La chaleur l’envahissait peu à peu, et bientôt elle put se rendre compte qu’elle baignait dans un liquide parfumé. Une spatule blanche l’atteignit et un fragment se détacha de sa tempe. C’était une sensation nouvelle, elle qui n’avait été qu’un liquide comme celui dans lequel elle était plongée désormais. Elle s’aperçut tout à coup qu’elle-même retrouvait sa nature, qu’elle se fondait dans ce voisinage, et que peu à peu leurs deux corps s’accoupleraient pour ne faire qu’un. De ce mariage allait naître un nouvel être, comme elle-même résultait de l’union de ces moult tomates arrivées du jardin qui, dans ce même creuset où elle vivait une nouvelle étape, s’étaient mélangées ardemment bercées par les fragrances des herbes et des épices afin de générer ce qu’elle était : une sauce tomate.
Pas la peine qu’elle sache qu’elle a passé plusieurs mois dans le congélateur où je l’avais enfermée !
Elle accomplit sa mission comme une vaillante petite sauce tomate fraîche.
J’avais commencé par faire dorer sur toutes les faces des morceaux de poitrine de veau (avec os) assaisonnés dans un trait l’huile d’olive au fond d’un sautoir. Je les avais retirés et réservés pour les remplacer par un oignon haché finement, une petite échalote découpée en pétales. Ce mélange ayant sué à feu doux, j’y ai ajouté plusieurs petites - pour ne pas dire minuscules en raison de la sécheresse, mais très parfumées - gousses d’ail du jardin. J’ai versé la moitié d’une bouteille de gros-plant et une cuillerée de balsamique blanc qui ajoutera à la fois un peu d’acidité et de sucrosité.
J’ai déposé ma sauce tomate tout juste démoulée de son bac de plastique.
Je la vois fondre doucement et se répandre au fond du sautoir.
C’est fini, je brasse avec ma spatule blanche : une nouvelle sauce est née, enfin presque, parce qu’il me faut la mettre à réduire doucement après y avoir plongé mes morceaux de veau et un bouquet garni enfermant entre des feuilles de poireau des brins de thym et de marjolaine ainsi que des queues de persil et une feuille de laurier.
Je recouvre et laisse cuire à feu doux pendant un peu moins d’une heure en retournant les morceaux de veau de temps à autre.
Ah, la belle poitrine ! |
Un peu avant de servir, je prépare une gremolata en hachant persil, ail (cette fois-ci deux grosses gousses d’ail de Touraine débarrassées de leur germe) et zeste de citron. Je transvase le contenu du sautoir dans le plat de service après avoir donné un tour de moulin de poivre blanc de Penja, rectifié l’assaisonnement et ajouté le jus d’une moitié du citron ayant servi à fournir le zeste.
Je parsème de la gremolata.
La gremolata, la gremolata … (air connu) |
L’accompagnement consistera en des penne rigate cuits al dente.
Beau veau et sa remise de penne |
L’été était revenu dans nos assiettes. Finalement, ma sensible et naïve sauce tomate avait raison : seules quelques minutes nous séparaient de la récolte sous un soleil de plomb…
On peut être (en novembre) et avoir l'été |
Comme les infantes participaient au repas, la pâtissière maison, sans doute inspirée par la vue de mes manipulations de moules à mini-muffins durant ma brève carrière de traitamateur, a ressorti ceux de taille normale afin de concocter des muffins aux cranberries afin de tenter de régaler la jeune génération.
Ce fut le cas, même la cadette au bec salé n’a pas dédaigné ce dessert… Ni moi d’ailleurs, car ces muffins n’étaient pas trop sucrés.
M'enfin, ce sont des muffins ! |
J’ai retrouvé l’impression de la recette, apposée à l'aide d'un aimant sur la face Est du frigo. Mais j’en ignore la source - alors toutes mes excuses auprès du contributeur anonyme pour ce piratage involontaire. Je résume ci-dessous :
On bat 100 g de beurre mou jusqu’à ce qu’il soit crémeux. On ajoute 175 g de sucre (quantité réduite volontairement à 120 g…), 2 œufs et une pincée de sel.
À part on mélange 250 g de farine et 2 cuillères à café de levure. Puis on l’ajoute alternativement avec 125 ml de lait dans le mélange beurre œufs. On incorpore les cranberries.
La cuisson dure une vingtaine de minutes à 175 °C. Laisser refroidir 5 minutes avant de démouler !
Alors, nous, les muffins, nous n’avons pas le droit à la parole pour faire part de nos états d’âmes ?
Peut-être sommes-nous trop bonnes pâtes…
- Ah, vous êtes gonflés de me dire ça. Non, c’est tout simplement parce que je croyais que vous ne parliez qu’anglais.
...j'aurais volontiers accompagné cette poitrine de veau avec des salsifis...mais tout le monde n'aime pas...
RépondreSupprimerPour ce qui est des muffins, je me suis tourné vers les Palets bretons, recette assez simple même avec de la poudre d'amande.
Moi j'aime, mes mains n'aiment pas à cause de l'épluchage mais la corvée en vaut la peine. Les infantes je ne sais pas, les pâtes étant la solution de facilité d'une valeur sûre qui en outre permet de gérer facilement l'aléa des heures d'arrivée. Il est vrai que le salsifis fonctionne bien avec la sauce tomate, même si je me contente en général de le passer au beurre.
SupprimerJ'avoue que ni moi ni mon épouse n'avons jamais réalisé des palets bretons, nous contentant de croquer ceux du commerce.