Je jette un regard désolé sur le rôti de pintade farci que m’a préparé le vendeur du volailler.
Quand j’étends ce long bébé mollasson à la peau grumeleuse (je précise que je décris ma pièce de viande et qu’il ne s’agit pas du vendeur - quoi que…), je me mets à désespérer. La farce de chair et de foies de volaille dont une partie commence à s’échapper d’un interstice mal ficelé me fait craindre par son manque de gras et son hachage très fin d'obtenir une texture desséchée après cuisson. Par endroits subsistent sur la peau quelques duvets et coûtons que je m’empresse de neutraliser au
Bref je suis hautement inquiet du résultat final. D’ailleurs même l’auteur ne croyait pas en son œuvre : « Faîtes attention en découpant les tranches, il n’y a pas de barde, alors ça risque de s’écrouler ! »
C'est dire !
Mais tout comme quand le vin est tiré il faut le boire, quand la pintade est ficelée il faut la cuire.
Je prépare une garniture aromatique - carotte, céleri, et oignons taillés en grosse brunoise — que j’étends sur le fond d’un plat en fonte beurré. J’ajoute une gousse d’ail, une feuille de laurier, quelques cassures de poivre long et une pincée de poivre de Voatsiperifery. Puis je couche mon gros bébé mollasson que j’ai assaisonné d’une cuillerée de sel fin et d’une pincée de quatre-épices.
Je parsème de noisettes de beurre, je verse un verre d’eau au fond du plat en arme anti-dessiccation.
J’enfourne pour une heure et demie à 160 °C.
Je renouvellerai régulièrement le verre d’eau afin de maintenir l’humidité.
Il me faut passer à la préparation de la garniture.
En premier lieu, des gnocchis.
Je reprends grosso modo les proportions qui m’avaient jadis donné satisfaction.
http://sosgrisbiche.blogspot.com/2018/03/mon-lapin.html
Cette fois-ci ce seront 240 g de farine T55 et 2 jaunes d’œuf pour 800 g de purée de pomme de terre.
Je façonne sur une planchette, procède à la cuisson.
Je réserve.
Passés sur la planche |
En second lieu, des champignons. Je nettoie à la brosse et au chiffon humide des pieds-de-mouton et des lentins du chêne dont je partage en deux les plus gros. Pour les chanterelles, il me suffit de les débarrasser d’une partie de leurs queues.
Je fais tomber tout ce petit monde sur un trait d’huile d’olive et une noisette de beurre. Quand les champignons ont perdu leur eau, je les noie sous 25 cl de crème liquide. Je sale, parsème d’une petite cuillerée de cinq-épices dont la note anisée devrait bien fonctionner et je laisse réduire à feu moyen.
Je réserve.
Trilogie de champignons |
La cuisson du rôti de pintade est achevée. Heureuse surprise, la pièce ne s’est pas écroulée lamentablement, la fuite de farce est restée modeste. Mais surtout la peau est devenue craquante à souhait.
Toutefois c’est encore avec inquiétude que je dépose le bébé plus du tout mollasson sur une planche et m’apprête à le découper. Je sors même mon couteau le plus performant - un japonais acéré. Aligatô ! Miracle… Les tranches se succèdent sans problème. Elles sont nettes, la farce manque sans doute un peu d‘onctuosité, mais elle n’est pas desséchée. Je remets à température les champignons et je réchauffe les gnocchis dans moult beurre demi-sel fondu.
Au bon beurre |
Tout est maintenant prêt pour dresser. Je termine en parsemant les gnocchis d'un peu de parmesan râpé et en arrosant les tranches de pintade farcie avec du jus prélevé au fond du plat de cuisson.
Elles ne cacabent plus |
Finalement, mes craintes étaient vaines. Toute la famille réunie se régale.
Je n’ai pas été le dindon de la farce que je m’imaginais être… Ouf
Pour sa part mon épouse et néanmoins pâtissière maison a confectionné un Bienenstich.
Il s’agit d’une pâte levée recouverte d’une masse aux amandes (tant pour tant miel, sucre, beurre porté à ébullition dans lequel on incorpore des amandes effilées) enfournée à 180 °C durant une demi-heure, puis fourrée après refroidissement d’une garniture consistant en un mélange d’une sorte de crème pâtissière affermie avec de l’agar-agar et de crème chantilly - donc une crème diplomate, me semble-t-il.
Merci aux abeilles (Bienen) ! |
Pas mauvais ma foi, même si la pâte manquait un peu de légèreté…
Une ancêtre de la tropézienne... |
Ce qui ne facilitait pas la découpe des parts !
Epanchement |