lundi 28 octobre 2019

Cuisine de frigo

Il me restait des champignons de Paris – nés dans le Maine-et-Loire… - achetés pour un projet culinaire qui ne s’était pas concrétisé et qui se morfondaient au fond du frigo. Non loin, deux plaques de pâte feuilletées préparée par un traiteur, rescapées d’un trio dont le premier individu avait servi à réaliser une tarte fine en la couvrant de lamelles de pommes, se rapprochaient dangereusement de leur DLC. Quand je vis à la télévision un boulanger se lancer dans la confection d’une tourte vrillée dans son challenge d’intégration de champignons avec l’espoir que son établissement progresse vers le titre de Meilleure boulangerie de France, l’illumination m’est venue…


C’est donc décidé, je passe à l’action !
Je hache la majorité des champignons, en réservant environ un cinquième que je me contente de ciseler afin de conférer un peu de mâche. Je cisèle une grosse échalote cuisse de poulet.
Je peux me lancer dans la confection de la duxelles :
Je fais suer l’échalote dans une bonne noix de beurre, puis ajoute les champignons ainsi qu’une branche de romarin et une feuille de lauriers que je retirerai après cuisson. Les échappés de cave saumuroise puis de bac à légumes évacuent leur eau sur une flamme moyenne, puis je baisse le feu et laisse évaporer sous un couvercle légèrement entrouvert en brassant délicatement de temps en temps. Eh oui, je ne suis pas certain de maîtriser vraiment le geste auguste du sauteur de poêle ni même de sautoir (pourtant c’est étudié pour…). Quand il ne reste pratiquement plus de liquide, j’éteins et réserve, assaisonnant de fleur de sel et de poivre rouge du moulin.


duxelles, tourte vrillée
Duxelles sera toujours Duxelles


Je passe ensuite à la confection d’une béchamel épaisse dans laquelle je fais fondre du parmesan que je viens de râper. J’incorpore cette sauce à ma duxelles.


tourte vrillée
Avec l'onction de la béchamel


Je relève le mélange de gouttes de Tabasco.
Je goûte. Il me semble qu’il manque un ingrédient pour fournir un plus de vivacité à cet appareil un peu endormi avant d’en farcir ma tourte…
Une solution me vient à l’esprit. Dans un coin du frigo un sachet de tomates cerises du jardin que j’avais déshydratées et mises sous vide attend que j’en fasse bon usage. J’en prélève la moitié que je découpe grossièrement avant de l’introduire dans ma garniture.


tomates déshydratées
Eh oui, déshydratées !


Je goûte une nouvelle fois. Bingo ! La saveur et la texture sont nettement améliorées, il me suffira de rajouter une pincée de sel ainsi qu’un tour de moulin de poivre, et ce sera parfait - ou au moins presque parfait du subjectif.

Le plus délicat reste à faire : le montage.
J’étale une des plaques de pâte feuilletée et y découpe un disque avec une assiette en guise de gabarit. C’est un peu trop petit à mon gré, mais je n’ai pas de cercle plus grand sous la main et la seule plaque de cuisson dont je dispose ici est elle-même de taille restreinte. Je recouvre de ma duxelles améliorée jusqu’à 1 cm du bord. Il me reste de cet appareil, alors j’en tartinerai les chutes de pâte rassemblées et étalées pour obtenir une sorte de tarte.
Je réserve ce disque garni au frais le temps de produire son couvercle à partir du second rectangle de pâte feuilletée.
Je coiffe en ajustant bien les bords, que je scelle à l’aide des pointes d’une fourchette. Je cherche un verre suffisamment étroit pour, une fois placé au centre, me laisser assez d’espace pour après découpe obtenir des branches d’une longueur suffisante pour les torsader.
Je découpe suivant les rayons pour obtenir douze branches autour du disque central préservé sous sa cloche de verre que je retire après l’opération. Je tente un premier vrillage qui confirme ma crainte de ne pouvoir effectuer qu’une seule rotation mais surtout me montre que la chaleur ambiante – le four est en préchauffe – a rendu la pâte trop molle pour être manipulée sans risque de déchirure ou tout au moins d’élongation intempestive. Alors j’introduis ma tourte fendue mais pas encore vrillée dans le congélateur pendant quelques minutes que je mets à profit pour préparer ma tarte de récup annexe.
Je sors la tourte, c’est bien, la pâte n’est pas devenue cassante mais a pris de la tenue. En faisant vite, ça devrait pouvoir aller. Et effectivement je parviens à réaliser mes mono torsades sans encombre.
Je remets au congélateur.
C’est bon, je vois que les 180 °C sont atteints et que le témoin du thermostat n’est plus allumé Je sors la tourte vrillée de son antre glaciale, la barbouille de jaune d’œuf étendu d’eau et l’enfourne. Elle restera 25 minutes dans ce four avant d’en sortir bien dorée.


tourte vrillée, champignons
Fait comme un Râ


Je suis plutôt content du résultat, même si le jury qui accusait le candidat de manque de perfection dans la finition m’accablerait sans doute de ses sarcasmes devant mon approximation.

Mais une chose est certaine, quand, après avoir laissé tiédir, nous dégustons les pièces arrachées du moyeu central : c’est que c’est très bon.


tourte vrillée, tarte en étoile
Bien en bouchées


La garniture est encore plus savoureuse après cuisson, les flaveurs s’étant entremêlées dans un équilibre jouissif pour les papilles, et la pâte feuilletée apporte le croustillant nécessaire.

Mon valeureux frigo, bien que presque trentenaire, sait se montrer un coffre aux trésors insoupçonné. Mais il faut quand même y mettre un peu du sien…



_

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire