jeudi 14 décembre 2017

Mort d'un cornichon

J’avais déposé un Mont d’Or au fond d’un récipient en terre offert pour l’achat d’un de ses frères aînés au temps jadis. J’avais découpé à sa surface une croix avec la pointe d’un couteau, ce qui m’avait permis de soulever quatre pans de la croute vallonée. Dans la cavié obtenue j’avais versé un petit verre de vin blanc et inséré quelques éclats d’une gousse d’ail. Après que j’ai donné plusieurs tours de poivre rouge du moulin, je n’avais pas pu m’empêcher de jeter un coup d’œil sur les épices, me demandant si j’allais ajouter par exemple un peu de ce poivre de Voatsiperifery si parfumé, quand mon œil avait été attiré par un pot contenant de la poudre de mousseron séchée. Mais oui, son parfum délicat de sous-bois devait bien s’allier dans une sorte de camaïeu avec celui de la fleur du fromage !
J’ai pris le risque, j’ai saupoudré…

fromage rôti, Mont d'Or
Perspective sur le Mont d'Or

Puis j’ai enfourné à 190°C.


Un quart d’heure plus tard, je dresse un état des lieux : le fromage est bien fondu, mais la dessus n’est pas doré .
Je renfourne sous le grill allumé. Au bout de cinq minutes, le Mont d’Or a pris des couleurs. Il peut sortir.
Quelques lambeaux découpés dans l’épaule de Bellota lui fourniront un goûteux accompagnement.
Un peu d’acidité en contrepoint sera la bienvenue dans ce qu’il faut quand même bien appeler un festival du gras… Je dispose  une douzaine de petits cornichons dans une coupelle.
Et là c’est le drame. Un cornichon, sans doute par l’odeur alléchée, n’a pas meilleure idée que d’aller piétiner la surface du Mont d’Or. Ce qu’il ignore, c’est qu’il évolue sur du fromage mouvant ! Rien ne peut l’empêcher de s’enfoncer inexorablement. Même dans la position du pèlerin couché conseillée aux lambins de la baie du Mont Saint-Michel, la lise continue à l’engloutir. On n’aperçoit plus que la main du malheureux, et bientôt ce ne seront plus que cinq doigts désespérément  dressés vers le ciel qui émergeront.

Mont d'Or rôti
Fait d'hiver

Au secours, au secours ! C’est lui qui m’a poussé !

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