaler le reste de mon pot de rillettes de Tours et honorer ainsi Rabelais ?
Néanmoins les sachets contenaient une bonne douzaine de ces petits pains ronds. Beaucoup trop pour mon usage ! À la caisse je n’allai pourtant pas le jouer à la Desproges en requérant l’ouverture du pochon pour en prélever une paire… À ma requête ne serait aucunement enclinée l’hôtesse-fouacière, mais, que pis est, m’outragèrait grandement, m’appelant brèche-dents, plaisant rousseau, fainéant, rien-ne-vaut, rustre, malotru et autres telles épithètes diffamatoires, ajoutant que point à moi n’appartenait manger de ces belles fouaces, mais que je devais se contenter de gros pain ballé et de tourte.
Ne voulant pas déclencher une nouvelle guerre picrocholine, d’autant plus qu’un passage par Lerné m’avait permis de constater que, telle Le Havre après les bombardements, cette bourgade avait été depuis parfaitement reconstruite
j’ai préféré opter pour une solution alternative. Trop de fouées - ou pas assez de rillettes ?
Je suis donc parti à la recherche du pot qui me permettra de tartiner à souhait. Pot de rillettes - de Tours, of course. Of course, mais pas of courses chez un Leclerc, fut il chinonais. Car partout en évidence des pots de rillettes du Mans de marques diverses, de Connerré, primées, pas primées, à l’ancienne, d’oie, de canard et même - horresco referens - de poulet. Mais de rillettes de Tours, point. Je commençais à désespérer devant cette confirmation que nul n’est prophète en son pays quand tout à coup je tombai sur deux petites rangées presque cachées de pots arborant le label IGP. Deux producteurs différents, mais chacun insistant lourdement sur l’apport en oméga 3, ce qui d’ordinaire aurait tendance à me faire fuir, non pas tant en raison de cette présence somme toute plutôt bénéfique, mais à la lecture de ce discours mercantile qui veut remplacer un plaisir gustatif tout simple par une odieuse absorption de pharmacopée.
Cependant j’ai réprimé ce premier mouvement de répulsion, me disant qu’après tout qu’importe le flacon si l’on a l’ivresse. Quelle marque retenir ? Les deux mon général…
Et c’est ainsi qu’après une solennelle dégustation d’une fouée passée au four garnie du reste de l’excellente brune confiture de cochon artisanale
j’entreprends de tester mes deux produits labellisés.
Quelle déception. Voyez plutôt :
Ah, zut, j’ai oublié d’enlever le couvercle…
Voilà, c’est chose faîte :
Sous le couvercle, l'IGP |
Pâlichon, n’est-ce pas, et trop haché. Quant au goût, il ne vaut guère mieux. Fadasse, presque écœurant. J’en viendrais à leur préférer des rillettes sarthoises bien nées…
Franchement, avec de telles troupes en première ligne, Tours aura bien du mal à gagner la bataille des rillettes. Rabelais doit se retourner dans sa tombe…
Tout comme l'habit ne fait pas le moine, l'IGP ne fait pas le produit. Je m'ensouviendrai.
Les rillettes de Tours sont totalement inconnues des Leclercs, Carrefours et Intermarchés...et de moi-même...une page historique sur la "Brune Confiture": https://www.terroirdetouraine.fr/news/45/146/Rillettes-de-Tours-I-G-P.html ...j'en salive sur le clavier !
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