Pourtant ce personnage bien oublié, qui fut horloger à Paimpol au 19e siècle, est le créateur d’une méthode originale de mesure du temps. Entouré d’horloges qui égrainaient les secondes qui passent, il finit par ressentir une vive hostilité envers ces cœurs de métal qui ponctuent notre vie.
Écologiste avant l’heure, si j’ose dire pour ce chantre de la ponctualité, il tenta de mettre au point un système basé sur le haricot local. Il avait remarqué qu’écosser les gousses permettait de définir une nouvelle unité de temps : le coco, de symbole cq (coco de Quimper). Il se heurta néanmoins au fait que la vitesse cq/h était sujette à de nombreuses fluctuations. D’autre part les bourgeois locaux voyaient d’un mauvais œil la nécessité d’avoir une écosseuse comtoise en permanence dans leur salon et renâclaient devant la dépense importante que représentait l’approvisionnement régulier en gousses.
Confronté à toutes ces difficultés ainsi qu’à la tragédie de se découvrir un fils assassin, il ne tarda pas à perdre la raison. Repéré par le professeur Charcot en villégiature sur les côtes bretonnes, il fut transféré à la clinique parisienne du docteur Blanche où il s’éteignit quelques années plus tard en fredonnant :
Le brave horloger se résigne
En faisant un signe de croix
Et le pauvre gars
Quand vient le trépas.
Serrant la médaille qu’il baise
Glisse dans le temps sans fond
En songeant à la Paimpolaise
Qui l’attend au pays breton.
Deux infirmiers qui passaient par là se regardèrent. L’un d’eux hocha la tête et s’exclama :
« Ah ça, pour sûr, il a un grain ! ».
Je m'apitoyais sur le destin de ce malheureux horloger en plongeant mes Cocos de Paimpol dans l’eau bouillante en compagnie d’un oignon, de deux gousses d’ail, d’une feuille de laurier, d’un brin de thym, d’un bout de poivre long et d’un clou de girofle.
Pour les mettre en valeur tout en faisant hommage à l’inventeur maudit, j’ai posé sur ces haricots des crépinettes en forme d’oignons que l’on glisserait volontiers dans un gousset…
Avec le temps tout s'écosse… |
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